14ème législature

Question N° 59142
de M. François Sauvadet (Union des démocrates et indépendants - Côte-d'Or )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > cours d'eau, étangs et lacs

Tête d'analyse > politique et réglementation

Analyse > continuité écologique.

Question publiée au JO le : 08/07/2014 page : 5718
Réponse publiée au JO le : 25/08/2015 page : 6493
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. François Sauvadet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur l'interdiction d'implanter des ouvrages sur les cours d'eau, introduite par la loi sur l'eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006. Il a reçu plusieurs témoignages des jeunes agriculteurs de Côte-d'Or se plaignant d'obligations de respect de la continuité écologique trop contraignantes qui nuisent à leur production agricole et les empêchent de lutter contre la sécheresse. Selon le passage de poissons migrateurs et les mouvements naturels des fonds des rivières, ces obligations sont imposées aux ouvrages sur certains cours d'eau, elles peuvent aller jusqu'à l'interdiction d'y implanter des ouvrages. Ceux-ci garantissent pourtant une biodiversité des poissons en assurant une certaine profondeur d'eau nécessaire pour les espèces halieutiques de fond, sans cependant nuire aux espèces migratrices capables de contourner ou de franchir les petits seuils. Aussi il lui demande s'il est envisagé des mesures concrètes visant à engager une révision de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques. La Côte-d'Or compte plus de 2 500 kilomètres de cours d'eau. Le département connaît actuellement l'une des sécheresses les plus sévères depuis 1958. Au 10 juin 2014, sur les 16 stations hydrométriques de Côte-d'Or, 14 indiquaient que le seuil d'alerte était franchi, dont 2 en situation d'alerte renforcée. Les collectivités, l'industrie et l'agriculture subissent un ensemble de restrictions et d'interdictions qui empêchent leur bon fonctionnement. En période de sécheresse, les retenues d'eau permettent d'assurer la continuité de la ressource en eau et de conserver un étiage nécessaire à la survie de certaines espèces piscicoles. Une révision de la législation actuelle devient impérative.

Texte de la réponse

La préservation et la restauration de la continuité écologique des cours d'eau est un axe important pour l'atteinte du bon état des eaux et la préservation de la biodiversité. Les ouvrages en barrage de cours d'eau entraînent une artificialisation des milieux en amont (remplacement de milieux d'eaux courantes par des milieux d'eaux stagnantes), avec des effets négatifs sur la qualité des eaux (concentration de polluants dans les sédiments, hausse de la température, diminution de la teneur en oxygène). L'impact de ces retenues sur la biodiversité s'avère négatif. Elles entraînent l'ennoiement de frayères (zones de reproduction du poisson) et la substitution d'espèces d'eaux vives par des espèces d'eaux stagnantes. Alors que les espèces piscicoles ont besoin de circuler entre leurs lieux de reproduction, de croissance, d'alimentation et de repos (c'est particulièrement le cas des espèces migratrices, telles le saumon atlantique et l'anguille européenne, qui vivent alternativement en eau douce et en eau salée), ces ouvrages ont pour conséquence de réduire voire de supprimer les possibilités de migration de ces espèces et d'accomplissement de leur cycle de vie. Par ailleurs, la qualité des habitats aquatiques en aval est liée au bon fonctionnement du transport sédimentaire qui peut être perturbé par l'existence de retenues. L'impact des retenues sur le débit des cours d'eau s'avère également négatif. En période estivale, la présence d'un plan d'eau entraine une augmentation des pertes d'eau par évaporation (du fait de l'augmentation de la surface en eau). La restitution au cours d'eau des eaux d'une retenue est rarement une solution satisfaisante pour limiter les conséquences des étiages sévères. Des contradictions peuvent exister entre l'usage du plan d'eau (irrigation, loisirs...) et le soutien d'étiage, pouvant entraîner une forte diminution du niveau du plan d'eau en fin d'été. La qualité des eaux restituées à partir du plan d'eau diffère de celle du cours d'eau (température, teneur en oxygène, concentration de matières en suspension...). Aussi la loi sur l'eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 a-t-elle renforcée les dispositions relatives au débit minimum biologique à maintenir dans le cours d'eau (article L. 214-18 du code de l'environnement). Elle a également rénové les mesures relatives au classement des cours d'eau (article L. 214-17 du code de l'environnement). Des arrêtés du préfet coordonateur de bassin fixent ainsi : - une liste des cours d'eau sur lesquels la construction de nouveaux obstacles à la continuité écologique ne peut pas être autorisée (cours d'eau en très bon état, réservoirs biologiques, cours d'eau à poissons migrateurs amphihalins) ; - une liste des cours d'eau sur lesquels les ouvrages doivent être gérés, entretenus et équipés de manière à garantir le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs. L'importance de cet enjeu a été réaffirmée par un plan d'action pour la restauration de la continuité écologique des cours d'eau lancé en 2009 par la secrétaire d'État à l'écologie. Afin de limiter les étiages sévères sur les cours d'eau et de satisfaire au mieux les besoins estivaux en eau des différents usages (industrie, agriculture, loisirs...), la solution la plus efficace reste la maîtrise des prélèvements. Lorsque la recherche d'économies d'eau n'est pas suffisante, la création de ressources de substitution, telle la création de retenues déconnectées des cours d'eau alimentées par les eaux de ruissellement, du bassin versant ou par des prélèvements hivernaux peut être envisagée, en tenant compte des caractéristiques environnementales des sites retenus et des contraintes liées à l'alimentation des populations en eau potable. Inscrites dans une démarche environnementale (projet de territoire), les retenues de substitution présentent un double avantage : par la déconnexion du cours d'eau, elles diminuent les pressions sur le cours d'eau (rupture de continuité, température, etc.) et par un prélèvement hivernal utilisé en été, elles permettent d'assurer aux usagers un accès sécurisé à une ressource en eau. Néanmoins le prélèvement hivernal doit rester raisonnable et ne pas compromettre le fonctionnement de l'écosystème.