14ème législature

Question N° 59622
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > procédure

Analyse > état d'ivresse. examen médical. modalités.

Question publiée au JO le : 08/07/2014 page : 5764
Réponse publiée au JO le : 24/03/2015 page : 2296
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Jacques Bompard attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la nouvelle consigne imposant aux forces de l'ordre qui arrêtent un individu en état d'ivresse de le faire examiner par un médecin. Cette procédure impose en effet parfois aux forces de l'ordre de faire plusieurs dizaines de kilomètres pour trouver un hôpital permettant de réaliser cet examen préalable à la mise en cellule de dégrisement. Compte tenu du coût de déplacement de trois policiers, ainsi que de la multiplication du nombre de policiers nécessaires pour faire face à cette inflation procédurale, il est probable que les forces de l'ordre n'auront plus comme solution que de décider de ne plus voir le contrevenant. Il lui demande comment il compte rendre réalisable pour les forces de l'ordre cette consigne éminemment humanitaire sans mettre en péril la réalisation de leurs autres missions.

Texte de la réponse

L'infraction d'ivresse publique et manifeste est prévue par les articles L. 3341-1 et R. 3353-1 du code de la santé publique et constitue une contravention de la deuxième classe. Dans sa décision n° 2012-253 QPC du 8 juin 2012, le Conseil Constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution les dispositions de l'article L. 3341-1 du code de la santé publique et a considéré que le placement en chambre de sûreté constituait un acte de police administrative. Ce cadre juridique respecte également les exigences de l'article 5 (droit à la liberté et à la sûreté) de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 du Conseil de l'Europe. L'article L. 3341-1 du code de la santé publique dispose « qu'une personne trouvée en état d'ivresse dans les lieux publics est, par mesure de police, conduite à ses frais dans le local de police ou de gendarmerie le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu'à ce qu'elle ait recouvré la raison ». La procédure dite d'IPM consiste donc à interpeller des personnes en état d'ébriété sur la voie publique et à les placer en cellule de dégrisement. Deux circulaires du ministère de la santé du 16 juillet 1973 et du 9 octobre 1975 complètent ce dispositif en organisant les modalités d'un examen médical dans les services hospitaliers des urgences. Elles posent, notamment, le principe de la délivrance par les autorités médicales d'un certificat de non admission à l'hôpital avant tout placement en cellule de dégrisement et prévoient un « bilan médical exact » afin d'apprécier si l'état de santé de la personne est compatible avec un placement en chambre de sûreté, et notamment de « déceler éventuellement certaines affections qui se manifestent par des signes analogues à ceux de l'ivresse ». Le transport à l'hôpital de la personne recueillie en état d'ébriété sur la voie publique relève de la compétence des forces de police et de gendarmerie puisqu'il s'agit d'abord d'une opération de police administrative. Les sapeurs-pompiers réalisent toutefois ce type de transport dans deux cas : en cas d'urgence vitale ou à la demande des services de police ou de gendarmerie. Ces interventions s'inscrivent alors dans le cadre des missions imparties aux sapeurs-pompiers, conformément à l'article L. 1424-62 du code général des collectivités territoriales et sont assurées à titre gratuit. Dans les autres cas, au regard de l'article L. 3341-1 du code de la santé publique, le service départemental d'incendie et de secours pourrait être fondé à demander à la personne en état d'ébriété le remboursement du transport entre la voie publique et l'hôpital. L'examen médical répond à une mesure de police et a pour seul objet de déterminer si la personne peut être admise en cellule de dégrisement. Il ne s'agit donc pas d'un examen médical au sens des missions définies dans le code de la santé publique, mais d'un acte constitutif d'une mesure administrative. Un arrêt du Conseil d'État du 25 octobre 2002 confirme qu'il s'agit d'une mission de préservation de l'ordre public et met donc les frais médicaux à la charge de l'administration. La prise en charge des personnes trouvées ivres sur la voie publique obère parfois fortement la capacité opérationnelle des services de police. Pour autant, contrairement à ce que laissent penser les termes de la question parlementaire, elle ne répond à nulle « nouvelle consigne », le dispositif ayant été organisé par les circulaires précitées de 1973 et 1975. S'agissant de la gendarmerie, cet examen médical préalable a été systématisé dès 2008. La présentation des personnes concernées dans les établissements hospitaliers générant un nombre d'heures fonctionnaires important, certaines directions départementales de la sécurité publique (DDSP) ont proposé que cet examen soit effectué dans les commissariats par un médecin requis. Quelques DDSP ont déjà signé des conventions avec des professionnels de santé (SOS Médecins...), organisant le déplacement d'un praticien dans les locaux du service de police aux frais de la ville (ex : convention du 18 juillet 2005 entre la DDSP du Rhône et SOS Médecins, accord entre la DDSP de Savoie et la ville de Chambéry en 2006) ou sur un budget attribué par le fonds interministériel de prévention de la délinquance (ex : convention du 19 mai 2004 entre SOS Médecins de Lille et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances). Une convention a, par ailleurs, été signée le 16 mai 2007 par la commune d'Agde (Hérault), qui permet de renforcer les équipages de police nationale par des effectifs de police municipale pour la conduite des personnes concernées vers le centre hospitalier de la commune. En zone gendarmerie, cette question se pose avec une acuité particulière du fait de l'élongation parfois conséquente des distances entre l'implantation de certaines brigades et le centre hospitalier compétent. Des dispositifs conventionnels ont également pu être mis en place entre certains groupements ou compagnies de gendarmerie départementale et des groupes de médecins pour organiser une permanence de médecins acceptant de se déplacer dans les brigades.