14ème législature

Question N° 59748
de M. Patrice Carvalho (Gauche démocrate et républicaine - Oise )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, emploi et dialogue social
Ministère attributaire > Travail, emploi et dialogue social

Rubrique > retraites : généralités

Tête d'analyse > réforme

Analyse > compte pénibilité. modalités. réglementation.

Question publiée au JO le : 08/07/2014 page : 5821
Réponse publiée au JO le : 26/08/2014 page : 7246

Texte de la question

M. Patrice Carvalho attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social sur le report de la mise en place du compte pénibilité annoncé par le Premier ministre. Il aura donc suffi que le patronat menace de ne pas participer à la conférence sociale des 7 et 8 juillet 2014 pour que le Gouvernement recule, une nouvelle fois. Ce dispositif était sans doute l'unique avancée sociale de la réforme des retraites adoptée en 2013. Applicable au 1er janvier 2015, ce compte proposait aux salariés exposés à un environnement de travail pénible (bruit, vibrations, charges lourdes, températures élevées, travail répétitif ou de nuit...) de cumuler des points et de bénéficier d'un départ anticipé à la retraite. Dans ce dossier, le Gouvernement n'a eu de cesse de reculer devant les pressions du Medef. Il a d'abord demandé un rapport sur le sujet à M. Michel de Virville, ancien DRH de Renault et membre de la Cour des comptes. Celui-ci en produira même deux, le second introduisant des simplifications importantes (annualisation de la déclaration, suppression de la fiche de pénibilité, déclaration via la déclaration annuelle des données sociales [DADS]). Puis, début mai, le Gouvernement a décidé de supprimer le paiement des cotisations liées à la pénibilité jusqu'en 2017. À présent, il est proposé que le compte pénibilité ne soit généralisé qu'en 2016 et qu'à partir du 1er janvier 2015, seuls quatre des dix facteurs de risques listés au départ soient pris en compte dans la mesure de la pénibilité (travail de nuit, travail répétitif, travail posté, travail en milieu hyperbare). Le feuilleton risque de connaître encore de nouveaux épisodes mettant en cause le dispositif voté par le Parlement, si nous considérons que le Premier ministre a annoncé de nouveaux décrets sur lesquels les partenaires sociaux seront consultés. Il faut donc s'attendre à de nouvelles pressions du patronat. Ces dernières et la situation qu'elle crée sont indécentes quand nous savons que des milliers de salariés sont exposés à des environnements de travail qui menacent leur santé et diminuent leur espérance de vie, quand certains d'entre eux tentent encore de faire valoir leurs droits après avoir été victimes d'exposition à l'amiante ou à d'autres produits dangereux, sont aujourd'hui malades et condamnés à des décès prématurés. Il lui demande de mettre en oeuvre le compte pénibilité dans les délais votés par le Parlement.

Texte de la réponse

Afin de garantir le caractère équitable de la réforme des retraites, le gouvernement s'est engagé, et c'est là un axe majeur de cette réforme, à apporter une réponse durable à la question de la pénibilité au travail. Elle passe par la reconnaissance d'une juste compensation pour les salariés concernés, mais aussi par la prévention de l'exposition à des facteurs de pénibilité. La création d'un compte personnel de prévention de la pénibilité représente, à cet égard, une avancée sociale essentielle. Ayant bien conscience des difficultés auxquelles doivent faire face les petites entreprises, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, la priorité du gouvernement a été de privilégier des solutions offrant la plus grande simplicité de gestion et de sécurité juridique tant pour les entreprises dans leurs obligations de déclaration des situations de pénibilité que du point de vue des salariés pour la mobilisation de leurs droits. La concertation conduite par Michel de Virville s'est efforcée de trouver les modalités de mise en oeuvre les plus simples, les moins coûteuses et les plus sûres. Beaucoup de propositions ont été prises en compte : annualisation des seuils, déclaration unique en fin d'année, dématérialisation et simplification de la fiche de pénibilité, calendrier très progressif de montée en charge des cotisations. Cette réforme est importante et engage sur le long terme. Elle crée un droit, non pas pour quelques années, mais pour des générations entières de salariés. Elle mérite, pour assurer sa réussite, un temps d'appropriation pour les entreprises par une montée en charge progressive du dispositif. C'est la raison pour laquelle, l'année 2015 sera une année de « rodage » du dispositif sur une partie des facteurs de pénibilité identifiés (4 sur 10, les plus simples à identifier), avant sa généralisation en 2016, car il ne peut être question de remettre en cause l'objectif. Comme l'a réaffirmé le Président de la République lors du discours d'ouverture de la troisième Grande Conférence Sociale : « traiter de la pénibilité, là encore, a été un progrès [...]. Cette pénibilité aura maintenant toute sa place dans la législation française ». La loi s'appliquera donc bien à partir du 1er janvier 2015 et sera pleinement opérationnelle et effective dès 2016. Cela laisse une année pour permettre aux entreprises d'assurer une pleine application dans la durée du compte pénibilité et ainsi garantir la réussite de cette réforme.