14ème législature

Question N° 59816
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > sécurité publique

Tête d'analyse > sécurité des biens et des personnes

Analyse > criminalité. zones rurales. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 08/07/2014 page : 5765
Réponse publiée au JO le : 23/09/2014 page : 8105
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Jacques Bompard attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le crime organisé qui se développe dans les campagnes. Selon un rapport réalisé par la Direction générale de la gendarmerie nationale, les zones rurales font face à une explosion de la criminalité. Cette criminalité issue, selon ce rapport, de groupes composés de romanichelles ayant la citoyenneté serbe ou roumaine, ou de Bosniaques, albanophones, de russophones, de Lituaniens et de Géorgiens, sévit désormais sur tout le territoire. Ces groupes criminels, solidement implantés dans de nombreuses régions, en particulier métropolitaines, brassent des sommes d'argent considérables comme l'attestent les saisies effectuées lors des procédures judiciaires, avec par exemple ces sept millions d'euros d'avoirs criminels récupérés, dans une affaire de "stups", par les enquêteurs des sections de recherche de Pau et Poitiers en janvier 2013. Il lui demande ainsi ce qu'il compte faire pour que cette criminalité disparaisse et que la sécurité des citoyens soit assurée.

Texte de la réponse

Les infractions commises dans les zones rurales en France font l'objet de la plus grande attention de la part du gouvernement, du ministère de l'intérieur et de la gendarmerie nationale généralement compétente sur ces territoires. L'analyse de la délinquance et plus particulièrement des cambriolages, commis dans ces zones révèle la part non négligeable de la délinquance itinérante, notamment celle de groupes criminels transnationaux organisés issus de différents pays d'Europe Orientale. En septembre 2013, un plan national de lutte contre les cambriolages et les vols à main armée a permis de mobiliser tous les acteurs du ministère de l'intérieur et en particulier l'ensemble des unités et des moyens de la gendarmerie nationale. Ce plan a été complété par des dispositifs particuliers : - le plan national de lutte contre la délinquance itinérante en décembre 2013 ; - le plan de lutte contre les vols dans les exploitations agricoles en mars 2014 destiné à renforcer la sécurité des exploitations agricoles, particulièrement visées par ces groupes organisés. Sensibilisée au phénomène dont sont responsables ces délinquants qui commettent de nombreux délits en série, la gendarmerie mène une action volontariste en adaptant ses modes d'action traditionnels, notamment en développant des moyens d'enquête spécialisés face aux structures criminelles organisées. Au plan national, cette action implique un engagement fort de l'office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI) qui anime, coordonne et appuie les enquêtes en cours, tant au sein de la gendarmerie nationale que de la police nationale. L'ensemble des partenaires nationaux et internationaux sont sollicités pour démanteler ces réseaux. Dans le cadre de ce suivi opérationnel, les échanges de renseignements à caractère judiciaire sont ainsi pratiqués de façon systématique entre les unités en charge des enquêtes, le Service Technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD) de la gendarmerie nationale et l'OCLDI, aboutissant à des rapprochements souvent déterminants dans les enquêtes en cours, à la mise en évidence de phénomènes criminels et à la réalisation d'analyses de portée stratégique au profit de tous les services. La création de cellules d'enquête par l'OCLDI, aux côtés d'unités de gendarmerie ou de services de police, dédiés à lutter contre des phénomènes identifiés, constitue également l'un des outils opérationnels privilégiés. La plupart de ces cellules portent actuellement leurs efforts sur des groupes criminels organisés transnationaux, le plus souvent actifs dans les zones de compétence de la gendarmerie nationale. Au plan local, dans le cadre de la mise en oeuvre du plan national de lutte contre les cambriolages et les vols à main armée, des cellules d'appui judiciaire (CAJ) ont été créées au sein des groupements de gendarmerie départementale depuis mai 2014. Agissant en priorité dans la lutte contre les cambriolages, la CAJ est un nouvel outil visant à satisfaire un besoin de coordination et d'appui judiciaire clairement identifié (direction d'enquêtes pour des faits d'une certaine gravité ; projection d'enquêteurs en cas d'événement particulier ; exploitation du renseignement judiciaire élaboré préalablement dans des domaines prioritaires fixés par le commandant de groupement en s'impliquant notamment dans les échanges avec la police nationale et les diffusions de l'information judiciaire aux unités locales et les groupes d'enquêtes de lutte anti-cambriolages (GELAC)). Enfin, la lutte contre les groupes criminels organisés itinérants, en particulier transnationaux, s'inscrit dans une lutte globale qui ne peut être pleinement efficace que dans le cadre européen, et sans stigmatisation des pays d'origine. C'est pourquoi le ministère de l'intérieur mène une stratégie européenne pro-active dans ce domaine. L'OCLDI est co-pilote du projet européen EMPACT (European Multidisciplinary Plateform against Criminal Threats) concernant les atteintes aux biens commises par des groupes criminels organisés itinérants. Soutenu par l'agence européenne Europol et constituant l'une des 9 priorités de lutte contre le crime organisé du cycle politique de l'Union Européenne 2014-2017, ce projet, qui rassemble 20 États membres de l'Union Européenne, a débuté en janvier 2014. Il est actuellement décliné dans le cadre d'un OAP (Operational Action Plan) qui se décompose en actions très concrètes : une intensification des échanges d'informations entre États européens et avec Europol, l'organisation de journées d'actions (lutte contre les vols de métaux en mai 2014, lutte contre les cambriolages et le recel en septembre 2014) et l'aide à la conduite d'enquêtes transnationales (avec le soutien d'Eurojust). Les forces de l'ordre en général et l'OCLDI en particulier sont également en contact étroit avec les « Focal Points » (FP) EEOC, Copper et Furtum d'Europol, qui sont en charge des groupes criminels organisés itinérants originaires d'Europe Orientale. Ils contribuent à soutenir les enquêtes en cours, grâce à des capacités d'analyses criminelles, de rapprochements et de soutien opérationnel (organisation de réunions). Financé par la commission européenne, un nouveau projet ISEC a été lancé en janvier 2014 à l'initiative du BKA allemand et vise à lutter contre les groupes criminels organisés itinérants issus de l'ex-Union Soviétique. En outre, l'OCLDI entretient une coopération opérationnelle et directe avec les services opérationnels de certains États, en particulier roumains et moldaves et développe actuellement des coopérations avec d'autres services des États des Balkans de l'Ouest. L'ensemble de ces efforts permet donc une meilleure analyse des phénomènes et une identification plus précise des malfaiteurs, ces actions très concrètes débouchant sur des opérations judiciaires, souvent coordonnées et simultanées avec d'autres États européens qui sont, comme la France, de plus en plus sensibilisés à cette menace.