14ème législature

Question N° 61393
de M. Alain Bocquet (Gauche démocrate et républicaine - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Rubrique > recherche

Tête d'analyse > chercheurs

Analyse > établissements publics. situation financière. perspectives.

Question publiée au JO le : 22/07/2014 page : 6132
Réponse publiée au JO le : 08/09/2015 page : 6834
Date de changement d'attribution: 06/03/2015

Texte de la question

M. Alain Bocquet attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur les difficultés rencontrées par un grand nombre d'universités et d'établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST). Ceux-ci sont contraints de mettre en place des plans de rigueur compte tenu de l'état de leurs finances. La conséquence est une aggravation du sous-encadrement des étudiants, la réduction de l'offre d'enseignement, la fermeture d'options et l'augmentation du nombre d'étudiants en travaux dirigés (TD) souvent assurés par des vacataires, ce qui compromet gravement leur réussite. Dans les universités, plus de 2 000 emplois sont « gelés » depuis 2010 et l'essentiel de l'équivalent budgétaire des 1 000 emplois supplémentaires promis en 2013 a servi à éponger les déficits des budgets de fonctionnement. Dans la recherche, le solde des emplois créés et des emplois détruits est fortement négatif. Le CNRS a perdu à lui seul 2 300 emplois statutaires depuis 2011 et tant dans les universités qu'au CNRS, à l'INRA ou à l'INSERM, il y a recrudescence d'emplois à durée déterminée, le bilan social du ministère faisant état de près de 80 000 précaires soit 34 % des effectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche. Cette précarité met en danger la continuité dans la mise en œuvre des procédures de recherche et la transmission des connaissances et elle pèse sur l'attractivité des carrières. L'évolution de la dépense intérieure en matière de recherche et de développement par rapport au PIB a, selon les chiffres de l'OCDE, fait reculer notre pays de la 7ème à la 15ème place dans le classement mondial entre 1995 et 2011. Quant à l'efficacité du crédit impôt recherche (CIR) au regard de son objectif, selon un rapport de la Cour des comptes de juillet 2013, celui-ci « est difficile à établir ». Il lui demande les évolutions que le Gouvernement envisage de prendre pour pallier ces difficultés.

Texte de la réponse

Le budget 2015 a réaffirmé l'ambition du Gouvernement dans les domaines de l'enseignement supérieur et de la recherche. Le budget consacré par l'Etat s'élève en 2015 à 23,05 Mds€ (soit une progression de 45 M€ par rapport au budget 2014). Ces crédits sont en évolution constante depuis 2012 et marquent une progression de près de 600 M€. Des moyens supplémentaires seront dégagés afin d'abonder les dotations de fonctionnement et de masse salariale des établissements supérieurs pour financer notamment la création de 1000 emplois prévus à la rentrée 2015, et ce dans la continuité de ceux créés lors des précédentes rentrées de 2014 et 2013. L'effectif global des agents non titulaires est d'environ 89 000 dans l'enseignement supérieur et la recherche. Dans cette population - constituée majoritairement de contractuels exerçant des fonctions BIATSS [bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniciens, social, santé] - environ 30 000 sont des enseignants et chercheurs contractuels non titulaires. En 2013, ils représentent 29 % de l'ensemble de la population enseignante, soit une proportion en baisse de près d'un point par rapport à l'année précédente (29,9 %) et de près de deux points en 5 ans (30,8 % en 2009). Les établissements d'enseignement supérieur ont recours à ces enseignants non titulaires - qui sont dans une situation qui ne peut pas être qualifiée de précaire dans la mesure où elle relève d'une politique de vivier ou d'attractivité - dans un double objectif : - renouveler le vivier de l'emploi scientifique : avec le dispositif des attachés temporaires d'enseignement et de recherche (ATER), qui permet la constitution et le renouvellement d'un vivier de jeunes docteurs qui peuvent postuler sur des emplois d'enseignants-chercheurs, et le contrat doctoral qui offre aux étudiants la possibilité de bénéficier d'une aide à la formation et d'une initiation aux métiers de l'enseignement supérieur ; - apporter aux étudiants le bénéfice de l'expérience professionnelle d'enseignants non titulaires : avec les enseignants invités et associés ainsi que les lecteurs et les maîtres de langue étrangère. Par ailleurs, le ministère veille à l'application de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, qui instaure notamment un dispositif de transformation des contrats en contrats à durée indéterminée pour les agents remplissant certaines conditions d'ancienneté. Dans le cadre d'un agenda social, le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche va mettre en oeuvre en 2015 une réflexion avec les partenaires sociaux pour s'assurer de la résorption de la précarité et de l'accompagnement des agents contractuels. Le budget 2015 pour la recherche, inscrit au sein de la mission interministérielle recherche et enseignement supérieur (MIRES) qui englobe la quasi-totalité des moyens de recherche civile publique et de recherche duale en France, représente près de 14 Mds€, dont 50 % sont destinés au soutien à la recherche fondamentale. Au sein des opérateurs de la recherche, l'ensemble des départs de chercheurs seront remplacés, ce qui permettra une stabilité de l'emploi scientifique. De même, les crédits d'intervention de l'ANR (agence nationale de la recherche) progressent de 4,9 M€ pour s'élever à 580 M€. Parallèlement à ces engagements, la recherche est le premier bénéficiaire du programme d'investissements d'avenir (PIA), avec près de 1,1 Md€ issu des programmes MIRES du PIA 1 et 2,2 Mds€, issus du PIA 2. Cet effort constant en faveur de la recherche se traduit par une croissance continue du nombre de chercheurs de la recherche publique. Depuis 10 ans, leur nombre a augmenté de 10,8 %. Dans le secteur public, les chercheurs représentent 102 500 ETP (équivalent temps plein) (dont 50 % occupé dans l'enseignement supérieur). Depuis 2002, les chercheurs des entreprises sont devenus plus nombreux que ceux des administrations. Avec 60 % de l'ensemble des chercheurs, les entreprises emploient en 2012 156 600 chercheurs en ETP, soit une progression de 25,7 % des effectifs depuis 2007. Ainsi, la France est l'un des pays de l'OCDE qui emploient le plus de chercheurs. En 2012, elle comptait 259 000 chercheurs (dont ingénieurs de R&D [recherche et développement]) en ETP. En proportion de la population active, la France emploie ainsi 8,8 chercheurs et ingénieurs pour mille actifs, soit moins que la Corée du Sud (11,5 ) et le Japon (10,0 ), mais davantage que l'Allemagne (7,9 ) et le Royaume-Uni (7,9 ). L'emploi scientifique est donc en progression constante. Néanmoins, même si l'insertion professionnelle des jeunes chercheurs s'est améliorée, la situation actuelle n'est pas entièrement satisfaisante. Elle s'explique par la réduction de moitié du nombre de départs annuels à la retraite dans le secteur public pour les quatre prochaines années, qui conjuguée aux effets de la loi Sauvadet, impacte défavorablement les nouveaux recrutements. A effectifs constants, les possibilités d'embauche sont alors mécaniquement réduites. Des pistes d'amélioration existent en matière d'emploi des jeunes chercheurs. La recherche française pourrait notamment se tourner davantage vers les financements de l'Union européenne. Par ailleurs, le Gouvernement poursuit son action pour procurer des débouchés aux jeunes chercheurs, notamment vers le secteur privé dans lequel existe un véritable potentiel ou bien encore vers les autres débouchés du secteur public. Il a ainsi été décidé de : - maintenir les conditions du crédit impôt recherche (CIR) en faveur de l'emploi des jeunes docteurs (doublement du CIR sur deux ans) ; - maintenir les contrats CIFRE (convention industrielle de formation par la recherche) (1 350 nouveaux contrats en 2012) pour favoriser l'emploi des docteurs dans le secteur privé ; - ouvrir des discussions avec les grands corps de la fonction publique et les organisations professionnelles pour favoriser le recrutement de docteurs. A cet égard, conformément à la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, les procédures de recrutement dans des corps de catégorie A de la fonction publique seront progressivement adaptées pour les docteurs, dans l'objectif de valoriser les acquis de leur expérience professionnelle spécifique. Différentes modalités d'adaptation pourront être envisagées, telles que la création de concours réservés aux docteurs, ou l'adaptation de concours existants en ce qui concerne les conditions de candidature ou la nature des épreuves. Il est à noter que l'IGAS (inspection générale des affaires sociales) et le corps des Mines prévoient d'ores et déjà le recrutement direct de docteurs. Enfin, il est également de la responsabilité des organismes et des établissements de décliner dans leur dialogue social interne la priorité à l'emploi en mobilisant toutes les marges de manoeuvre disponibles pour favoriser la continuité des recrutements et les débuts de carrière. En ce qui concerne le CIR, le ministère a poursuivi les travaux d'évaluation de son impact notamment depuis le rapport de la Cour des comptes de juillet 2013. En juin 2014, il a publié un rapport de synthèse sur le développement et l'impact du CIR, qui est accessible sur son site. Ce rapport comporte de nouvelles statistiques et une analyse des dépenses de R&D des entreprises depuis le début des années 2000. Les résultats convergent avec ceux des études d'impact et permettent de conclure que le CIR a soutenu les dépenses de R&D des entreprises en France au cours des années récentes. La France a ainsi vu son intensité en R&D privée se redresser depuis 2008 malgré la poursuite de la désindustrialisation, qui exerce une pression à la baisse automatique de cet indicateur dans la mesure où les services sont moins intensifs en recherche que l'industrie.