14ème législature

Question N° 61983
de M. Alain Marty (Union pour un Mouvement Populaire - Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires étrangères
Ministère attributaire > Affaires étrangères

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > terrorisme

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 29/07/2014 page : 6296
Réponse publiée au JO le : 07/10/2014 page : 8394
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Alain Marty attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la croissance préoccupante du nombre de Français et résidents français, djihadistes en Syrie. À ce jour, et selon le ministère de l'intérieur, 800 Français sont actuellement concernés par ce phénomène, contre 500 à la mi-avril. Il est à noter que parmi eux, 300 sont effectivement au combat. Les cas très médiatisés d'enfants et de jeunes femmes partis faire la guerre sainte au Levant nous rappellent quotidiennement la persistance et l'aggravation de cette situation. M. le ministre de l'intérieur a présenté mercredi 9 juillet 2014 en conseil des ministres, un projet de loi «renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme». Parmi les idées forces, la création d'une interdiction administrative de sortie du territoire, et celle de la notion «d'entreprise individuelle terroriste», ainsi que la pénalisation de l'apologie du terrorisme et la mise en place d'un délit de piratage «en bande organisée». L'article 6 du projet de loi prévoit un blocage administratif des sites internet encourageant à perpétrer des actes terroristes ou en faisant l'apologie. Or ce sont les réseaux sociaux, et notamment Facebook et Skype, qui se trouvent être la principale plateforme de recrutement des djihadistes, et non des sites dédiés. Bien qu'il soit peu aisé de réguler l'activité sur ce type de réseaux, il lui demande quelles sont les mesures prévues par le Gouvernement pour lutter contre la puissance d'embrigadement du phénomène.

Texte de la réponse

La lutte contre la radicalisation violente est un enjeu majeur de la lutte antiterroriste actuelle. En tant que vecteur de cette radicalisation, les réseaux sociaux font dès lors l'objet d'une attention particulière par les acteurs impliqués dans la lutte contre le terrorisme, d'autant plus que les organisations terroristes font preuve d'une grande maîtrise quant à leur utilisation à des fins de propagande. Une grande partie des projets de départ pour la Syrie résulte en effet de processus d'auto-radicalisation nourris par la fréquentation de ces sites sur internet. Les groupes terroristes ont intégré la propagande à leur stratégie, comme l'ont montré les exécutions des deux otages américain et de notre compatriote Hervé Pierre Gourdel. La France, consciente de la dangerosité de la propagande terroriste, a soutenu la résolution 1624 (2005) du Conseil de sécurité des Nations unies incitant les Etats membres à lutter contre l'incitation à commettre des actes terroristes. Elle a parrainé la résolution 2170 du Conseil de sécurité adoptée le 15 août 2014 qui souligne l'utilisation d'internet par les terroristes pour leurs activités de recrutement et d'incitation à commettre des actes de terrorisme, et appelle à la prise de sanctions contre ces individus. Tout récemment, la France a pesé de tout son poids dans l'élaboration de la résolution 2178 du Conseil de sécurité adoptée le 24 septembre à l'unanimité et co-parrainée par plus de cent Etats. Cette nouvelle résolution permet d'aller plus loin dans l'engagement contre les combattants terroristes étrangers et la prévention de la radicalisation. Elle appelle notamment les Etats à coopérer davantage pour entraver l'utilisation par les terroristes des nouveaux moyens de communication pour leurs actions de propagande. La France se mobilisera au niveau international en vue de l'application rapide et entière des dispositions de cette résolution. Dans cette même logique, et sur un plan intérieur, la loi du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme renforce les sanctions contre « ceux qui se rendent coupables d'apologie ou de provocation au terrorisme sur internet ». En outre, le projet de loi adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 18 septembre permet à l'autorité administrative de demander aux fournisseurs d'accès à internet de bloquer l'accès aux sites provoquant aux actes de terrorisme ou en faisant l'apologie, à l'instar de ce que le législateur a déjà prévu pour les sites pédopornographiques. Ce blocage s'effectuera sous le contrôle d'une personnalité qualifiée, un magistrat de l'ordre judiciaire, et sera soumis à la juridiction administrative. Les fournisseurs d'accès seront également astreints à l'obligation de surveillance limitée déjà prévue par la loi pour les appels à la haine raciale, la glorification des crimes contre l'humanité ou la promotion de la pédopornographie. L'objectif est de perturber le fonctionnement des sites de propagande terroristes, mais également des forums où se nouent les contacts, et où s'échangent des conseils. La France, particulièrement soucieuse de l'équilibre à maintenir entre efficacité de la lutte antiterroriste et Etat de droit, apporte son soutien à des stratégies de lutte contre la radicalisation fondées sur l'implication de la société civile et le contre-discours à la propagande terroriste à l'image de la stratégie européenne de lutte contre la radicalisation et le recrutement adoptée en 2005 et révisée en juin 2014 par le Conseil de l'Union européenne pour s'adapter aux évolutions du phénomène.