14ème législature

Question N° 61
de M. Jean-Jacques Candelier (Gauche démocrate et républicaine - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > commerce et artisanat

Tête d'analyse > grande distribution

Analyse > marges. produits alimentaires.

Question publiée au JO le : 03/07/2012 page : 4238
Réponse publiée au JO le : 18/09/2012 page : 5140

Texte de la question

M. Jean-Jacques Candelier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la répartition de la valeur ajoutée entre producteurs, transformateurs, distributeurs. Il devient urgent de sortir d'un système d'accords circonstanciels, au gré des luttes sur le prix du lait, de la viande et des fruits et légumes. Mettre fin au pillage du revenu paysan nécessite une politique publique de prix agricoles, qui établisse de nouveaux rapports entre producteurs et industriels. Depuis 1986, les gouvernements successifs en France et dans l'UE n'ont eu de cesse de libéraliser les prix agricoles. Face à cet abandon à la concurrence libre et non faussée, une politique agricole consisterait à légiférer sur la répartition de la valeur ajoutée entre producteurs, transformateurs, distributeurs. Dès maintenant, le Gouvernement peut, par décret, fixer un coefficient multiplicateur encadrant les marges excessives de la grande distribution. Il lui demande de bien vouloir agir en ce sens.

Texte de la réponse

Les principes de la Politique agricole commune de l'Union européenne ne permettent pas à un État membre d'intervenir dans la formation des prix agricoles dans le cadre des Organisations communes de marché (OCM). Prévoir la fixation d'un prix en fonction des coûts de revient n'est donc pas possible du point de vue réglementaire. La répartition de la valeur ajoutée au sein des filières est déterminante dans l'élaboration et la conduite des politiques publiques. Conscient des difficultés rencontrées par les producteurs dans leurs relations commerciales avec l'aval, le Gouvernement entend favoriser un meilleur partage de la valeur ajoutée le long de la chaîne alimentaire. La relation commerciale au sein des filières agricoles peut être rééquilibrée par le développement de contrats écrits obligatoires entre les producteurs et les acheteurs, déjà institués pour le secteur des fruits et légumes et pour le secteur du lait de vache. La contractualisation constitue un cadre visant à sécuriser le prix, la durée et le volume de la production agricole en France, de façon à garantir aux producteurs un débouché ainsi qu'un revenu stable et décent et à leurs acheteurs un approvisionnement correspondant à leurs besoins. Il y a également lieu de renforcer le pouvoir des organisations interprofessionnelles en matière économique et, pour une meilleure coordination de l'offre, les organisations de producteurs. Les producteurs, en se regroupant, pourront peser de manière plus efficace dans les négociations avec leurs clients et rééquilibrer la relation commerciale. Les travaux de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, placé auprès du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de la consommation, permettent de faire apparaître la répartition de la valeur ajoutée entre les différents maillons au sein des filières alimentaires. Les résultats de ces travaux, qui sont rendus publics, permettent d'éclairer les pouvoirs publics, les acteurs économiques et les consommateurs afin qu'ils en tirent les conséquences les plus adaptées. Par ailleurs, afin de faire face à la volatilité du prix des matières premières entrant dans la composition de l'alimentation animale, un accord a été signé le 3 mai 2011 en présence du ministre chargé de l'agriculture, par des représentants des producteurs, des transformateurs et des distributeurs des filières porcine, bovine et de la volaille. Par cet accord volontaire, les signataires s'engagent à ouvrir des négociations sur les conditions de vente des produits issus de ces trois filières d'élevage en cas de variation excessive à la hausse et à la baisse des prix des aliments des bovins, porcs et volailles. Quinze organisations professionnelles de céréaliers et de producteurs de viande ont également signé, le 15 juin 2011, un accord pour lutter contre les fortes fluctuations des prix des matières premières agricoles qui affectent le marché mondial. Cet accord prévoit la mise en place de contrats-types entre collecteurs de grains et fabricants d'aliments d'une part, et entre fabricants d'aliments et éleveurs d'autre part, permettant un lissage des prix sur une durée donnée. Ce lissage doit permettre aux producteurs de viande d'anticiper leur prix de revient et donc de stabiliser leurs revenus. À travers l'accord signé le 17 mai 2010 par les principaux distributeurs, ces derniers s'engagent à limiter et à réduire leurs marges lors de la vente de fruits et légumes en situation de crise conjoncturelle. Ce dispositif a été rendu contraignant par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010. Les entreprises de distribution qui refuseront de l'appliquer seront taxées ou sanctionnées. Enfin, l'article L. 611-4-2 du code rural et de la pêche maritime introduit, en périodes de crise conjoncturelle, la possibilité d'instaurer un coefficient multiplicateur encadrant les marges des fruits et légumes périssables, par la limitation du rapport entre le prix d'achat et le prix de vente. Ce mécanisme ne garantit pas le relèvement mécanique des prix à la production, mais peut conduire à une meilleure répercussion de la baisse des prix à la production auprès du consommateur final et favoriser ainsi l'écoulement des marchandises. Ce dispositif implique néanmoins une mise en oeuvre complexe et exige une certaine prudence dans son application. Il s'agit d'éviter notamment la substitution des produits français par des produits importés, et par ailleurs, de fragiliser le dialogue interprofessionnel. Pour ces raisons, le Gouvernement n'envisage pas d'activer ce mécanisme en dehors des périodes de crise conjoncturelles prévues par la loi.