14ème législature

Question N° 62036
de M. Hervé Féron (Socialiste, républicain et citoyen - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires européennes
Ministère attributaire > Affaires européennes

Rubrique > politiques communautaires

Tête d'analyse > concurrence

Analyse > rapport d'information. bilan. perspectives.

Question publiée au JO le : 29/07/2014 page : 6299
Réponse publiée au JO le : 14/06/2016 page : 5303
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 04/11/2014
Date de renouvellement: 10/02/2015
Date de renouvellement: 19/05/2015
Date de renouvellement: 26/04/2016

Texte de la question

M. Hervé Féron attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes, sur la récente parution du rapport d'information d'Isabelle Bruneau relatif aux effets de la politique de concurrence de l'Union européenne sur les entreprises françaises. Le rapport de la députée de l'Indre, qui rappelle que la politique de la concurrence est un débat ancien « qui ne doit pas constituer un tabou », pointe les dérives de la politique de concurrence de la Commission européenne et par-delà de l'Union européenne. Ainsi on lit dans le rapport que l'échec de la fusion entre le groupe français Pechiney, le canadien Alcan et le suisse Algroup en 2000, qui devait donner naissance à un géant de l'aluminium, serait imputable à une politique européenne trop stricte : M. Mario Monti, le commissaire européen à la concurrence de l'époque, avait exigé que le groupe Alcan cède à un tiers les 50 % qu'il contrôlait aux côtés de Viag, l'un de ses concurrents, dans l'usine de laminage d'Alunorf, en Allemagne. Or le canadien et ses actionnaires ne voulaient à aucun prix se désengager d'Alunorf, dans laquelle ils avaient investi plus de 3 milliards de francs, comme nous l'apprenait le journal Libération. L'abandon de ce projet aurait causé la perte de 20 % de la production d'aluminium en France et de 23 % des emplois dans ce secteur stratégique. En parallèle, le rapport accuse la Commission européenne de ne pas toujours faire barrage aux pratiques de dumping social, fiscal ou environnemental qui entraînent une concurrence déloyale parfois bien plus douloureuse que les aides d'État. La députée prend ainsi l'exemple de la compagnie Ryanair, condamnée en 2013 par le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence pour avoir refusé de se soumettre à la législation française en matière de cotisations sociales, qui aurait toutefois reçu 800 millions d'euros de subventions diverses en 2012 (notamment de la part de collectivités territoriales, qui payent parfois pour la desserte de petites lignes régionales). Or ces subventions ne sont pas forcément notifiées à la Commission européenne ; en effet les 279 aéroports en France qui accueillent moins d'un million de passagers par an n'ont pas d'obligation de notifier à la Commission européenne les aides qu'ils accordent à certaines compagnies, dont Ryanair, ce qui pénalise fortement les autres compagnies aériennes. Mme Bruneau plaide donc pour une meilleure prise en considération des effets de la mondialisation dans l'application du droit de la concurrence en tenant compte des intérêts stratégiques nationaux et européens occultés par une conception à la fois large et trop restrictive des atteintes à la concurrence de la CJUE. Sachant que M. le ministre de l'économie et du redressement productif plaide lui-même pour une réforme du système des aides d'État, il souhaite connaître son avis sur le rapport de Mme Isabelle Bruneau.

Texte de la réponse

Le rapport de Madame Bruneau constitue une contribution importante à la réflexion autour de la politique de concurrence européenne. Cette dernière a d'ailleurs fait l'objet d'un exercice de modernisation, finalisé en 2014, afin notamment de rendre les règles relatives aux aides d'Etat plus cohérentes avec la réalité économique. Dans ce contexte, la Commission a adopté une révision du règlement général d'exemption par catégorie (RGEC) permettant aux États membres d'accorder un plus large éventail de mesures sans devoir les notifier au préalable à la Commission. L'extension du champ des aides exemptées de notification préalable permet désormais d'y inclure les aides à la culture, aux infrastructures pour le haut débit, les aides en cas de catastrophes naturelles ou encore les aides en faveur des pôles d'innovation. Le RGEC permet également un doublement des seuils de notification individuelle (au-delà desquels les aides doivent être notifiées) pour les aides en faveur de la recherche fondamentale (de 20 à 40 M€) et de la recherche industrielle (de 10 à 20 M€). La Commission estime que les trois quarts des mesures d'aides d'État actuelles et les deux tiers environ des montants d'aides sont désormais exemptés de notification. L'adoption de ce règlement a été saluée par la France. Elle constitue en effet une mesure contribuant à la clarification des règles et à l'amélioration de l'efficacité du contrôle des aides d'Etat en le concentrant sur les cas les plus importants. La France défend, d'une manière générale, la nécessité de faire de la politique des aides d'État un véritable instrument européen au service des investissements dans l'économie de la connaissance, dans les entreprises d'avenir et dans une politique industrielle réellement orientée vers la croissance durable. Elle défend la nécessité d'une bonne prise en compte à l'échelle européenne de la problématique de la concurrence équitable entre opérateurs économiques européens et extérieurs à l'Union afin de maintenir un fonctionnement équilibré du marché intérieur.