14ème législature

Question N° 62315
de M. Patrice Carvalho (Gauche démocrate et républicaine - Oise )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > agriculture

Tête d'analyse > fruits et légumes

Analyse > producteurs. revendications.

Question publiée au JO le : 05/08/2014 page : 6569
Réponse publiée au JO le : 16/12/2014 page : 10517
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Patrice Carvalho attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur la situation du marché des fruits et légumes. La consommation de ces produits est en baisse de 10 % par rapport à l'été 2013. Et les prix auxquels ils sont achetés aux producteurs diminuent également. Ainsi ces derniers vendent la tomate à seulement 70 centimes le kilo contre 1,10 euro l'an dernier. Le melon coûte 80 centimes contre 1,10 euro en 2013 payé aux maraîchers. La pêche nectarine est achetée 1,30 euro le kilo contre 1,50 euro, voici un an. À cela s'ajoute la concurrence déloyale de pays, tel que l'Espagne, qui pratique le prix après vente. Les produits quittent le sol espagnol pour être livrés sans prix affichés, ces derniers s'établissant sur le lieu de destination selon le marché, ce qui est illégal en France. Ainsi des pêches et nectarines, pour lesquelles les producteurs français estiment à 1,30 euro le point d'équilibre de vente, sont bradées à 1 euro, tandis que les produits espagnols sont sur le marché de gros entre 30 centimes et 57 centimes. La grande distribution porte une responsabilité essentielle dans cette situation, dans la mesure où elle exige des producteurs des prix de plus en plus bas et organise la concurrence déloyale et le dumping. Elle accroît ainsi ses marges car les consommateurs ne sont guère bénéficiaires de cette baisse des prix. En témoigne l'exemple de ces tomates cerises produites en Alsace et achetées autour de 2 euros le kilo aux agriculteurs. Elles sont revendues autour de 7 euros, voire 8 euros le kilo, dans les grandes surfaces de la région. Lorsqu'alors cette même grande distribution obtient des prix cassés sur les produits espagnols, ses marges s'envolent, sans souci de la qualité médiocre des produits vendus et de la mort ainsi organisée des producteurs français. Le Gouvernement semble envisager une aide financière pour les maraîchers qui enregistreraient des pertes importantes, durant cet été. Mais quand allons-nous nous attaquer à l'origine du mal : le monopole de la grande distribution sur la fixation des prix aux producteurs, la concurrence et le dumping à l'intérieur de l'Union européenne ? C'est à condition d'affronter ces obstacles majeurs que nous maintiendrons une production française de qualité, assurerons une juste rémunération des agriculteurs et des prix accessibles pour les consommateurs. Il souhaite connaître ses intentions sur ce sujet.

Texte de la réponse

La plupart des filières fruits et légumes ont connu une campagne d'été dans des conditions dégradées par l'abondance de l'offre et la superposition des calendriers de production de plusieurs pays producteurs européens. Au cours de l'été, dans la double perspective de quantifier et d'empêcher les pratiques de concurrence déloyale entre producteurs, les services de répression des fraudes ont été mobilisés et ont mené des contrôles sur l'ensemble du territoire, visant en particulier à s'assurer, quelle que soit l'origine des produits, que les prix de ceux-ci ne seraient pas fixés après vente. Ces difficultés de campagne ont par ailleurs été amplifiées par l'entrée en vigueur de l'embargo russe le 7 août 2014. Des mesures ont été adoptées au niveau communautaire afin d'organiser l'intervention des opérateurs sur les marchés. Un premier dispositif, ouvert du 18 août 2014 au 3 septembre 2014, a permis aux organisations de producteurs, ainsi qu'aux producteurs non affiliés à des organisations de producteurs, de distribuer gratuitement à des organismes caritatifs agréés, de retirer du marché et/ou de procéder à des dispositifs de récolte en vert ou de non-récolte de leurs productions, en bénéficiant d'un co-financement communautaire pour une liste de 14 fruits et légumes périssables. Ce dispositif est désormais fermé, car les demandes ont atteint le plafond budgétaire de 125 M€ d'euros fixé pour l'ensemble de ces mesures. Un second dispositif, fixant un plafond en tonnage de produits pouvant être retirés, par État membre exportateur vers la Russie, est applicable du 29 septembre jusqu'à fin décembre 2014. Les difficultés ayant été identifiées en amont de la campagne, des actions de promotion génériques s'appuyant sur FranceAgriMer et l'interprofession ont par ailleurs été mises en oeuvre. Il a également été acté lors de la réunion du 26 septembre 2014 avec les représentants de la filière que des mesures d'accompagnement des entreprises (prêts de trésorerie, fonds d'allègement des charges et prises en charge des cotisations sociales) seraient mises en oeuvre au cas par cas, après instruction des demandes par les services compétents, pour permettre aux entreprises agricoles concernées de passer ce cap difficile. Ces mesures sont mises en oeuvre sous l'égide des préfets en lien avec la mutualité sociale agricole, les établissements bancaires et l'ensemble des services de l'État concernés. Au-delà des dispositifs d'aide temporaires adoptés au niveau communautaire ou national pour certains produits périssables, l'ensemble des producteurs de fruits et légumes regroupés en organisations de producteurs peuvent procéder à des interventions sur les marchés à travers les programmes opérationnels. La filière fruits et légumes bénéficie également de mesures structurelles à plusieurs niveaux. Au niveau communautaire, le régime d'aide spécifique au secteur des fruits et légumes permet d'investir dans les entreprises agricoles et de concentrer l'offre par l'intermédiaire des organisations de producteurs, rééquilibrant ainsi le partage de la valeur ajoutée entre l'amont et l'aval dans la filière. En effet, les producteurs de fruits et légumes ont la possibilité de déroger au droit de la concurrence afin de commercialiser de manière solidaire leur production lorsqu'ils s'associent au sein d'organisations de producteurs. Ces organisations de producteurs sont soutenues par les fonds opérationnels qui leur sont dédiés. En outre, le dispositif national de la contractualisation, prévu par la loi de modernisation de l'agriculture de 2010, permet le rééquilibrage des négociations commerciales amont-aval. En ce qui concerne les relations commerciales, le Gouvernement s'est attaché à permettre des discussions apaisées entre les différents partenaires commerciaux, et a rappelé la nécessité d'appliquer les lois assurant la transparence des relations commerciales. L'engagement a été pris de parvenir d'ici fin 2015 à un accord collectif volontaire pour améliorer l'offre alimentaire en restauration collective et renforcer la durabilité de cette activité. Un accent particulier est mis sur l'approvisionnement en produits locaux. Le Gouvernement a ainsi diffusé en décembre 2014 le guide pratique « favoriser l'approvisionnement local et de qualité en restauration collective ». Par ailleurs, l'action du Gouvernement en matière d'allégement du coût du travail à travers le dispositif « travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi » et le dispositif de crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) sera poursuivie. En outre, le pacte de responsabilité et de solidarité contribuera dès 2015 à alléger les charges supportées par les entreprises. Ainsi, l'allègement supplémentaire de charges en 2015 dans le secteur des fruits et légumes s'élèvera à 70 M€ de plus par rapport à 2014. Il est lié au plein effet du CICE (taux à 6 %) et au pacte de responsabilité et de solidarité. Enfin, à l'initiative de l'interprofession des fruits et légumes frais, des assises des filières fruits et légumes se tiendront au printemps 2015 afin de mettre en perspective les difficultés rencontrées et les réponses à y apporter.