14ème législature

Question N° 62880
de M. Dominique Baert (Socialiste, républicain et citoyen - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > bioéthique

Tête d'analyse > procréation avec donneur

Analyse > réglementation.

Question publiée au JO le : 12/08/2014 page : 6801
Réponse publiée au JO le : 05/01/2016 page : 166
Date de changement d'attribution: 16/09/2014

Texte de la question

M. Dominique Baert alerte Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'évolution de la problématique juridique française de la GPA en raison de la récente décision de la Cour européenne des droits de l'Homme. En effet, la France a été condamnée le 25 juin 2014 par la CEDH pour son refus de reconnaître la filiation d'enfants nés aux États-unis grâce à des techniques permettant la Gestation pour Autrui (GPA). La Cour européenne des droits de l'Homme constate ainsi qu'un pays tiers (les États-unis) accepte de transcrire dans son droit des filiations d'enfants obtenus par "mère-porteuse", et souligne "que le droit à l'identité fait partie de la notion de vie privée et qu'il y a une relation directe entre la vie privée des enfants nés d'une GPA et la détermination juridique de leur filiation". Elle statue in fine au motif de "l'intérêt supérieur de l'enfant". La France peut-elle, doit-elle accepter que le droit d'un autre pays, fût-il ami, lui impose sa législation ? De fait, cette décision de justice place notre pays dans une situation complexe, et d'autres pays européens sont attentifs à l'attitude qu'adoptera la France. Car, notre droit national est clair : l'article 16-7 du code civil stipule que "toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle". S'agissant de l'intégration de la GPA dans notre législation, les déclarations du Président de la République ont été tout aussi explicites. Dès lors, il souhaite savoir si le Gouvernement envisage de faire appel de cette décision de la CEDH.

Texte de la réponse

Les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme condamnant la France ne remettent aucunement en cause le principe français de la prohibition de la gestation pour autrui, actuellement consacré aux articles 16-7 et 16-9 du code civil. Elles marquent la recherche d’un équilibre entre le principe d’ordre public de prohibition de telles conventions qui demeure, et auquel le Gouvernement français est particulièrement attaché, et la nécessaire protection qu’il convient de garantir à l’enfant au nom de son intérêt supérieur au sens de l’article 3 paragraphe 1, de la Convention de New York du 26 janvier 1990, relative aux droits de l’enfant, et du droit au respect de sa vie privée au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elles confirment la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et ainsi de leur garantir, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la filiation et la nationalité française constituent des aspects essentiels. Si le gouvernement doit donc s’assurer, dans le strict respect de ses engagements internationaux, de l’exécution par la France des arrêts de condamnation de la CEDH, il demeure néanmoins dans le même temps particulièrement soucieux de garantir le maintien du principe français de la prohibition d’ordre public, dont le caractère essentiel a été rappelé par diverses personnalités de la société civile. A cette fin, le Gouvernement a décidé de solliciter le concours d’experts chargés de préciser les options juridiques dont dispose la France afin de concilier le droit au respect de la vie privée des enfants issus de telles conventions, et l’interdiction absolue de la pratique de la gestation pour autrui. En l’attente de leurs conclusions, le gouvernement veille d’ores et déjà au respect de la politique pénale mise en place contre toutes les atteintes à l’ordre public, lesquelles visent à la fois la lutte contre toute forme de trafic d’enfants s’apparentant à l’exploitation d’autrui, et la poursuite des intermédiaires proposant des activités interdites en France.