14ème législature

Question N° 62945
de M. Guillaume Larrivé (Union pour un Mouvement Populaire - Yonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > étrangers

Tête d'analyse > regroupement familial

Analyse > arrêts de la cour européenne des droits de l'Homme.

Question publiée au JO le : 12/08/2014 page : 6821
Réponse publiée au JO le : 10/02/2015 page : 936
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 25/11/2014

Texte de la question

M. Guillaume Larrivé appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les arrêts que la Cour européenne des droits de l'Homme a rendus, le 10 juillet 2014, dans les affaires Mugenzi, Tanda-Muzinga et Senigo Longue contre France. Il le prie de préciser quelles conséquences il entend tirer de ces jugements.

Texte de la réponse

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), dans ses arrêts de chambre rendus en juillet dernier dans les affaires Mugenzi c/ France (requête n° 52701/09), Tanda-Muzinga c/ France (n° 2260/10) et Senigo Longue et autres c/ France (n° 19113/09) a conclu que n'ayant pas dûment tenu compte de la situation spécifique des requérants, la procédure de regroupement familial française n'a pas présenté les garanties de souplesse, de célérité et d'effectivité requises pour faire respecter leur droit au respect de leur vie familiale. Pour cette raison, la Cour a estimé que l'État n'a pas ménagé de juste équilibre entre l'intérêt des requérants d'une part, et son intérêt à contrôler l'immigration d'autre part, en violation de l'article 8. La procédure du regroupement familial est strictement encadrée par des dispositions législatives et réglementaires (livre quatrième du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile). Ses principes, issus de la Constitution et des conventions internationales, ne sont pas remis en cause par la CEDH. Dans le cadre de la procédure de regroupement familial, la vérification de la réalité des liens familiaux et de l'identité des personnes par les autorités consulaires constitue l'aspect le plus complexe. Son fondement juridique se trouve à l'article 47 du code civil, et sa légitimité est régulièrement rappelée par les décisions des tribunaux administratifs et du Conseil d'État. La CEDH ne remet pas en cause son principe, mais demande que soit trouvé un équilibre entre l'intérêt des requérants et l'intérêt de l'État à contrôler l'immigration. À cet effet, en vertu de l'article L. 111-6 du CESEDA et de l'article 311-1 du code civil, les agents de l'État opèrent un examen, le plus large possible, des documents présentés et prennent en compte les éléments de possession d'état dans les cas où les pièces d'état civil manquent ou sont défaillants, en raison de la situation particulière du requérant étranger. Le délai maximum au terme duquel l'administration doit statuer sur les demandes de visas pour lesquelles une vérification de l'état civil est nécessaire, est fixé à huit mois par l'article 22-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Au-delà, le silence de l'administration vaut décision de rejet. Ces délais impératifs ont été récemment rappelés à nos représentations diplomatiques et consulaires. Il convient, au demeurant, de préciser que plus de 80 % des demandes de réunification familiale des réfugiés sont honorés dans un délai inférieur à trois mois. Toutefois, si le livre IV du CESEDA fixe les règles régissant la procédure de regroupement familial de droit commun, ce code ne comporte pas de dispositions législatives prévoyant spécifiquement une procédure quant à la réunification familiale des bénéficiaires de la protection internationale. Pourtant, les difficultés et les besoins particuliers des familles de réfugiés ou de bénéficiaires de la protection subsidiaire justifient l'existence d'une procédure spécifiquement adaptée. C'est la raison pour laquelle le projet de loi relatif à la réforme de l'asile consacre le droit à la réunification familiale des personnes bénéficiant d'une protection internationale. Le bénéficiaire d'une telle protection pourra faire venir les membres de sa famille se trouvant dans le pays d'origine, sans que lui soient opposées les conditions de durée de séjour préalable, de logement et de ressources, normalement exigibles pour les autres étrangers sollicitant le regroupement familial. Ce principe se justifie par le souci, pour des raisons humanitaires et de protection, de permettre la reconstitution de la cellule familiale du réfugié le plus rapidement possible. L'article 19 du projet de loi simplifie par ailleurs les vérifications d'actes d'état civil concernant des membres de famille de réfugiés ou de bénéficiaires de la protection subsidiaire rentrant dans ce cadre. Il rappelle également la valeur juridique des documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L.721-3 du CESEDA. Enfin, le projet de loi relatif à la réforme de l'asile a ajouté les bénéficiaires de la protection subsidiaire à la liste des personnes pour lesquelles la motivation de refus de visa en vue du regroupement familial est obligatoire. L'information des requérants bénéficiaires d'une protection internationale sera ainsi améliorée par l'obligation de motivation explicite de tous les rejets de regroupements familiaux. Ces nouvelles dispositions inscrites au livre septième du CESEDA consacré au droit d'asile permettront aux personnes bénéficiaires d'une protection internationale et à leurs familles une meilleure prise en compte de leurs droits.