traitements
Question de :
M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Hervé Féron interroge Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le développement de la phagothérapie. Cette technique médicale vise à combattre et à traiter certaines maladies causées par des bactéries à l'aide de virus présents naturellement dans l'environnement, les bactériophages, en capacité d'infecter l'agent pathogène à l'origine de la pathologie et de causer sa destruction. Cette thérapie a été très largement utilisée avant l'arrivée de l'antibiothérapie qui a contribué à son déclin. Interdite en France, les bactériophages n'ayant pas le statut de médicament, elle demeure très employée dans certains pays de l'Est. Des essais cliniques basés sur des virus dont l'efficacité a été démontrée dans la lutte contre certaines bactéries seront menés à l'automne 2014 dans sept hôpitaux de France, de Belgique et de Suisse. Ce projet dénommé Phagoburn, visant à étudier l'utilité et l'innocuité de la phagothérapie pour les infections cutanées causées par Escherichia coli et Pseudomonas aeruginosa chez les patients brûlés, a été retenu par la Commission européenne dans le cadre du septième programme cadre de recherche et développement au mois de juin 2013 et bénéficie d'un financement de 3,8 millions d'euros. Cette étude clinique montre le regain d'intérêt pour cette technique qui pourrait venir en complément des traitements antibiotiques ou dans le cas des pathologies causées par des bactéries multirésistantes, lorsqu'aucun traitement ne parvient à stopper la progression de l'infection. Il lui demande ainsi les intentions du Gouvernement pour promouvoir la recherche dans ce domaine.
Réponse publiée le 16 juin 2015
Le contexte épidémiologique actuel préoccupant des situations de multi-résistance et de pénurie de nouveaux antibiotiques est aujourd'hui identifié au niveau international et européen comme une préoccupation majeure en termes de santé publique. Depuis plusieurs décennies, certaines infections bactériennes (pulmonaires, cutanées, digestives) seraient traitées par les bactériophages (phagothérapie) en Géorgie, en Pologne et en Russie. En Europe, les bactériophages n'ont pour l'instant pas de statut spécifique, même si la définition du médicament est susceptible de leur être appliquée (l'agence européenne des médicaments (EMEA) a estimé en 2004 que le bactériophage était un médicament). Des études sur des modèles animaux mimant des infections pulmonaires sont publiées, et l'utilisation possible des bactériophages en thérapeutique humaine a fait l'objet de revues de la littérature. Si, en raison de leurs indications, les phages paraissent relever du statut de médicament, la démonstration de leur sécurité d'emploi reste d'approche complexe : il s'agit en effet de traitements à visée essentiellement individuelle pour lesquels des garanties doivent être apportées sur les aspects de production, de finalité, de données précliniques toxicologiques, avant le développement d'essais cliniques. De plus, la préparation de cocktails stables de phages prêts à l'emploi est difficile, et de nombreux gènes des phages ont un rôle encore inconnu, avec des conséquences pour les patients difficiles à appréhender. L'expérience sur les phages acquise depuis plusieurs années dans certains pays (Europe de l'Est) ne peut à elle-seule constituer, sur ce principe d'ancienneté, un niveau d'efficacité et de sécurité suffisant répondant aux standards d'évaluation en vigueur. En France, des études sont effectivement en cours ou en voie d'initiation, en particulier sur l'intérêt des bactériophages contre les infections bactériennes résistantes aux antibiotiques, notamment pour les infections de la peau. Dans le cadre de ses missions, l'agence nationale de sécurité du médicament et de produits de santé (ANSM) a reçu des demandes d'industriels sur les bactériophages, visant notamment à discuter le statut du produit et le programme préclinique toxicologique à réaliser pour pouvoir conduire un essai clinique en France. L'approche de la phagothérapie ne peut pas par ailleurs être uniquement nationale ; elle doit s'inscrire dans des réflexions impliquant l'échelon communautaire. La ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a annoncé lors de la journée européenne de mobilisation du 14 novembre 2014 la création d'un groupe de travail spécifique qui étudiera toutes les innovations utiles pour la lutte contre le phénomène de l'antibiorésistance.
Auteur : M. Hervé Féron
Type de question : Question écrite
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Affaires sociales
Ministère répondant : Affaires sociales, santé et droits des femmes
Dates :
Question publiée le 12 août 2014
Réponse publiée le 16 juin 2015