14ème législature

Question N° 63246
de M. Denis Jacquat (Union pour un Mouvement Populaire - Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Famille, personnes âgées et autonomie
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > enfants

Tête d'analyse > protection

Analyse > rapport. propositions.

Question publiée au JO le : 26/08/2014 page : 7105
Réponse publiée au JO le : 08/09/2015 page : 6877
Date de changement d'attribution: 16/09/2014

Texte de la question

M. Denis Jacquat appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie, sur les propositions exprimées dans le rapport d'information intitulé « Protection de l'enfance : améliorer le dispositif dans l'intérêt de l'enfant ». Les rapporteurs recommandent de systématiser la désignation par le juge des enfants d'un administrateur ad hoc, indépendant des parents et du service gardien, afin de représenter l'enfant mineur dans la procédure d'assistance éducative. Il la remercie de bien vouloir lui faire connaître son avis à ce sujet.

Texte de la réponse

La garde des sceaux rappelle que l'article 388-2 du code civil prévoit, d'ores et déjà, que lorsque, dans une procédure, les intérêts d'un mineur apparaissent en opposition avec ceux de ses représentants légaux, le juge saisi de l'instance lui désigne un administrateur ad hoc chargé de le représenter. Cet article est pleinement applicable en assistance éducative, matière dans laquelle, par définition, les intérêts du mineur peuvent diverger de ceux de ses parents qui se montreraient défaillants dans l'exercice de leur autorité parentale. Toutefois, la disposition précitée exige plus qu'un simple constat de divergence d'intérêts. Elle implique, de la part du juge, une évaluation et la caractérisation d'un véritable antagonisme, exigence qu'il apparaît salutaire de maintenir en évitant toute systématisation dans un domaine relevant éminemment de l'appréciation concrète des circonstances de la cause. Il y a lieu de rappeler qu'en matière d'assistance éducative, le mineur, quel que soit son âge, peut saisir lui-même, directement, le juge des enfants afin que ce dernier mette en place des mesures éducatives le concernant. Les articles 1182 et 1189 du code de procédure civile imposent au juge d'entendre le mineur dès lors qu'une procédure est initiée et l'article 1187 du même code prévoit les conditions dans lesquelles le mineur capable de discernement peut consulter le dossier judiciaire. Par ailleurs, aux termes de l'article 1191 du code de procédure civile, le mineur dispose d'un droit personnel à former un recours contre une décision en assistance éducative avec laquelle il ne serait pas d'accord. Ainsi, pour un adolescent de dix-sept ans, capable d'exprimer ses propres arguments devant le juge, voire assisté, d'ores et déjà, par un avocat qu'il aura lui-même sollicité selon des droits qui lui sont signifiés, en vertu de l'article 1186 du code de procédure civile, aussi bien dans sa convocation en justice que, le cas échéant, à l'audience, en vertu de l'article 1186 du code de procédure civile, la désignation automatique d'un administrateur ad hoc parait inadaptée. Elle le serait tout autant pour un nouveau-né dont la parole ne pourra évidemment pas être recueillie et donc portée à l'audience. Dans ce dernier cas, l'administrateur ad hoc ne sera en mesure d'exprimer que son propre sentiment sur l'intérêt de l'enfant. Or, à supposer, que l'administrateur ad hoc se soit formé spécifiquement dans la défense des intérêts des mineurs, son analyse, qui restera théorique compte tenu de l'absence d'échange possible avec l'enfant, ne pourra qu'être moins approfondie et individualisée que celle des professionnels de la protection de l'Enfance. Ces derniers ont en effet établi des évaluations éducatives ou encore accompagné, de manière effective, la situation familiale. Le coeur de leur métier consiste, précisément, en la prise en compte de la parole et du vécu de l'enfant en danger dans son environnement parental. En conséquence, en l'état du droit en matière d'assistance éducative, il n'est pas envisagé d'alourdir, sans démonstration de véritable utilité, par la désignation systématique d'un administrateur ad hoc un régime qui a d'ores et déjà été pensé de façon à permettre la meilleure expression de l'enfant. En outre, il convient d'éviter de dénaturer le rôle du juge, qui n'a pas une fonction d'arbitre entre le droit des parents et celui de l'enfant, mais un rôle de protection prioritaire de l'intérêt supérieur de l'enfant.