14ème législature

Question N° 63675
de M. Jean-Luc Bleunven (Socialiste, républicain et citoyen - Finistère )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > gens du voyage

Tête d'analyse > contrôle

Analyse > titres de circulation. réglementation. réforme.

Question publiée au JO le : 09/09/2014 page : 7528
Réponse publiée au JO le : 09/06/2015 page : 4342

Texte de la question

M. Jean-Luc Bleunven attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la nécessité pour la France de réviser la législation spécifique appliquée à la communauté des gens du voyage. Par une décision inédite du 28 mars 2014, le comité des droits de l'Homme de l'ONU, a sanctionné la France en considérant que cette législation porte atteinte au principe de libre circulation des personnes et au principe de non-discrimination prévus par la convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales aux articles 12 et 26. En effet, le régime de contrôle d'identité, institué par la loi du 3 janvier 1969 qui impose aux gens du voyage de « viser » leur carnet de circulation tous les trois mois, va à l'encontre de ces deux principes fondamentaux. Le comité international des droits de l'ONU considère ainsi que l'État français ne démontre pas la nécessité d'une telle obligation sanctionnée pénalement en cas de non-respect. Aussi, il lui demande quelles sont les mesures de révision législative envisagées par le Gouvernement pour empêcher toute nouvelle violation du principe de libre circulation des personnes et du principe de non-discrimination.

Texte de la réponse

Les gens du voyage sont régis par la loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative à l'exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe. La loi de janvier 1969 prévoit que les personnes n'ayant ni domicile ni résidence fixes de plus de six mois dans un Etat membre de l'Union européenne doivent être munies soit d'un livret spécial de circulation, soit d'un livret de circulation. Le Conseil Constitutionnel, dans sa décision n° 2012-279 QPC du 5 octobre 2012, a déclaré contraire à la Constitution le carnet de circulation qui figurait à l'origine dans la loi du 3 janvier 1969, en tant qu'il constituait une différence de traitement entre les personnes concernées par la détention d'un titre de circulation liée à une condition de ressource et que cette différence de traitement n'était pas en rapport direct avec les fins civiles, sociales, administratives ou judiciaires poursuivies par la loi. Par ailleurs, il avait également censuré la disposition punissant d'une peine d'un an d'emprisonnement les personnes circulant sans carnet de circulation, ces dispositions portant une atteinte disproportionnée à l'exercice de la liberté d'aller et de venir, au regard du but poursuivi, ainsi que l'obligation de justifier de trois ans de rattachement ininterrompu dans la même commune pour être inscrites sur une liste électorale, parce qu'elle porte atteinte à l'exercice de leurs droits civiques par les citoyens. Toutefois, le Conseil constitutionnel avait également précisé dans cette décision, s'agissant des titres de circulation d'une manière générale, « qu'en imposant à toutes ces personnes d'être munies d'un titre de circulation le législateur a entendu permettre, à des fins civiles, sociales, administratives ou judiciaires, l'identification et la recherche de ceux qui ne peuvent être trouvés à un domicile ou à une résidence fixe d'une certaine durée, tout en assurant, aux mêmes fins, un moyen de communiquer avec ceux-ci ; que ces dispositions sont fondées sur une différence de situation entre les personnes, quelles que soient leurs nationalités et leurs origines, qui ont un domicile ou une résidence fixe de plus de six mois et celles qui en sont dépourvues ; qu'ainsi la distinction qu'elles opèrent repose sur des critères objectifs et rationnels en rapport direct avec le but que s'est assigné le législateur ; qu'elles n'instituent aucune discrimination fondée sur une origine ethnique ; que, par suite, en imposant aux personnes visées d'être porteur d'un titre de circulation, le législateur n'a pas méconnu le principe d'égalité ; que l'atteinte portée à la liberté d'aller et de venir qui en résulte est justifiée par la nécessité de protéger l'ordre public et proportionnée à cet objectif ». S'agissant plus particulièrement de l'abrogation de la loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 modifiée relative à l'exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe, le Gouvernement, attentif à garantir des droits effectifs aux gens du voyage mais aussi sensible au difficultés rencontrées par les élus, prête la plus grande attention aux réflexions des parlementaires sur ce sujet, notamment dans le cadre du futur examen de la proposition de loi n° 1610 relative au statut, à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, enregistrée à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2013. Il entend soutenir les évolutions législatives nécessaires pour renforcer l'effectivité des droits des gens du voyage mais aussi pour donner aux élus locaux des moyens de mettre fin aux occupations illégales en modernisant la procédure administrative de mise en demeure et d'évacuation forcée.