14ème législature

Question N° 63840
de M. Christian Franqueville (Socialiste, républicain et citoyen - Vosges )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > agroalimentaire

Tête d'analyse > viticulture

Analyse > marcs et lies. emploi. réglementation. dérogation.

Question publiée au JO le : 16/09/2014 page : 7574
Réponse publiée au JO le : 27/01/2015 page : 542
Date de renouvellement: 06/01/2015

Texte de la question

M. Christian Franqueville attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur les nouvelles règles relatives à la valorisation des résidus de la vinification. En effet, les producteurs doivent désormais procéder à l'élimination de la totalité des sous-produits en choisissant des voies techniques strictement définies : la distillation, la méthanisation, le compostage ou l'épandage. Il est vrai que ces nouvelles dispositions constituent un progrès évident pour les vignerons qui se trouvent loin de toute distillerie, tels ceux installés en Lorraine, et qui jusqu'à présent bénéficiaient de dérogations pour détruire ces sous-produits. Néanmoins, les formalités pour recourir à ces « prestations viniques » semblent lourdes puisqu'elles imposent notamment une pesée (avec des instruments réglementaires) et une analyse (par un laboratoire agréé) par maturité et par couleur des marcs afin de prouver qu'il n'y a pas eu de surpressurage. Ces contrôles représentent un coût important et une charge administrative difficile à absorber, notamment pour les petites exploitations. En effet, l'ensemble de la production lorraine (200 hectares, 9 000 hl) est équivalente à celle d'un village bordelais ou alsacien. Cette échelle d'adaptation rend quasiment impossible la mise en conformité des vignerons lorrains à moins de quatre semaines de la récolte 2014. D'autant plus qu'aucune alternative ne leur est offerte puisqu'aucune distillerie industrielle n'est installée sur le territoire lorrain et aucune collecte n'est possible. C'est pour cette raison qu'il était jusqu'alors permis, à titre dérogatoire, aux vignerons lorrains de composter ou d'épandre les marcs dans leurs parcelles. À présent qu'une nouvelle réglementation est venue changer la donne sur le traitement des marcs et des lies issus de la vinification, les vignerons lorrains souhaitent pouvoir bénéficier à nouveau d'une solution alternative adaptée à l'économie viticole régionale. C'est pourquoi il lui demande si le Gouvernement entend simplifier les formalités pour recourir à l'élimination des sous-produits par des moyens techniques (distillation, méthanisation, compostage ou épandage).

Texte de la réponse

La réforme de l'organisation commune de marché vitivinicole de 2008 a conduit à la suppression, au niveau européen, de l'obligation de livraison des sous-produits de la vinification à la distillation. La réglementation européenne [article 103 du règlement (CE) n° 1234/2007 du 22 octobre 2007 modifié] prévoit cependant que les États membres peuvent rendre obligatoire la distillation, pour toute ou partie des producteurs, ou tout ou partie des sous-produits. Cela constituait le cas général en France jusqu'à la campagne 2013/2014. Toutefois, dans certains cas, les producteurs bénéficiaient d'une dérogation à l'obligation de distillation assortie d'une procédure de retrait sous contrôle. Il était notamment possible d'éliminer les marcs et lies par épandage ou compostage conformément au plan d'épandage des exploitations. De manière concomitante, à la demande des professionnels viticoles, l'État a engagé une réflexion sur des méthodes alternatives d'élimination des résidus de vinification. Une expérimentation de grande ampleur a ainsi été menée de 2010 à 2013 par FranceAgriMer (FAM). Les résultats de cette expérimentation ont réaffirmé le rôle prépondérant joué par les distilleries viticoles auprès des producteurs dans la gestion de leurs sous-produits, le traitement des éventuels excédents de production et la fourniture en retour aux producteurs de composts organiques ou d'alcool de mutage. Elle a cependant aussi montré que d'autres voies d'élimination apparaissaient comme possibles et mobilisables, pouvant constituer une opportunité pour les producteurs. Enfin, elle a conduit à exclure certaines voies d'élimination peu respectueuses de l'environnement. Le dispositif en vigueur au niveau national (arrêté du 17 août 2011 modifié) a ainsi été réformé en 2014 afin de permettre à tout producteur français d'éliminer des résidus de la vinification par d'autres voies, conformément au souhait des professionnels. Deux textes réglementaires ont ainsi été publiés : - le décret n° 2014-903 du 18 août 2014 modifiant le code rural et de la pêche maritime afin de permettre l'élimination des résidus de vinification par compostage, méthanisation (marc et lies) ou épandage (marc uniquement). Il convient de préciser que l'élimination des lies par épandage n'a pas été retenue à ce stade comme voie d'élimination : en effet, l'expérimentation menée par FAM a démontré que l'épandage des lies est particulièrement nocif pour l'environnement ; - l'arrêté du 18 août 2014 définissant les modalités de déclaration et de contrôle des voies de valorisation des résidus. Cet arrêté prévoit notamment qu'un certain nombre d'opérations doivent être effectuées par les producteurs qui souhaiteraient valoriser leurs résidus de vinification autrement que par distillation. C'est le cas notamment de la pesée des sous-produits et de l'analyse de leur taux d'alcool. Ces mesures étaient et restent effectuées par les distilleries lorsqu'elles éliminent les marcs et lies. Ces textes ont fait l'objet d'une large concertation, tant avec les fédérations de distilleries qu'avec les représentants de la production viticole, notamment au sein du Conseil spécialisé pour les vins de FAM où tous les bassins de production viticole sont représentés. La pesée des résidus de la vinification ainsi que l'analyse du taux d'alcool découlent de l'application de la réglementation communautaire qui impose de contrôler le sur-pressurage des marcs. C'est en effet la mesure de la quantité d'alcool restante dans les marcs et les lies qui permet de déterminer si un sur-pressurage a été effectué. Par ailleurs, les obligations en termes de respect des règles environnementales, et plus particulièrement celles relatives au plan d'épandage, relèvent d'une réglementation communautaire qui existait déjà et s'appliquaient donc dans le cadre du régime dérogatoire prévu par l'arrêté du 17 août 2011. Par conséquent, le décret et l'arrêté du 18 août 2014 n'induisent pas un durcissement des contraintes liées au respect de la réglementation environnementale. Afin d'accompagner les opérateurs dans leurs démarches de valorisation des résidus de vinification, plusieurs fiches ont été élaborées et diffusées par FAM afin d'informer les exploitants sur leurs obligations, pour chacune des voies, au regard de la réglementation environnementale. Les services de l'État sont mobilisés pour accompagner les opérateurs dans cette transition. Par ailleurs, un groupe de travail sera mis en place pour examiner dans quelles conditions l'épandage des lies pourrait être envisagé, dans le respect de la réglementation environnementale.