14ème législature

Question N° 63892
de M. Jean-Frédéric Poisson (Union pour un Mouvement Populaire - Yvelines )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Rubrique > bourses d'études

Tête d'analyse > enseignement supérieur

Analyse > bourses au mérite. suppression.

Question publiée au JO le : 16/09/2014 page : 7602
Réponse publiée au JO le : 28/04/2015 page : 3241
Date de changement d'attribution: 06/03/2015

Texte de la question

M. Jean-Frédéric Poisson appelle l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les conséquences de la suppression brutale de la bourse au mérite. Cette bourse au mérite est l'un des moyens inventés par la France pour favoriser l'accès de jeunes à l'autonomie. 1 800 euros par an pendant trois ans versés aux titulaires d'une mention très bien au baccalauréat ou excellence en licence sont évidemment d'une aide précieuse pour les jeunes. La suppression annoncée de cette aide est injustifiable si, comme disait le précédent ministre de l'éducation nationale, la raison est budgétaire : 14,4 millions d'euros annuels, qui représentent 0,0002 % des 85 milliards d'euros dépensés par l'État pour la tranche d'âge 16-25 ans en France, ne constituent pas un danger pour les comptes publics. Elle est ensuite inadaptée, parce que la suppression pure et simple de cette aide montre un acharnement à l'égard de tous ceux qui travaillent et ont de bons résultats. Les jeunes, en particulier ceux qui sont particulièrement méritants, deviennent une variable d'ajustement des politiques budgétaires. C'est pédagogiquement désastreux et éthiquement inacceptable. Pour justifier la suppression de cette aide, le Gouvernement évoque la réticence des universités à distinguer les meilleurs. Pourtant, c'est un fait, certains étudiants réussissent mieux que d'autres. Le fait de le nier ne permettra pas à ceux qui réussissent moins bien d'avoir de meilleurs résultats et ne fera que décourager ceux qui excellent. Pourtant, notre croissance, notre économie, notre réputation aussi dépendent de cette excellence de certains. L'autre argument avancé par le Gouvernement est que les bourses au mérite ne favorisent pas le taux de réussite au premier cycle : mais l'objectif de cette bourse est avant tout de reconnaître le mérite de ceux qui sont issus de milieu modeste et qui excellent, et de leur permettre de se consacrer pleinement à leurs études. L'objectif gouvernemental affiché d'un gommage de prétendues inégalités au sein d'élèves boursiers va, en réalité, replonger des étudiants issus de milieux modestes en position d'inégalité par rapport à ceux de milieux plus aisés, car ceux-ci seront dans l'obligation de travailler pour obtenir des ressources complémentaires. Il l'interroge quant aux possibilités d'un ajournement de cette décision budgétaire qui pénalise des milliers d'étudiants et envoie un signal profondément négatif à la jeunesse de France.

Texte de la réponse

La réforme des bourses étudiantes initiée en 2013 et poursuivie en 2014 par le Gouvernement a pour objectif d'améliorer la situation sociale des étudiants, car la qualité des conditions de vie joue un rôle déterminant la réussite dans le parcours d'études. Elle poursuit deux objectifs : aider davantage d'étudiants issus des familles de classes moyennes et des familles aux revenus modestes, et mieux prendre en compte la situation personnelle des étudiants autonomes de leurs parents. Ainsi, cette réforme a permis de créer un nouvel « échelon 7 » de bourse, permettant la revalorisation de 15 % des bourses des 30 000 étudiants issus des familles aux revenus les plus faibles, soit 800 euros annuels supplémentaires. Elle a également permis de créer 132 500 nouvelles bourses annuelles « échelon 0 bis » d'un montant de 1 000 euros pour les étudiants des classes moyennes aux revenus modestes, boursier « échelon 0 » ne bénéficiant d'aucune aide jusqu'à présent. Elle a enfin permis la création de 2 000 allocations annuelles nouvelles d'un montant compris entre 4 000 euros et 5 500 euros pour des étudiants en situation d'autonomie avérée, soit 8 000 aides versées indépendamment des revenus des parents. De plus, l'ensemble des bourses ont été revalorisées au-delà de l'inflation à la rentrée 2014, afin d'améliorer le pouvoir d'achat de tous les étudiants boursiers. Cette réforme sociale ambitieuse vise à démocratiser l'accès aux études supérieures et à améliorer la réussite des étudiants. Ces mesures ont porté l'effort budgétaire en faveur des bourses étudiantes à près 458 millions d'euros depuis 2012. Le redéploiement des 40 millions d'euros annuels qui étaient affectés au financement du complément de bourse au mérite dit « aide au mérite » permettait d'assurer une partie du financement de cette réforme bénéfique à l'ensemble des étudiants boursiers. Cette décision était par ailleurs motivée par 3 constats. Tout d'abord, les aides au mérite, qui ne bénéficiaient qu'à 5 % des boursiers, ont un impact moindre sur le cursus d'étudiants déjà excellents que celui des bourses sur critères sociaux sur la réussite des étudiants des classes moyennes et modestes. Par ailleurs, la limitation de l'aide au mérite aux seuls étudiants bénéficiant de bourses sur critères sociaux suscitait l'incompréhension des familles et des autres bacheliers ayant obtenu la mention « très bien » au baccalauréat. Enfin, le repérage du « mérite » pour les étudiants de licence qui en bénéficiaient en master était inégalitaire car il dépendait des modalités d'évaluation de chaque université. Prenant acte de la décision du juge des référés du Conseil d'Etat de suspendre les dispositions de la circulaire du 2 juillet 2014 prévoyant ce redéploiement des aides au mérite, le ministère en charge de l'enseignement supérieur et de la recherche a rétabli l'aide au mérite en 2014-2015 dans les mêmes conditions que l'an passé. Tous les bénéficiaires l'ont donc reçue à ce jour. Comme il s'y était engagé, le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a engagé la réforme du dispositif d'aides au mérite applicable à la rentrée prochaine en prenant en compte des critiques du dispositif précédent. La circulaire du 20 février 2015 prévoit donc qu'à compter de la rentrée 2015, le complément de bourse au mérite sera versé aux étudiants ayant obtenu une mention « très bien » au baccalauréat et bénéficiant d'une bourse sur critère sociaux pendant une durée de trois ans. Son montant, fixé par arrêté, sera ramené à 900 euros annuels. Le dispositif d'aide au mérite en master pour les 2,5 % des meilleurs étudiants de licence, complexe à mettre en oeuvre et inégalitaire, est supprimé. Le nouveau dispositif permet de concilier le maintien d'une aide spécifique pour les bacheliers méritants issus de milieux modestes et la priorité donnée à l'élargissement des bénéficiaires des bourses sur critères sociaux. De plus, il permet de faire reposer l'évaluation du « mérite » sur un critère stable, la mention « très bien » au baccalauréat, incontestable et évalué nationalement. Enfin, il ne fait aucun perdant car il ne s'appliquera qu'aux nouveaux étudiants à la rentrée 2015 : les bénéficiaires de l'aide au mérite en 2014-2015 continueront de la percevoir dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui jusqu'à la fin de leur cycle d'études.