14ème législature

Question N° 64007
de M. Erwann Binet (Socialiste, républicain et citoyen - Isère )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > état civil

Tête d'analyse > naissance

Analyse > actes. établissement. étranger. régularisation.

Question publiée au JO le : 16/09/2014 page : 7618
Réponse publiée au JO le : 05/01/2016 page : 168
Date de renouvellement: 21/04/2015

Texte de la question

M. Erwann Binet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la transcription à l'état civil français des actes de naissances légalement établis à l'étranger. En effet, un enfant né à l'étranger d'un parent français est français en application de l'article 18 du code civil qui dispose : « Est français l'enfant dont l'un des parents au moins est français ». D'autre part, l'article 47 du code civil pose le principe selon lequel tout acte de l'état civil des français et des étrangers établi à l'étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf à établir que l'acte est irrégulier, falsifié, ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. En application de cet article, tout enfant né à l'étranger d'un parent français, dès lors qu'il dispose d'un acte d'état civil étranger « probant» au sens de l'article 47 du code civil qui rapporte la preuve d'un lien de filiation établi est susceptible de se voir délivrer un certificat de nationalité française. Hors, les enfants nés à la suite d'une gestation pour autrui autorisée à l'étranger se voient refusés la retranscription de leur état civil en France et la délivrance de ce certificat de nationalité française. Elle a privilégié l'intérêt de l'enfant dans sa circulaire du 25 janvier 2013 en permettant de constater, au regard de ces deux articles, que des enfants sont français. La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a rendu deux arrêts le 26 juin 2014 qui condamnent et obligent la France à retranscrire à l'état civil français tout acte de naissance légalement établi à l'étranger entre des enfants nés d'une gestation pour autrui et le couple ayant eu recours à cette méthode car le refus de retranscription porte atteinte à l'identité des enfants et viole la convention européenne des droits de l'Homme. Il appelle donc son attention sur la mise en conformité de la France avec les arrêts de la CEDH et souhaite connaître les nouvelles instructions fournies aux autorités administratives compétentes.

Texte de la réponse

Le Gouvernement français est particulièrement vigilant à ce que la France puisse procéder, dans le strict respect de ses engagements internationaux, à l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme du 26 juin 2014. Ces décisions marquent la recherche d’un équilibre entre le principe d’ordre public de prohibition des conventions de gestation pour le compte d’autrui, consacré aux articles 16-7 et 16-9 du code civil, et auquel le gouvernement français est particulièrement attaché, et la nécessaire protection qu’il convient de garantir à l’enfant au nom de son intérêt supérieur au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la Convention de New York du 26 janvier 1990, relative aux droits de l’enfant, et de son droit au respect de sa vie privée au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elles confirment donc la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et ainsi de leur garantir, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la filiation et la nationalité française constituent un aspect essentiel. A cet égard, les évolutions récentes de la jurisprudence interne s’inscrivent dans le souci de cet équilibre. C’est ainsi que l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation a rendu le 3 juillet 2015 deux arrêts relatifs à la transcription des actes étrangers de ces enfants sur les registres de l’état civil français. Statuant au visa de l’article 47 du Code civil et de l’article 7 du décret no 62-921 du 3 août 1962, la Cour de cassation a ainsi estimé que l’existence d’un faisceau de preuves de nature à caractériser l’existence d’un processus frauduleux, comportant une convention de gestation pour le compte d’autrui, ne fait pas obstacle à la transcription de l’acte de naissance, dès lors qu’il n’a pas été constaté que l’acte était irrégulier, falsifié ou que les faits qui y étaient déclarés ne correspondaient pas à la réalité. Tirant les conséquences de cette nouvelle jurisprudence, la Chancellerie a diffusé une dépêche le 7 juillet 2015 invitant le parquet près le tribunal de grande instance de Nantes,  compétent, à procéder, sous réserve de leur conformité aux dispositions de l’article 47 du Code civil, à la transcription des actes de naissance de ces enfants. Des certificats de nationalité française peuvent par ailleurs d’ores et déjà être délivrés en application de la circulaire du 25 janvier 2013 (JUSC1301528C), dont la validité a été confirmée par le Conseil d’Etat dans une décision en date du 12 décembre 2014, aux enfants issus de convention de gestation pour le compte d’autrui, nés à l’étranger d’un Français,  dès lors qu’ils disposent d’un acte d’état civil étranger « probant » justifiant d’un lien de filiation avec ce parent français.