14ème législature

Question N° 64228
de Mme Geneviève Gaillard (Socialiste, républicain et citoyen - Deux-Sèvres )
Question écrite
Ministère interrogé > Enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Rubrique > recherche

Tête d'analyse > personnel

Analyse > Institut national de science appliquée. Lyon. risques professionnels. bilan.

Question publiée au JO le : 16/09/2014 page : 7606
Réponse publiée au JO le : 24/03/2015 page : 2266
Date de changement d'attribution: 06/03/2015

Texte de la question

Mme Geneviève Gaillard attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur les révélations publiées dans la presse du 15 juillet 2014 relatives à ce qui a été présenté comme une véritable « épidémie de cancers » qui frapperait le personnel scientifique de l'Institut national de science appliquée (INSA) de Lyon. Elle précise que ces informations, étayées par une note interne d'un laboratoire, ont déclenché toute une série d'articles dans la presse qui a amené la direction de l'INSA à ordonner à ses employés de ne pas parler aux journalistes, et à charger sa responsable de communication de produire les éléments de langage afin d'éteindre l'incendie. Elle souligne que cette affaire de cancers tombe mal pour l'INSA, empêtré dans des problèmes financiers si graves que les accusations de malversations volent entre ex-responsables. Cette rumeur concernant des cas de cancers a enflé depuis le printemps 2014. L'élue dubitative constate néanmoins que neuf personnes, de 27 à 55 ans, ont également été touchées depuis une dizaine d'années. Plus troublant encore, il semblerait même que les victimes aient toutes travaillé au sous-sol du bâtiment Blaise-Pascal de l'INSA. D'après certains témoignages dont elle a eu l'écho, la salubrité des locaux pourrait réellement être en cause. Ont été signalées, notamment, des remontées d'eau suspectes dans ce bâtiment construit en 1957. À ce jour, selon la direction, le lien de causalité entre une exposition professionnelle et cette épidémie mortelle ne serait pas avéré, mais elle observe que cette même direction a finalement interdit l'accès aux locaux du sous-sol incriminés... Afin de faire éclater la vérité, en appliquant le strict respect absolu de l'intégrité physique et des conditions de travail saines, auxquelles les chercheurs ont droit, comme tous, au travers de la réglementation du droit du travail, ou au contraire de faire taire ce qu'il conviendrait alors de ramener au rang d'une simple rumeur infondée, elle attend d'elle qu'elle lui indique quelles sont les investigations indépendantes qui pourraient être diligentées, et quelles sont les éventuelles mesures complémentaires qu'elle compte mettre en œuvre afin d'apporter toute la transparence utile au bon traitement de ce dossier.

Texte de la réponse

Le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche prend tout à fait au sérieux les craintes liées aux risques sanitaires survenus à l'INSA de Lyon et suit avec attention les conclusions des différents travaux d'enquête. Neuf cas de cancers ou de tumeurs ont été diagnostiqués entre 2001 et 2014 sur le personnel scientifique du laboratoire MATEIS (MATEriaux, Ingénierie et Science), unité mixte de recherche (université Claude Bernard de Lyon/CNRS) située sur le site de l'institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon (Villeurbanne). Dès 2011, la direction de l'INSA avait été saisie de la survenue de sept cas de cancer décelés sur des personnels du laboratoire MATEIS ayant travaillé au centre lyonnais de microscopie (CLyM) hébergé par ce laboratoire. Comme un éventuel lien entre ces différents types de cancers n'avait pas pu être établi, aucune investigation complémentaire n'avait été effectuée. Cependant, le dernier cas de cancer, qui concernait un chercheur dont l'épouse, également chercheuse à l'INSA, était morte d'un cancer quelque temps auparavant, a incité le directeur du laboratoire à alerter la direction de l'INSA et la délégation régionale CNRS Rhône-Alpes/Auvergne (courrier du 11 juin 2014). Cette information a fait l'objet de nombreux articles et de reportages télévisés au cours du mois de juillet dernier. A titre conservatoire, l'INSA et le CNRS ont interdit temporairement au personnel de fréquenter cette installation et fait procéder à des études techniques et médicales. Au plan technique, une étude sur des fuites potentielles de rayonnements ionisants qui pourraient être incriminées dans les cancers diagnostiqués parmi les personnels a été diligentée. Les résultats de cette étude, menée sous l'égide de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), ont montré que les microscopes électroniques n'émettaient pas de tels rayonnements ionisants. De même, les mesures d'empoussièrement et de caractérisation de fibres dans l'ensemble du bâtiment n'ont révélé aucune présence de fibres dans l'air, et les mesures radiologiques n'ont détecté aucune source radioactive. Parallèlement, au plan médical, une enquête approfondie sur ces cas de cancers a été confiée à la CIRE, cellule de l'institut de veille sanitaire (InVS) en région Rhône-Alpes. La mission de la CIRE est de coordonner les travaux menés par les membres de la médecine de prévention des organismes de tutelle (INSA et CNRS) et les conseillers de prévention. Les médecins examinent ces différents cas en insistant plus particulièrement sur la reconstitution des parcours professionnels et la traçabilité des expositions potentielles entre 2001 et 2014. Ils mettent en rapport les dates de diagnostic, l'âge et l'évolution de ces cancers avec les dates et durées d'exposition de chaque malade à l'environnement du laboratoire. Les risques personnels, comme ceux du tabagisme ou liés à l'histoire familiale, sont également pris en compte. Plus largement, l'ensemble des personnels INSA et CNRS de l'unité, ainsi que des agents qui ont pu entrer temporairement en contact avec les équipements considérés (doctorants, stagiaires, etc), sont inclus dans ces travaux d'enquête. Il s'agit d'une investigation longue et complexe, dont les premiers résultats ont été produits fin 2014. Il apparaît qu'ils ne permettent pas de conclure à l'existence éventuelle d'un lien entre le milieu et les conditions de travail des chercheurs et les pathologies observées. Ces investigations conduiront néanmoins à renforcer les recommandations en matière de sécurité au travail et à améliorer le suivi des personnels par la médecine de prévention. A ce jour, sur la base de ces résultats, les utilisateurs de la plateforme CLyM ont été à nouveau autorisés à accéder aux microscopes et autres équipements du laboratoire. Tout au long de cette procédure, les instances compétentes des deux établissements, et notamment les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), ont été en permanence consultées et associées à la définition des mesures adoptées ; l'ensemble des résultats des investigations, hors secret médical, est consultable par toute personne intéressée au dossier qui en fera la demande auprès des services de prévention ou de médecine de prévention du CNRS ou de l'INSA de Lyon. Enfin, l'inspection santé et sécurité au travail (ISST) pour l'enseignement supérieur et la recherche, rattachée à l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR), a suivi l'ensemble du processus et en a régulièrement informé les services ministériels.