tauromachie
Question de :
M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les courses de taureaux qui ont cours dans onze départements du sud de la France. Autorisées sur une partie du territoire français, ces pratiques sont considérées par le code pénal (article 521-1) comme relevant de sévices graves et d'actes de cruauté envers les animaux punis de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Depuis l'adjonction d'un alinéa en 1951 à cet article 521-1, un petit groupe de communes françaises sont toutefois autorisées à recourir à de telles pratiques. Il est désormais inscrit dans le Code Pénal que « les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ». La notion de « tradition » est laissée à l'appréciation du juge et la corrida est considérée comme « locale » pour tout département ayant une commune dite « taurine ». Il faut de plus noter qu'une tradition « ininterrompue » de la corrida aurait nécessairement été maintenue en toute illégalité pendant un siècle puisque la corrida, arrivée en France il y a 160 ans, a aussitôt été interdite par la loi dite « Grammont » du 2 juillet 1850 condamnant les sévices aux animaux. Le CSA a recensé en 2012 que 57 % des Français étaient favorables à l'interdiction des corridas. En outre, les habitants de départements éminemment taurins ne sont pas toujours favorables à cette pratique : en 2010 un sondage commandé par l'Alliance anti-corrida du Gard montrait que 66 % des sondés désapprouvaient la corrida. Pourtant, depuis le 22 avril 2011 la tauromachie est inscrite sur la liste du patrimoine culturel immatériel français. Il est légitime de questionner la qualité esthétique du spectacle tauromachique qui consiste à mettre à mort le plus souvent des veaux âgés de trois ans, ayant subi avant le combat des actes de violences physiques et l'injection de médicaments visant à les affaiblir. Enfin, ces spectacles dénoncés par une partie de l'opinion publique sont le plus souvent sujets à des manifestations anti-taurines avec des risques de dérapages violents lors des confrontations avec les aficionados. Or c'est la commune qui finance les moyens de sécurité face aux troubles à l'ordre public lorsque le coût représenté est jugé disproportionné par rapport à l'évènement contre lequel les protestataires se sont rassemblés. D'après le ministère de l'économie et des finances, 73 % des villes taurines seraient endettées à un niveau supérieur à la moyenne, à l'image de Bayonne, dont les corridas auraient creusé le déficit de 415 000 euros en 2011. Il l'alerte donc sur les incohérences juridiques, économiques et culturelles de la corrida et sur la nécessité de promulguer son interdiction sur la totalité du territoire français.
Réponse publiée le 12 mai 2015
Dans sa décision n° 2012-271 du 21 septembre 2012, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution l'article 521-1 du Code pénal incriminant les sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux, estimant que l'exception relative aux courses de taureaux ne portait atteinte à aucun droit constitutionnellement garanti. Le Conseil a précisé que l'exclusion de responsabilité pénale prévue par cet article n'était applicable que dans les parties du territoire national où l'existence d'une telle tradition ininterrompue, notion jugée suffisamment précise pour garantir contre le risque d'arbitraire, était établie, et pour les seuls actes qui relevaient de cette tradition. Le Conseil constitutionnel a enfin rappelé qu'il appartenait aux juridictions compétentes d'apprécier les situations de fait répondant à cette notion de tradition locale ininterrompue. S'agissant de l'organisation des manifestations anti-corridas, les articles L 211-1 à L 211-4 du Code de la sécurité intérieure exigent leur déclaration préalable aux autorités compétentes. Si celles-ci considèrent que les circonstances font craindre des troubles graves à l'ordre public, il leur appartient de décider le cas échéant d'interdire ce type de manifestations.
Auteur : M. Hervé Féron
Type de question : Question écrite
Rubrique : Arts et spectacles
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 7 octobre 2014
Réponse publiée le 12 mai 2015