14ème législature

Question N° 65517
de M. Bertrand Pancher (Union des démocrates et indépendants - Meuse )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > cours d'eau, étangs et lacs

Tête d'analyse > bâtiments

Analyse > barrages hydroélectriques. Manche. projet d'arasement. pertinence.

Question publiée au JO le : 07/10/2014 page : 8344
Réponse publiée au JO le : 25/11/2014 page : 9839

Texte de la question

M. Bertrand Pancher attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur le projet d'arasement des deux barrages de Vézins et de La-Roche-qui-Boit situés dans la vallée de la Sélune. En application de la directive cadre sur l'eau de 2000, il est prévu un démantèlement de ces deux ouvrages. L'État invoque une double motivation : au regard des enjeux de biodiversité, ainsi qu'au regard des obligations de bon état issues de la directive cadre. Or ces deux barrages hydroélectriques produisent annuellement l'équivalent en électricité de quoi alimenter une agglomération comme Avranches. Outre leur production électrique, ils retiennent 28 millions de m3 d'eau, polluée à la fois par les ruissellements agricoles et les métaux lourds provenant d'une ancienne usine. Une pollution de l'eau de la baie viendrait endommager l'économie conchylicole, avec un effet dévastateur pour l'emploi local. De plus, ces deux barrages protègent des crues les deux villes de Ducey et Poilley. Une économie touristique s'est en outre développée autour des barrages, avec une base nautique. Enfin, situés à proximité du mont Saint-Michel qui vient de subir de nombreux travaux de dessablement, quelles seront les conséquences sur la baie en cas d'arasement des deux barrages ? La population locale soutient massivement l'exploitation de ces deux barrages, qui permet une production électrique à partir d'énergie renouvelable et, d'autre part, crée de l'emploi. L'enquête publique est en cours ; aussi compte tenu de ces éléments, il souhaite connaître ses intentions sur ce sujet sensible dans la Manche.

Texte de la réponse

Les barrages de Vézins et de la Roche-qui-Boit représentent des verrous infranchissables pour les poissons migrateurs sur la Sélune (saumon atlantique, alose, lamproie, truite de mer et anguille), alors même que ce cours d'eau présente des caractéristiques très favorables pour ces espèces (notamment en termes de sites de reproduction potentiels pour le saumon). La production hydroélectrique y est en revanche relativement modérée (0,04 % de la production totale française). Or, l'aménagement d'un dispositif de franchissement des ouvrages par les poissons migrateurs sur ces ouvrages ne permettrait pas de garantir la libre circulation de ces espèces, et plus particulièrement l'accès du saumon à ses zones de frai. Les poissons se perdraient en effet dans la retenue d'une taille trop importante pour qu'ils en trouvent la sortie, tant à la montaison qu'à la dévalaison. Par ailleurs, ces barrages empêchent le cours d'eau de jouer son rôle auto-épurateur en provoquant l'accumulation de sédiments et de substances polluantes en amont. Leur gestion devient dès lors problématique lors des vidanges qui seraient nécessaires pour des raisons de sécurité publique si le barrage était maintenu. La décision de démantèlement des ouvrages et de réhabilitation de la vallée prise en 2009, par le Gouvernement en place à cette date, apparaît donc pleinement justifiée et souhaite mener à terme ce projet d'une manière exemplaire aussi bien sur le plan technique et environnemental qu'en matière d'accompagnement de l'ensemble des acteurs locaux. L'impact de ces ouvrages sur la protection des crues est par ailleurs quasi-inexistant. Ils sont généralement pleins lorsque les crues surviennent et ne peuvent ainsi pas les écrêter. La maîtrise et la gestion des sédiments qui se sont accumulés dans les retenues sont identifiées comme un des principaux enjeux de la réussite de ce projet. La plus grande vigilance est accordée à la définition de la méthode à utiliser pour réaliser l'ultime vidange des deux barrages. Elle permettra de maîtriser le risque de pollution à l'aval de la retenue et dans la baie du Mont Saint-Michel. Ce point a été pris en compte dans l'étude d'impact réalisée sur ce projet. Les mesures nécessaires doivent en effet bien entendu être mises en oeuvre pour limiter l'impact de cette dernière vidange sur les milieux aquatiques (et notamment sur la qualité de l'eau). L'objectif principal est de maîtriser le départ des sédiments et de ne pas reproduire la situation observée en 1993 lors d'une vidange décennale de l'ouvrage. Une gestion de ces sédiments est donc prévue afin de les stabiliser et d'éviter leur entraînement vers l'aval. Les modalités précises de l'opération sont détaillées dans le dossier soumis à l'enquête publique. Enfin, l'impact sur l'économie touristique de ces barrages a été étudié. Un nouveau modèle de développement pourra émerger autour des cours d'eau renaturés. L'État s'est engagé à participer à hauteur de 5 millions d'euros au programme de reconversion de la vallée. Une convention tripartite a été signée en ce sens en juin 2013 entre l'État, le syndicat mixte du pays de la baie du Mont Saint-Michel et le syndicat mixte du bassin de la Sélune.