14ème législature

Question N° 67589
de M. Marc Le Fur (Union pour un Mouvement Populaire - Côtes-d'Armor )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > pharmacie et médicaments

Tête d'analyse > médicaments

Analyse > sativex. autorisation de mise sur le marché. pertinence.

Question publiée au JO le : 28/10/2014 page : 8845
Réponse publiée au JO le : 22/12/2015 page : 10429
Date de renouvellement: 24/03/2015

Texte de la question

M. Marc Le Fur attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la commercialisation d'un médicament à base de cannabinoïde d'ici 2015. En 1953, l'État français décidait d'interdire l'utilisation du cannabis dans les produits pharmaceutiques. L'Agence nationale de sécurité du médicament a reçu une demande d'autorisation de mise sur le marché du "savitex", médicament à base du stupéfiant qu'est le cannabis. Le Gouvernement a clairement affiché sa volonté d'ouvrir la voie de l'assistance thérapeutique par le cannabis. Or le cannabis est classé parmi les substances considérées comme illégales, réprimées par notre droit pénal. Outre ses effets dévastateurs sur la santé de ses utilisateurs, cette drogue est la base d'un trafic mondial qui endigue les quartiers défavorisés dans nos villes. Qui obtiendra l'autorisation d'exploiter de telles plantes ? Qui assurera la sécurité de cette exploitation ? Qui supportera le coût d'une telle charge sociale, dans un contexte de restriction des remboursements médicaux ? Comment expliquer à un délinquant, condamné par une juridiction pour usage de cannabis, qu'un autre citoyen pourra utiliser librement cette même substance ? Il lui demande si le Gouvernement entend donner une suite à ces interrogations.

Texte de la réponse

La réglementation nationale en vigueur en matière d’usage de cannabis, notamment l’article R. 5132-86 du code de la santé publique, proscrit la production, la fabrication, le transport, l’importation, l’exportation, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition ou l’emploi du cannabis, des produits qui en contiennent ou de ceux qui sont obtenus à partir de la plante ou de sa résine. Toutefois, cette réglementation n’interdit pas la réalisation de ces mêmes opérations lorsqu’elles portent sur des spécialités pharmaceutiques contenant du cannabis et faisant l’objet d’une autorisation de mise sur le marché (AMM). En effet, si l’usage médical du cannabis et de ses dérivés est nouvellement autorisé, celui-ci ne modifie en rien la réglementation et la politique générale en matière de drogue. A ce titre, il doit être précisé qu’aux termes des dispositions de l’article L.5111-2 du code de la santé publique, on entend par spécialité pharmaceutique tout médicament préparé à l’avance, présenté sous un conditionnement particulier et caractérisé par une dénomination spéciale. En outre, les médicaments ne peuvent être fabriqués et distribués que par des établissements pharmaceutiques autorisés par l’agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), puis dispensés par des pharmacies d’officine. Ils suivent donc le circuit légal de distribution, régulièrement contrôlé par les autorités sanitaires ; ce circuit est d’autant plus sécurisé qu’il s’agit de stupéfiants. Aussi, résulte-t-il de ce qui précède, que seules les spécialités pharmaceutiques contenant du cannabis et ayant fait l’objet d’une AMM peuvent être commercialisées en France, dans le strict cadre de leur AMM. En ce sens, le médicament Sativex, obtenu à partir d’extraits de deux variétés de cannabis sativa L., et contenant essentiellement du delta-9 tétrahydrocannabinol, du cannabidiol et d’autres cannabinoïdes, a été autorisé en France depuis le 8 janvier 2014 par décision du directeur général de l’ANSM, à l’issue de la procédure européenne d’AMM de reconnaissance mutuelle par les Etats membres de l’Union. Sur ce point, il y a lieu de souligner qu’il ne s’agit pas du premier stupéfiant utilisé à des fins thérapeutiques entrant dans la composition de médicament. S’agissant plus particulièrement de la spécialité Sativex, son utilisation fait l’objet d’une surveillance particulière. Elle est ainsi limitée au traitement des symptômes liés à une spasticité modérée à sévère due à une sclérose en plaques (SEP) chez des patients adultes n’ayant pas suffisamment répondu à d’autres traitements antispastiques et chez qui une amélioration cliniquement significative de ces symptômes a été démontrée pendant un traitement initial. De plus, cette spécialité, classée comme stupéfiant, fait l’objet de conditions de prescription et de délivrance très strictes qui imposent ainsi une prescription initiale hospitalière semestrielle, limitée à 4 semaines et réservée aux spécialistes et services de médecine physique et de réadaptation ainsi que de neurologie. En outre, dans le cadre du plan de gestion des risques (PGR) européen, un suivi des patients est réalisé à l’aide d’un registre. Les données cliniques du patient au moment de la première prescription puis tout au long du traitement sont ainsi renseignées par les prescripteurs tous les 6 mois pendant environ 2 ans. L’objectif de ce registre est d’évaluer à long terme la sécurité d’emploi du Sativex et notamment son potentiel d’addiction, d’abus et de mésusage, les effets psychiatriques à long terme, dont le suicide et les psychoses, la modification de l’humeur et les effets psychologiques telles que confusion/désorientation, les chutes, la détérioration de la mémoire,  l’effet sur l’aptitude à la conduite automobile, et l’utilisation concomitante de médicaments dans la sclérose en plaques. Enfin,  un suivi national de pharmacovigilance et d’addictovigilance coordonné par le centre régional de pharmacovigilance (CRPV) et centred’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance (CEIP) de Clermont-Ferrand a également été mis en place afin d’évaluer d’une part le profil de tolérance à partir de tous les cas graves et non graves recueillis, d’autre part les cas d’abus, de pharmacodépendance et d’usage détournée sur le territoire français.