14ème législature

Question N° 67639
de M. Hervé Féron (Socialiste, républicain et citoyen - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Culture et communication
Ministère attributaire > Culture et communication

Rubrique > propriété intellectuelle

Tête d'analyse > droits d'auteur

Analyse > piratage. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 28/10/2014 page : 8867
Réponse publiée au JO le : 24/03/2015 page : 2221
Date de renouvellement: 03/02/2015

Texte de la question

M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur les pratiques de piratage en France et dans l'Union européenne qui pèsent lourdement sur la croissance des industries créatives, ce qui se fait particulièrement au détriment des industrielles culturelles. Les industries créatives comportent les producteurs et les distributeurs de contenus ou de produits créatifs (films, vidéos, musique, livres et presse) mais aussi un certain nombre de domaines contribuant de manière importante à l'économie de la culture, tels que les imprimeurs ou les plateformes internet de distribution de contenu. Selon l'étude publiée le 16 octobre par TERA Consultants en partenariat avec le forum d'Avignon sur « La contribution économique des industries créatives à l'économie de l'UE », entre 2008 et 2011, le poids des industries créatives dans l'économie européenne a reculé ces dernières années. L'étude, qui s'appuie sur les statistiques européennes d'Eurostat, révèle que, malgré l'explosion des services de vidéo et de musique en ligne, les retombées en termes de croissance et d'emploi ne sont guère au rendez-vous. En 2011, l'ensemble des industries culturelles des 27 pays alors membres de l'Union européenne (la Croatie n'a rejoint l'UE qu'en 2013) a représenté 6,8 % du produit intérieur brut de l'UE, soit environ 860 milliards d'euros. Par rapport à 2008, le poids économique du secteur a connu une légère baisse de 0,28 %. Sur le front de l'emploi, la situation est beaucoup plus préoccupante. Le secteur employait en 2011 environ 14 millions de personnes, soit 6,5 % du total de la main-d'œuvre européenne. Par rapport à 2008, l'emploi dans ce secteur a reculé de 2,65 %. Selon l'étude de TERA Consultants, la raison principale de ces médiocres performances en termes d'emploi et d'activité économique tiendrait à l'absence de réglementations efficaces pour lutter contre le phénomène de piratage, au niveau français comme européen. Il y aurait ainsi une « corrélation entre la croissance des industries créatives et la législation relative à la protection de la propriété intellectuelle ». Dans sa première étude, le forum d'Avignon tirait déjà la sonnette d'alarme sur le risque posé par une absence de réglementation, estimant que celle-ci pourrait faire perdre entre 166 et 240 milliards d'euros à l'horizon 2015 aux industries créatives de l'Union européenne ainsi que des pertes d'emplois comprises entre 600 000 et 1,2 million. Dans les 5 principales économies de l'UE (Royaume-uni, France, Allemagne, Italie et Espagne), l'impact du piratage sur les industries créatives a été plus sévère encore que dans le reste de l'UE : la destruction de valeur s'élève à 20 milliards d'euros entre 2008 et 2011, tandis que les pertes d'emplois effectives atteignent le chiffre de 189 633. Face à l'échec de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), créée en 2009 par Nicolas Sarkozy et qui n'a pas su endiguer la montée du piratage dans notre pays, il souhaite l'alerter sur la nécessaire évolution de notre réglementation en matière de lutte contre ce phénomène. Il souhaiterait plus particulièrement connaître les mesures relatives au piratage qui pourraient voir le jour dans le futur projet de loi sur la création et le patrimoine, qui sera présenté au Parlement au premier semestre 2015.

Texte de la réponse

La ministre de la culture et de la communication souhaite réorienter la lutte contre la contrefaçon en direction des sites Internet de streaming, de téléchargement direct ou de référencement qui tirent des profits de la mise en ligne d'oeuvres sans rémunérer les créateurs en conséquence. Le rapport remis par Madame Mireille Imbert-Quaretta, « Outils opérationnels de lutte contre la contrefaçon commerciale en ligne », rendu public en avril 2014, a permis d'identifier une série d'outils opérationnels permettant d'impliquer les intermédiaires techniques et financiers dans la lutte contre la contrefaçon en ligne. Le rapport considère notamment que l'implication des acteurs de la publicité est de nature à favoriser la lutte contre la contrefaçon à grande échelle sur Internet. La publicité est en effet une importante source de revenus, parfois même la principale, pour les sites de référencement et les sites d'hébergement de contenus illicites. Les acteurs de la publicité sont déjà engagés dans la lutte contre diverses infractions commises sur Internet et ils ne souhaitent pas être associés à la contrefaçon de droits d'auteur et de droits voisins. Ils se sont déclarés prêts à s'engager dans une démarche spécifique de défense de ces droits pour des raisons tenant au souci de la qualité du service rendu, à la protection de leur image de marque et à la promotion d'un climat de confiance sur Internet. La ministre de la culture et de la communication vient de missionner Monsieur Julien Neutres, chargé de mission auprès de la présidente du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), pour l'élaboration d'une charte, écrite en concertation avec les acteurs de la publicité, afin qu'ils s'engagent dans une démarche volontaire d'éviction des sites ne respectant pas le droit d'auteur et les droits voisins. Cette charte constituera l'un des axes de la lutte contre le piratage, qui sera menée par la ministre de la culture et de la communication au cours de l'année 2015. Elle sera complétée par un travail de concertation avec les acteurs des moyens de paiement, afin qu'ils coopèrent activement dans un même mécanisme volontaire de charte. Ces deux mesures dites de « follow the money » constituent une des actions à mener contre les sites illicites, en lien avec une action efficace menée avec le ministère de la justice et le ministère de l'intérieur sur les actions judiciaires. Le ministère de la culture et de la communication s'attachera aussi à développer l'offre légale. À cet égard, le lancement de l'outil de référencement des films disponibles en ligne, réalisé le 28 janvier dernier, avec le concours du CNC, constitue un progrès sans précédent pour présenter et enrichir l'offre légale. Grâce à ce nouveau service en ligne, ce sont 10 000 oeuvres cinématographiques que les internautes vont pouvoir trouver sur des sites qui respectent le code de la propriété littéraire et artistique et les règles de régulation de la vidéo à la demande en France. Ce travail de référencement de l'offre légale permettra enfin aux acteurs de compléter l'offre en enrichissant les catalogues.