14ème législature

Question N° 67643
de M. Hervé Féron (Socialiste, républicain et citoyen - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Rubrique > recherche

Tête d'analyse > politique de la recherche

Analyse > budget. moyens.

Question publiée au JO le : 28/10/2014 page : 8886
Réponse publiée au JO le : 17/03/2015 page : 1988
Date de changement d'attribution: 06/03/2015
Date de renouvellement: 03/02/2015

Texte de la question

M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation de la recherche publique française. Depuis de nombreuses années, les chercheurs alertent les pouvoirs publics sur les difficultés croissantes qu'ils rencontrent pour mener à bien leurs missions, notamment en raison de l'insuffisance des effectifs. Confrontés à la baisse de leurs dotations, les organismes de recherche et les universités ont limité les recrutements avec des perspectives sombres pour les prochaines années alors même que les docteurs ont du mal à faire reconnaître leur niveau d'études dans le secteur privé. Ces restrictions ont conduit à une dégradation de l'emploi scientifique avec de nombreux chercheurs, notamment les plus jeunes, exerçant dans des conditions précaires. En effet, il est devenu fréquent d'enchaîner les contrats de courte durée, sans toutefois toujours parvenir à décrocher un poste stable. Si la loi Sauvadet du 13 mars 2012 qui visait à résorber la précarité dans la fonction publique a imposé un recrutement en CDI pour les personnes dont le CDD est renouvelé depuis six ans, cette mesure a cependant eu des effets pervers puisque les organismes de recherche et laboratoires préfèrent recruter de nouveaux chercheurs, au risque de gêner la poursuite des études menées par leurs prédécesseurs et de décourager les vocations au sein des jeunes générations. Par ailleurs, le passage au financement par appels à projets amène les chercheurs à consacrer davantage de temps à monter des dossiers complexes qu'à leurs recherches, alors même que la Cour des comptes a rappelé qu'entre 2005 et 2012, le taux de rejet des 49 000 projets proposés à l'Agence nationale de la recherche s'élevait à 78 %. Le 8 octobre 2014, l'Académie des sciences a « redit sa préoccupation face à une situation de la recherche qui continue à se dégrader », réitérant son cri d'alarme de décembre 2013. Il lui demande ainsi les intentions du Gouvernement afin que la recherche publique dispose des moyens nécessaires et à la hauteur de ses ambitions.

Texte de la réponse

Dans le cadre de la préservation du budget de la recherche souhaitée par le Président de la République, la priorité a été donnée à l'emploi scientifique. Depuis cinq années, l'emploi scientifique est en progression constante. C'est le cas pour l'emploi scientifique public global, où se concentrent 42 % des emplois consacrés à la recherche, et davantage encore dans le privé qui en accueille 58%. Toutefois, même si, trois ans après leur thèse, l'insertion professionnelle des jeunes chercheurs s'est améliorée, la situation actuelle reste insatisfaisante. Dans le secteur public, les difficultés s'expliquent par la réduction de moitié du nombre de départs annuels à la retraite pour les quatre prochaines années. Conjuguée aux effets de la loi Sauvadet, cette évolution a un impact défavorable sur les nouveaux recrutements. A effectifs constants, les possibilités d'embauche sont alors mécaniquement réduites. Afin de donner des perspectives d'avenir aux jeunes doctorants et jeunes chercheurs et continuer la résorption de la précarité (8 400 titularisations en 4 ans), le Gouvernement maintient un engagement fort pour la recherche et en particulier l'emploi scientifique. Cet engagement donne aux organismes les moyens budgétaires de remplacer systématiquement les départs en retraite au cours des années à venir. En outre, l'engagement de créer 1 000 emplois par an à l'université, contribue à la poursuite de l'augmentation des effectifs d'enseignants chercheurs. Par ailleurs, il convient d'encourager les jeunes chercheurs à se tourner vers les autres débouchés du secteur public et privé. Cinq ans après leur soutenance, ils sont seulement 25 % à exercer dans une entreprise. Il existe pourtant un véritable potentiel de progression. Dans ce cadre, le Gouvernement agit pour : - renforcer les conditions du crédit impôt recherche (CIR) en faveur de l'emploi des jeunes docteurs (doublement du CIR sur deux ans) ; - maintenir les contrats CIFRE [convention industrielle de formation par la recherche] (1 350 nouveaux contrats en 2012) pour favoriser l'emploi des docteurs dans le secteur privé ; - ouvrir des discussions avec les grands corps de la fonction publique et les organisations professionnelles pour favoriser le recrutement de docteurs. A cet égard, conformément à la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, les procédures de recrutement dans des corps de catégorie A de la fonction publique seront progressivement adaptées pour les docteurs, dans l'objectif de valoriser les acquis de leur expérience professionnelle spécifique. Différentes modalités d'adaptation pourront être envisagées, telles que la création de concours réservés aux docteurs, ou l'adaptation de concours existants en ce qui concerne les conditions de candidature ou la nature des épreuves. Il est à noter que l'IGAS (inspection générale des affaires sociales) et le corps des mines prévoient d'ores et déjà le recrutement direct de docteurs. D'autres pistes d'amélioration existent en matière d'emploi des jeunes chercheurs. La recherche française pourrait notamment se tourner davantage vers les financements de l'Union européenne. Enfin, il est également de la responsabilité des organismes et des établissements de décliner, dans leur dialogue social interne, la priorité à l'emploi en mobilisant toutes les marges de manoeuvre disponibles pour favoriser la continuité des recrutements et les débuts de carrière.