14ème législature

Question N° 68597
de M. Guillaume Chevrollier (Union pour un Mouvement Populaire - Mayenne )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > droit pénal

Tête d'analyse > corruption active ou passive

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 11/11/2014 page : 9450
Réponse publiée au JO le : 17/05/2016 page : 4256
Date de changement d'attribution: 28/01/2016

Texte de la question

M. Guillaume Chevrollier attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le retard de la France dans la lutte contre la corruption internationale qui menace nos entreprises. La France est signataire de la convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption internationale - celle qui est commise à l'étranger. Elle s'est ainsi soumise à un processus de surveillance par l'OCDE de la mise en application de cette convention par ses membres. Si les textes répressifs français sont ambitieux, le caractère non-dissuasif des sanctions les rend inefficaces. Il est reproché par l'OCDE à la France la faiblesse de l'application de ces textes - en particulier lorsque la corruption concerne des États ou des marchés étrangers. De plus, concernant la prévention au sein des entreprises, elle est inexistante. Le retard de la France dans ce domaine engendre un coût considérable pour les entreprises françaises car ce sont les autorités étrangères qui s'occupent de la répression. Plusieurs groupes français ont commencé à devoir verser à ces autorités des centaines de millions d'euros au titre de condamnations - autant de perdu pour la France. De plus, les entreprises internationales doivent désormais démontrer qu'elles sont en conformité dans leurs opérations, au risque de s'exposer à des sanctions supplémentaires (amendes pénales, exclusion des marchés et des financements publics, mise en quarantaine par les partenaires). La France doit faire une réforme de fond. Il en va de la pérennité de nos entreprises. Il lui demande donc ce qu'elle compte faire pour améliorer notre droit dans ce domaine.

Texte de la réponse

Le Gouvernement a engagé, dès 2013, une politique globale traduisant sa résolution à lutter contre toutes les formes d'atteintes à la probité. D'importantes réformes ont ainsi adoptées, notamment par les lois ordinaires et organiques du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique d'une part et par celles du 6 décembre 2013 relatives à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière et au procureur de la République financier d'autre part. Ainsi, le déclenchement des enquêtes a-t-il été facilité par la loi du 6 décembre 2013 qui permet désormais aux parties civiles – et notamment les associations qui peuvent désormais être agréées à cette fin - d'être à l'origine d'enquêtes en matière de corruption d'agents publics étrangers. La création du procureur de la République financier (loi du 6 décembre 2013) qui dispose d'une compétence en matière de corruption d'agents publics étrangers permet de confier ce contentieux à un parquet hautement spécialisé, interlocuteur privilégié des services d'enquêtes nationaux et des autorités internationales en matière de coopération transfrontalière et assurant ainsi une meilleure efficacité de la réponse pénale. Les sanctions applicables en matière de corruption d'agents publics étrangers ont également été renforcées par la loi du 6 décembre 2013 puisque les peines ont été portées de 150 000 € à un million d'euros pour les personnes physiques et de 750 000 € à 5 millions d'euros pour les personnes morales. Ce montant peut être augmenté pour atteindre le double du produit tiré de l'infraction pour les personnes physiques ou le décuple pour les personnes morales. Ces dispositions offrent au juge la possibilité de prononcer des sanctions proportionnées aux enjeux financiers des dossiers de corruption. La réflexion menée par la direction des affaires criminelles et des grâces au sein du ministère de la justice ces derniers mois reflète la préoccupation centrale que constitue le sujet de la prévention et de la lutte contre les atteintes à la probité. La direction des affaires criminelles et des grâces a réuni le 25 juin 2015 les magistrats en charge des questions de probité afin de dresser un état des lieux des mécanismes existants et d'examiner les enjeux posés par les évolutions législatives. Parallèlement à l'intervention pénale, des actions de prévention ont été menées afin de sensibiliser les acteurs économiques aux problématiques d'atteintes à la probité, notamment par le service central de prévention de la corruption qui effectue des actions de formation et de sensibilisation au sein des écoles de la fonction publique, des universités et des grandes écoles mais également à destination des entreprises. Par ailleurs, il a été créé en février 2015 au sein de cette direction une mission chargée de réfléchir aux moyens d'améliorer, tant sur le plan de l'adaptation de la politique pénale que sur le plan des évolutions normatives, la prévention, la détection et la répression en matière de lutte contre les atteintes à la probité, et plus particulièrement en matière de corruption transnationale. Le résultat de ses travaux devrait permettre de proposer des réformes normatives et institutionnelles en matière de prévention et de répression de la corruption internationale. Enfin, un projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique a été déposé le 30 mars 2016 à l'Assemblée, qui complète le dispositif en vigueur et renforce tant la détection et la prévention de la corruption que sa répression pénale.