14ème législature

Question N° 70434
de Mme Valérie Boyer (Union pour un Mouvement Populaire - Bouches-du-Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > pharmacie et médicaments

Tête d'analyse > antibiotiques

Analyse > surconsommation. conséquences.

Question publiée au JO le : 02/12/2014 page : 9968
Réponse publiée au JO le : 26/05/2015 page : 3944
Date de renouvellement: 12/05/2015

Texte de la question

Mme Valérie Boyer alerte Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur l'évolution de la consommation d'antibiotiques en France. En effet, de nombreux professeurs et professionnels de santé s'inquiètent de voir se multiplier des cas « difficiles » à traiter avec des antibiotiques courants ou avec ceux dits de dernier recours. Depuis quatre ans, plus de 1200 cas d'infections impliquant des superbactéries résistantes ont été recensés dans les hôpitaux français. L'augmentation de la prescription d'antibiotiques n'est pas rassurante dans ce contexte où la résistance aux antibiotiques est un véritable problème de santé public. Pourtant, les campagnes d'information à destination des médecins et des patients avaient permis de faire baisser de 10 % la consommation d'antibiotiques en France depuis 2000. Mais, un rapport de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) démontre que depuis cinq ans, les prescriptions d'antibiotiques ont augmenté de 3 % alors que nous espérions une réduction de 25 % d'ici à 2016. La France reste un des plus gros consommateurs européens d'antibiotiques avec une consommation moyenne supérieure de 30 % à la moyenne européenne, spécialement par rapport aux pays d'Europe du Nord. L'arsenal thérapeutique diminue et, contrairement à d'autres familles de médicaments qui ont bénéficié d'innovations importantes, très peu de nouveaux produits sont venus enrichir les différentes classes d'antibiotiques. Les chiffres du rapport doivent inciter médecins et patients à la modération : le nombre de substances actives disponibles a diminué de 29 entre 2000 et 2012, alors que 11 seulement ont été développées. Pour rappel, des bactéries telles qu'Escherichia coli ou le staphylocoque doré tuent chaque année 25 000 personnes en Europe selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS). La recherche dans ce domaine s'est quasi éteinte et les pharmacies sont sous équipées face à ces superbactéries. Aussi, elle demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour remédier à cette situation.

Texte de la réponse

Le contexte épidémiologique actuel des multi-résistances et de pénurie de nouveaux antibiotiques est aujourd'hui identifié au niveau européen et international comme une préoccupation majeure en termes de santé publique, notamment par l'organisation mondiale de la santé (OMS) avec le plan mondial sur l'antibiorésistance qui sera soumis à l'assemblée mondiale de la santé au mois de mai 2015. La France a mis en place deux plans nationaux depuis 2002 (2002-2005 et 2007-2010). Un 3e plan national 2011-2016 d'alerte sur les antibiotiques est actuellement en cours de déclinaison. Les actions ont abouti à faire baisser globalement la consommation d'antibiotiques, tant en ville qu'à l'hôpital. Mais la consommation d'antibiotiques en ville repart à la hausse depuis 4 ans. De façon coordonnée, le programme national d'actions de préventiondes infections associées aux soins attache une grande importance à la lutte contre les infections liées aux soins et à la bonne pratique des antibiotiques à l'hôpital mais aussi en ambulatoire et dans le secteur médico-social. Dans ce contexte, le 17 novembre, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a annoncé la mise en place d'un groupe de travail spécial destiné à renforcer l'action gouvernementale contre l'antibiorésistance en complément des plans nationaux en santé humaine et animale (plan ecoantibio et mesures nouvelles dans la loi pour l'avenir de l'agriculture). Tous les acteurs concernés sont associés à cette réflexion : sociétés savantes, institutions, experts, organismes publics et privés, industrie pharmaceutique. Les propositions, attendues pour le 30 juin 2015, visent notamment la recherche de nouvelles molécules et de nouveaux tests diagnostiques, notamment avec des partenariats public-privé, des propositions innovantes en matière de sensibilisation du grand public, notamment en direction des plus jeunes, et de nouveaux modèles d'usage des antibiotiques. Parmi les actions déjà en cours dans le cadre du plan national d'alerte sur les antibiotiques, l'expérimentation de dispensation à l'unité en officine, qui doit réduire le nombre d'antibiotiques non utilisés, a débuté dans quatre régions (Ile de France, Lorraine, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Limousin) en octobre 2014, pour un an, et a vocation à être généralisée par la suite, si ses résultats s'avèrent concluants. Par ailleurs, des repères pour la pratique des tests rapides d'orientation diagnostique de la grippe ont été diffusés en octobre 2014. Ils permettent de guider les professionnels pour utiliser et interpréter ces tests de dépistage des virus grippaux A et B, ce qui évitera de nombreuses prescriptions inutiles d'antibiotiques. La mise en place d'antibiogrammes ciblés dans les infections urinaires, avec le rendu au prescripteur des résultats de l'antibiogramme privilégiant les molécules antibiotiques de première intention, permettra notamment d'éviter l'utilisation en première intention des antibiotiques à large spectre, particulièrement générateurs de résistances. L'intégration de recommandations et d'éléments de bonne pratique dans les logiciels métiers des prescripteurs est en cours pour les infections ORL. Ils permettront au prescripteur de consulter des mémos adaptés au profil du patient pendant la consultation. Les mémos seront proposés par la Haute autorité de santé (HAS) aux éditeurs de logiciels en 2015. L'actualisation de la circulaire de 2 mai 2002 relative au bon usage des antibiotiques dans les établissements de santé et à la mise en place à titre expérimental de centres de conseil en antibiothérapie pour les médecins libéraux prévoit des actions pour favoriser le bon usage des antibiotiques dans les établissements de santé et en médecine de ville, en renforçant le rôle du référent et de la commission en antibiothérapie, en améliorant l'encadrement de l'utilisation pour les antibiotiques dits « critiques », et en renforçant le recours à un conseil en antibiothérapie proche du terrain pour la médecine de ville. Enfin une réflexion est engagée pour identifier les possibles leviers, de nature réglementaire notamment, susceptibles de favoriser le développement de nouveaux antibiotiques en prenant en compte la singularité de ces médicaments. Des premiers contacts en ce sens ont eu lieu avec la Commission européenne.