14ème législature

Question N° 70526
de M. Hervé Féron (Socialiste, républicain et citoyen - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > sang et organes humains

Tête d'analyse > produits sanguins labiles

Analyse > plasma thérapeutique. commercialisation. sécurité.

Question publiée au JO le : 02/12/2014 page : 9973
Réponse publiée au JO le : 13/01/2015 page : 169

Texte de la question

M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur l'ouverture à la concurrence de la commercialisation du plasma thérapeutique. Cette substance, appartenant à la famille des produits sanguins labiles, produits d'origine humaine destinés à être transfusés à un patient, est utilisée aujourd'hui dans le cas de troubles graves de la coagulation ainsi que pour le traitement de pathologies rares et sérieuses comme les microangiopathies thrombotiques. Depuis 1993, la collecte, la fabrication et la distribution des produits sanguins labiles fait l'objet d'un monopole public, assuré depuis 2000 par l'Établissement français du sang, afin de garantir la sécurité des patients. Cependant, saisi par une société pharmaceutique, le Conseil d'État a rendu un arrêt le 23 juillet 2014, imposant la commercialisation du plasma-SD sous le régime des médicaments. La haute juridiction administrative s'est conformée à la réglementation européenne prévue par les directives 2001/83/CE du 6 novembre 2001 et 2004/27/CE du 27 janvier 2003, qui s'impose aux États membres comme l'a rappelé la Cour de justice de l'Union européenne dans sa décision du 14 mars dernier. L'Établissement français du sang devra ainsi cesser la commercialisation du plasma SD au plus tard le 31 janvier 2015 et les sociétés souhaitant distribuer ce produit sanguin pourront le faire sous réserve de respecter les principes éthiques du don du sang imposés par la législation française et d'obtenir une autorisation de mise sur le marché, nécessaire pour tout médicament. Cependant, il semble que certains laboratoires sollicitent de façon appuyée la délivrance d'une autorisation temporaire d'utilisation par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Cette procédure permet l'utilisation d'une spécialité pharmaceutique destinée à traiter ou diagnostiquer des maladies graves ou rares pour lesquelles aucun traitement approprié n'existe sur la base de présomptions quant à l'efficacité et la sécurité d'emploi alors que le dossier constitué pour la délivrance d'une AMM repose principalement sur les résultats d'expérimentations et d'essais cliniques. La possibilité de telles dérogations accordées aux firmes pharmaceutiques génère une opposition légitime de la part des professionnels du secteur transfusionnel. Il lui demande ainsi les intentions du Gouvernement afin de garantir l'équité entre les acteurs de ce secteur et la sécurité des produits distribués.

Texte de la réponse

L'article 51 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2015 a pour objectif de mettre en conformité le droit français à la suite des arrêts de la Cour de Justice de l'Union européenne et du Conseil d'État qui ont requalifié le plasma sécurisé par solvant-détergent (dit plasma SD), considéré jusqu'à ce jour comme un produit sanguin labile, en médicament. L'arrêt du Conseil d'État ne laissant que jusqu'au 31 janvier 2015 pour permettre les adaptations nécessaires à cette requalification, le Gouvernement a proposé par l'article 51 du PLFSS un dispositif permettant d'assurer dès le 31 janvier prochain un haut niveau de sécurité pour les patients transfusés. Il est en effet impératif de garantir un système intégrant en toute sécurité des produits transfusionnels de statuts juridiques différents qui, sans modification de la législation, emprunteraient des circuits distincts de distribution et de délivrance jusqu'au lit du patient. Sans cette mesure, le plasma SD arriverait directement dans les pharmacies à usage intérieur des hôpitaux qui ne disposent pas encore des équipements nécessaires à la conservation et à la délivrance de ce produit et dont les personnels n'ont pas encore été formés à ce type de produit. Le danger à éviter aujourd'hui est de désorganiser, du jour au lendemain, la délivrance des produits transfusionnels, désorganisation qui pourrait conduire à des retards de transfusion voire à des accidents plus graves. Par ailleurs, sans ces dispositions, il ne sera pas possible d'assurer un double suivi de ce plasma en pharmacovigilance et en hémovigilance, ce qui pourrait être préjudiciable à la sécurité de la chaîne transfusionnelle et à celle des patients. Il convient également de rappeler que la présente mesure n'est pas le signe d'un changement de conviction sur les grands principes qui régissent la transfusion sanguine en France. Notre pays reste très fortement attaché au don éthique, bénévole, anonyme et non rémunéré et à l'autosuffisance en produits sanguins. Le monopole de l'établissement français du sang (EFS) sur la collecte des produits sanguins labiles en France n'est absolument pas remis en cause par cette mesure. L'EFS continuera ainsi à produire, distribuer et délivrer des plasmas transfusionnels et tous les autres produits sanguins labiles ; seul le plasma SD pourra être commercialisé par des laboratoires pharmaceutiques, sous réserve d'obtenir les autorisations prescrites par la loi. Par ailleurs, il convient de souligner que des règles existent en France régissant les médicaments dérivés du sang afin de soutenir la promotion de médicaments d'origine éthique. Déjà aujourd'hui, nos règles nationales d'autorisation de mise sur le marché imposent le principe de l'origine éthique du plasma ; demain, le label éthique viendra encore renforcer la promotion de ces médicaments éthiques. Le plasma SD ne dérogera pas à ces règles.