14ème législature

Question N° 70715
de M. Olivier Falorni (Radical, républicain, démocrate et progressiste - Charente-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > élevage

Tête d'analyse > bovins

Analyse > équipement. méthaniseurs. conséquences.

Question publiée au JO le : 09/12/2014 page : 10158
Réponse publiée au JO le : 21/04/2015 page : 3018

Texte de la question

M. Olivier Falorni attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les conséquences de l'installation des méthaniseurs qui équiperont le millier de fermes d'ici 2020, comme le prévoit le plan « Energie méthanisation autonomie azote ». Même si la méthanisation présente bien des avantages, notamment dans le cadre des exploitations agricoles pour recycler les déchets, enrichir les sols et alléger significativement la facture énergétique, il reste des interrogations et notamment en ce qui concerne la ferme dite « des mille vaches ». Selon les calculs de Patrick Sadones, agriculteur et ingénieur agronome, l'empreinte écologique de cette ferme ne serait pas positive. Annoncé pour une économie de 1 805 tonnes d'équivalent CO2, le projet générerait en fait 2 350 tonnes d'équivalent CO2, soit un malus de 545 tonnes par an. À l'origine de cette estimation, l'azote contenu dans les excréments du cheptel. Celui-ci se transformant en ammoniac, forme dans l'air du protoxyde d'azote, un puissant gaz à effet de serre. Aussi, il lui demande quelle mesure entend prendre le Gouvernement pour réduire l'empreinte carbone des futurs méthaniseurs.

Texte de la réponse

Une autorisation d'exploiter un élevage de 500 vaches laitières, auquel est associé un méthaniseur et une unité de cogénération de 1,338 mégawatt (MW) et 1,745 MW thermiques de puissance sur les communes de Drucat et de Buigny-Saint-Maclou a été délivrée le 1er février 2013 au titre de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement par le préfet de la région Picardie, préfet de la Somme. Le porteur de projet a depuis confirmé sa décision de limiter la puissance du méthaniseur à 0,6 mégawatts et de limiter son approvisionnement aux seuls sous-produits de l'activité agricole. La création d'une exploitation laitière de grande taille associée à une unité de méthanisation est la première du genre en France. Bien que ce projet demeure très éloigné du modèle d'exploitation familiale traditionnellement développé sur le territoire et que le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement entend défendre prioritairement, il s'appuie sur des méthodes et technologies innovantes dont les résultats, s'ils sont vérifiés, pourraient être exploités dans le cadre de projets collectifs. Le Gouvernement contribue activement à la conciliation de la performance économique des activités agricoles et du respect des exigences environnementales fixées dans la réglementation de l'Union européenne. Dans cet esprit, le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt (MAAF) soutient l'idée selon laquelle le développement de la production d'énergies renouvelables doit créer des synergies avec les activités d'élevage. En ce sens, un plan énergie - méthanisation - autonomie - azote a été conjointement lancé le 29 mars 2013, par le MAAF et le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Il vise d'une part, à assurer aux éleveurs un revenu complémentaire stable dans un contexte de fragilité des exploitations lié à la forte volatilité des coûts de production et des prix de vente et d'autre part, à répondre aux enjeux environnementaux et énergétiques du pays. L'objectif est de développer en France, à l'horizon 2020, 1 000 méthaniseurs à la ferme autour d'une gestion collective et intégrée de l'azote, mobilisant 2 milliards d'euros d'investissement et permettant la création d'environ 2 000 emplois. Reconnue comme un enjeu décisif pour l'évolution du climat de la planète, la diminution des émissions de gaz à effet de serre représente un objectif majeur auquel l'agriculture doit contribuer. L'institut national de la recherche agronomique (INRA) a publié en juillet 2013 les résultats de son étude sur la contribution du secteur agricole à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et les experts ont dans ce cadre identifié et analysé dix actions portant sur des pratiques agricoles restant compatibles avec une production agricole élevée. Parmi les actions identifiées comme réalisables figurent la couverture des fosses de stockage des effluents et le développement des unités de méthanisation. Actuellement, la majorité des déjections animales récupérées sont stockées dans les bâtiments d'élevage et dans des ouvrages extérieurs ou aux champs pendant une période pouvant atteindre six mois. Ces stockages s'accompagnent d'un rejet direct vers l'atmosphère de composés gazeux, notamment du méthane et du protoxyde d'azote, puissants gaz à effet de serre. L'INRA préconise une stratégie de valorisation des effluents pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et pour produire de l'énergie, en captant le méthane produit par fermentation des effluents durant leur stockage et en le valorisant en énergie, par exemple par combustion en chaudière ou en moteur de cogénération permettant de produire de l'électricité et/ou de la chaleur, voire en injection dans le réseau de gaz naturel. Le méthane est brûlé, donc transformé en dioxyde de carbone, qui a un pouvoir de réchauffement global 25 fois inférieur à celui du méthane, permettant ainsi de réduire fortement l'impact effet de serre. De plus, l'énergie produite peut se substituer à une énergie fossile émettrice de dioxyde de carbone. En plaçant les déjections en conditions strictement anaérobies, en méthaniseur par exemple, le procédé réduit également les émissions de protoxyde d'azote, la production de protoxyde d'azote nécessitant des conditions à la fois aérobies et anaérobies qui favorisent respectivement la nitrification et la dénitrification. Le procédé de méthanisation transforme l'azote organique des effluents en azote minéral, mais des techniques adaptées (couverture des fosses de stockage des digestats, utilisation de pendillards pour l'épandage) existent et permettent de limiter la volatilisation d'ammoniac, qui peut former dans l'air du protoxyde d'azote, lors du stockage aval et de l'épandage. Les digestats produits par la méthanisation peuvent de plus se substituer à une utilisation d'engrais d'origine fossile. La méthanisation des effluents d'élevage est le principal levier de gestion des déjections identifié pour agir sur les émissions de gaz à effet de serre, et présente donc des intérêts non seulement pour la réduction directe des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi pour la réduction indirecte des émissions de gaz à effet de serre par la production d'énergies renouvelables et la substitution à l'utilisation d'énergies fossiles et d'engrais d'origine fossile.