14ème législature

Question N° 71140
de M. Éric Alauzet (Écologiste - Doubs )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > déchets, pollution et nuisances

Tête d'analyse > automobiles

Analyse > autoroutes. écoulement des eaux de pluies. pollution.

Question publiée au JO le : 16/12/2014 page : 10427
Réponse publiée au JO le : 03/03/2015 page : 1510

Texte de la question

M. Éric Alauzet interroge Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la mise aux normes environnementale des rejets de l'autoroute A36 qui traverse le département du Doubs d'est en ouest. Dans ce cas précis, à part pour quelques tronçons qui ont été équipés, les eaux qui ruissellent sur l'autoroute, abondantes en période pluvieuse, sont rejetées sans traitement dans le milieu naturel et contribuent à polluer les cours d'eau et les eaux souterraines de tout ce qu'elles entraînent : particules de caoutchouc, produits issus de la corrosion des véhicules, métaux lourds, hydrocarbures, huiles, épandages de sels en hiver, etc. À ce titre, selon la SAPRR, la circulation sur un kilomètre d'autoroute produirait chaque année plusieurs kilogrammes d'hydrocarbures et de métaux lourds et près d'une tonne de particules diverses. À cette pollution chronique issue du trafic routier s'ajoutent les pollutions accidentelles que peuvent occasionner certains accidents, et qui peuvent donner lieu à des écoulements de produits dangereux ou toxiques. Cette situation est d'autant plus critiquable lorsque l'on sait les bénéfices considérables qui sont réalisés par les sociétés d'autoroutes à l'heure actuelle, dont les bénéfices importants ont été récemment démontrés par l'Autorité de la concurrence dans un avis rendu public le 17 septembre 2014. Les tarifs des péages autoroutiers collectés auprès des usagers, qui ont en grande partie contribué à ces bénéfices excessifs et injustifiés, sont largement déconnectés des coûts d'exploitation de ces ouvrages, et pourraient largement couvrir leur mise aux normes, afin de mettre un terme à une situation nuisible à l'environnement et aux milieux aquatiques. Aussi, compte tenu du fait que le trafic routier est en continuelle augmentation sur cet axe, très fréquenté par les poids lourds, et qu'un incident grave peut à tout moment survenir sur cette infrastructure et entraîner une pollution chimique catastrophique des eaux, l'inquiétude est de plus en plus forte, notamment chez les défenseurs de l'environnement et les riverains. Depuis 10 ans déjà, la Commission de protection des eaux, du patrimoine, de l'environnement, du sous-sol et des chiroptères (CPEPESC), n'a eu de cesse d'intervenir à ce sujet auprès de l'administration. En juin 2006, la DDT du Doubs, en charge de la police des eaux, répondait à l'association qu'il s'agissait là d'une priorité. Pourtant à l'heure actuelle, cette mobilisation est restée sans effet notoire auprès de l'APRR qui gère ce tronçon autoroutier, et l'association a appris de la même DDT police de l'eau que, si l'ensemble des points de rejets étaient désormais connus, en revanche la qualité et les volumes d'effluents rejetés pour chaque déversoir ne l'étaient pas. De plus, aucune mise en demeure ou arrêté de prescription n'a été émis à ce jour à l'encontre d'APRR pour l'obliger à traiter ses effluents. Il souhaiterait savoir ce qu'elle compte faire pour pallier concrètement le manque de volonté de l'administration en charge de la police de l'eau et de la préfecture du Doubs afin de contraindre la société autoroutière à se mettre aux normes dans les plus brefs délais ; d'une part pour limiter la pollution chronique, et d'autre part pour répondre aux graves risques que fait courir depuis trop longtemps cette situation sur le milieu naturel en cas de déversement accidentel de produits chimiques.

Texte de la réponse

Depuis l'entrée en vigueur de la loi sur l'eau en 1992, certains projets d'aménagement dont le rejet des eaux pluviales s'effectue vers le milieu naturel sont soumis aux exigences de la rubrique 2.1.5.0 de l'article R. 214-1 du code de l'environnement. À ce titre, les sociétés autoroutières concédantes doivent mettre en place des mesures de gestion des eaux pluviales. L'autoroute A36 ayant été mise en service dans les années 1970, la société autoroutière concédante n'était pas encore soumise à ces exigences environnementales. Toutefois, à la suite de la publication de la loi sur l'eau de 1992, elle a dû réaliser les travaux nécessaires afin d'intercepter les pollutions dues au ruissellement des eaux pluviales en provenance de ses voiries. Pour l'autoroute A36, les premières installations de traitement des eaux pluviales ont été réalisées dans les secteurs de captage d'eau, notamment par la mise en place de bassins de traitement d'eaux pluviales ou l'installation de dispositifs de traitement des eaux. De plus, conformément à la loi sur l'eau précitée, les rejets autoroutiers ont été déclarés en préfecture en décembre 1994. L'article L. 214-6 modifié du 18 juillet 2005 a permis de régulariser les infrastructures liées à cette autoroute au titre de la loi sur l'eau. Depuis 2006, plusieurs opérations ont également été instruites par la direction départementale des territoires (DDT), au titre de la police de l'eau. À ce jour, sur le tronçon de l'autoroute situé sur le département du Doubs représentant environ 100 km, les secteurs dont les eaux sont traitées totalisent environ 24 km. Sur les zones non traitées, l'impact des rejets des eaux pluviales sur le milieu naturel semble limité, la plupart des eaux débouchant dans des fossés ou en infiltration directe dans le sol. Néanmoins, des secteurs sensibles demeurent, certains ayant déjà été identifiés par la DDT, et feront l'objet d'actions de protection spécifiques. Afin d'améliorer la protection des milieux aquatiques longeant l'autoroute A36, les services de la DDT ont rencontré la société APRR à plusieurs reprises ces dernières années. À la suite de ces rencontres, la problématique des rejets est mieux prise en compte dans les programmes de travaux de la société qui prévoit des améliorations de ses rejets. Les actions déjà mises en place par la DDT, en concertation avec l'APRR, vont être poursuivies afin d'améliorer la prise en compte des rejets autoroutiers, en particulier au niveau des points de rejets sensibles, et d'étudier les solutions pouvant être mises en oeuvre. En complément et en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, si une pollution est constatée à la suite d'une mauvaise gestion des eaux pluviales provenant de l'autoroute A36, le préfet peut être saisi pour fixer des prescriptions spécifiques afin d'y remédier. Si cela s'avère justifié, il pourra alors imposer à la société APRR d'installer des ouvrages de gestion et de traitement des eaux pluviales.