14ème législature

Question N° 71531
de M. Joël Giraud (Radical, républicain, démocrate et progressiste - Hautes-Alpes )
Question écrite
Ministère interrogé > Numérique
Ministère attributaire > Économie, industrie et numérique

Rubrique > télécommunications

Tête d'analyse > téléphone

Analyse > portables. GSM-R. communications ferroviaires. interférences. perspectives.

Question publiée au JO le : 16/12/2014 page : 10463
Réponse publiée au JO le : 31/03/2015 page : 2518
Date de changement d'attribution: 23/12/2014

Texte de la question

M. Joël Giraud attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique sur la question de la gestion des risques d'interférences entre les installations de téléphonie mobile et le développement de la technologie GSM-R, le long du tracé de la LGV dite « SEA » (Sud-Europe-Atlantique) mis en œuvre par Réseau ferré de France. En effet, la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant sur la réforme ferroviaire a inséré un nouvel article dans le Code des transports (L. 2231-8-1) disposant que les émetteurs d'ondes, qu'ils soient ou non situés sur le domaine public ferroviaire ou dans une zone de servitude, devront prendre toutes mesures nécessaires afin de ne pas porter atteinte au bon fonctionnement des circulations ferroviaires. Cette disposition vise spécifiquement les installations 900MHz du réseau de communications électroniques et engage la responsabilité des opérateurs de ces installations en cas d'incident ferroviaire. Elle constitue une première dans le monde des télécommunications radioélectriques. En effet, telle que formulée, elle revient à exonérer l'exploitant du système radio ferroviaire de prendre toutes les mesures nécessaires pour le bon fonctionnement de son système en faisant reposer sur les exploitants des systèmes voisins l'arrêt des perturbations. En cela, cette disposition est contraire aux principes fondamentaux d'exploitation des services radioélectriques tels qu'édictés dans le règlement international des télécommunications régi par l'Union internationale des télécommunications. Ce dernier dispose en effet que, dès lors qu'il a connaissance des systèmes qui l'entourent, un opérateur doit prendre les dispositions garantissant le bon fonctionnement de son système en évitant de perturber ses voisins. Ce n'est donc pas à ses voisins de s'adapter au nouveau venu mais à lui de se protéger en conséquence. La perturbation possible des signaux GSM-R des opérateurs ferroviaires par les systèmes de téléphonie mobile opérés à 900 MHz est un phénomène connu de longue date en Europe. Dans plusieurs États-membres de l'Union européenne, des opérateurs ferroviaires ont pris des mesures pour adapter leurs équipements et garantir la sécurité de leurs usagers ; c'est notamment le cas de la Deutsche Bahn en Allemagne. Le GSM est exploité sur notre territoire depuis maintenant plus de 20 ans et 99 % de la population est couverte. Les personnes exploitant ou prévoyant d'exploiter le GSM-R ne peuvent l'ignorer. Elles doivent prendre les dispositions pour que leur matériel ne soit pas perturbé par l'environnement radioélectrique dans lequel il évolue. Il donc est surprenant qu'une telle disposition, excluant la responsabilité de ceux qui exploitent ce matériel, ait pu être insérée par amendement à la loi du 4 août 2014 portant sur la réforme ferroviaire. Il est tout aussi surprenant que les prestataires des opérateurs ferroviaires adressent d'ores et déjà des courriers aux maires, fondés sur cette disposition qui n'est pourtant pas encore légalement entrée en vigueur, pour les appeler à refuser l'implantation d'installations d'opérateurs de télécommunications. À ce dernier égard, si cette disposition devait entrer en vigueur, elle s'avèrerait alors de surcroît contre-productive en termes de déploiement des réseaux mobiles le long des voies ferrées. Il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour mettre un terme aux difficultés d'interprétation de cet article L. 2231-8-1, qui contrevient d'une part à un principe international et d'autre part menace purement et simplement l'exploitation de la téléphonie mobile le long des voies ferrées jusque dans les gares.

Texte de la réponse

Réseau ferré de France (RFF), devenu aujourd'hui SNCF Réseau, utilise les fréquences 876 MHz à 880 MHz et 921 MHz à 925 MHz, retenues par la norme européenne relative au GSM-R (protocole européen de communication dédié aux communications ferroviaires). L'utilisation de cette fréquence, seule norme reconnue au niveau européen pour ces communications, lui est autorisée, en France, depuis 2005, par une décision de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) Le GSM-R permet notamment aux agents de conduite des trains en cabine ou aux agents de maintenance de communiquer entre eux (appels de groupe) et avec les régulateurs du trafic ferroviaire. En outre, l'alerte radio, qui permet l'arrêt d'urgence de l'ensemble des circulations ferroviaires dans une zone donnée, aujourd'hui en mode analogique, doit basculer vers ce standard européen. Conformément à ses obligations, SNCF Réseau déploie actuellement ce système dans toute la France, dans le cadre d'un partenariat public privé. Ces fréquences dédiées au ferroviaire sont adjacentes à la bande 900 MHz utilisée historiquement pour la téléphonie mobile de 2e et 3e générations (2G et 3G). Des cas de brouillages des récepteurs des communications ferroviaires ont été constatés à proximité d'antennes de téléphonie mobile le long des voies ferrées : en effet, les terminaux GSM-R peuvent être « éblouis » par les réseaux des opérateurs mobiles. Ces interférences ont été à l'origine en décembre 2013 de l'arrêt d'exploitation du tram-train T4 (Aulnay-Bondy) ainsi que de l'accident de la ville d'Hever en Belgique en 2013. Dans le cadre de la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire, un article L. 2231-8-1 a été ajouté au code des transports qui dispose que tout propriétaire d'une installation radioélectrique ne doit pas porter atteinte « au bon fonctionnement des circulations ferroviaires » et doit respecter des « prescriptions ferroviaires établies par arrêté des ministres chargés des transports et de l'industrie ». Cet article, dont l'objectif est de répondre à des enjeux de sécurité et de qualité des circulations ferroviaires, doit s'articuler avec les dispositions du code des postes et des communications électroniques, qui confie à l'ARCEP la compétence de définir les conditions d'utilisation de l'ensemble des bandes de fréquences dont elle est affectataire. Par ailleurs, il convient de clarifier la cohérence de cet article avec le droit existant concernant l'implantation des antennes de réseaux radioélectriques, régi notamment par le principe d'antériorité, en accord avec le règlement des radiocommunications de l'Union internationale des télécommunications. Enfin, ces dispositions ne doivent pas conduire à empêcher les opérateurs de téléphonie mobile d'assurer une bonne couverture le long des voies ferroviaires, y compris en zones urbaines, en contradiction avec leurs obligations, les objectifs d'aménagement du territoire et avec les demandes de la SNCF concernant l'amélioration de la connectivité à bord des trains. Afin de lever les incertitudes dans les meilleurs délais, les réponses à mettre en oeuvre, pour assurer la sécurité des circulations ferroviaires et la bonne couverture mobile des territoires, font actuellement l'objet de travaux par les différents services de l'Etat concernés. Par courrier en date du 5 février 2015, une mission visant à proposer des solutions techniques et juridiques a été confiée aux conseils généraux de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET) par le secrétaire d'Etat chargé des transports, de la mer et de la pêche auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la secrétaire d'Etat chargée du numérique auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Les deux ministres ont demandé aux deux conseils généraux de proposer conjointement des solutions d'ici le 5 juin 2015, pour prévenir la survenance d'interférences et pallier les défaillances qui seraient constatées. La mission s'appuiera notamment sur les travaux menés par deux groupes de travail pilotés par l'Agence nationale des fréquences (ANFR), réunissant les opérateurs mobiles et SNCF. Ces groupes portent d'une part sur la coordination des opérateurs mobiles et des gestionnaires d'infrastructures et, d'autre part, sur la mise à niveau des équipements à bord des trains.