14ème législature

Question N° 71976
de M. Jean-Luc Bleunven (Socialiste, républicain et citoyen - Finistère )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > santé

Tête d'analyse > psychiatrie

Analyse > internements sous contrainte. contrôles.

Question publiée au JO le : 23/12/2014 page : 10604
Réponse publiée au JO le : 28/07/2015 page : 5739
Date de signalement: 14/07/2015

Texte de la question

M. Jean-Luc Bleunven attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur l'utilisation abusive des articles L 3212-3 et L 3212-1 II 2° du code de la santé. Ces deux articles portent respectivement sur l'admission en soins psychiatriques à la demande d'un tiers en urgence et à l'admission sans demande de proches, en cas de péril imminent. Selon la loi, ces procédures d'internement doivent être utilisées à titre exceptionnel. Dans certains départements métropolitains, ce type d'admission atteint des niveaux particulièrement importants. À titre d'exemple, en 2013 dans le Finistère, les admissions en psychiatrie à la demande d'un tiers ont représenté 62 % du total des hospitalisations. Face à certaines dérives, il lui demande dans quelle mesure des contrôles accrus par les préfets et les procureurs pourraient être diligentés, d'une part, et, d'autre part, s'il est envisagé de rappeler les termes de l'article L. 3222-4 aux autorités concernées par cet article du code de la santé.

Texte de la réponse

L'entrée dans les soins psychiatriques sans consentement s'opère soit par décision du représentant de l'Etat, soit par décision du directeur de l'établissement. Dans ce dernier cas, il existe une procédure dite classique avec la demande d'un tiers, assortie de la production de deux certificats médicaux. Les deux autres procédures sont dites d'urgence et de péril imminent. La procédure d'urgence prévue dans le dispositif des soins psychiatriques sans consentement sur décision du directeur de l'établissement, a été conçue pour faire face aux situations de risque grave d'atteinte à l'intégrité du patient. Cette procédure permet une prise en charge sanitaire sans délais de personnes en situation de grande souffrance mentale. Si elle est en effet fréquemment utilisée depuis sa création, les commissions départementales des soins psychiatriques, instances chargées de veiller au respect des libertés des personnes hospitalisées, n'ont signalé aucun recours injustifié à cette procédure. En outre, la loi du 5 juillet 2011 a entouré le recours à ce dispositif de garanties nouvelles en exigeant, que les certificats médicaux qui fondent ou maintiennent l'hospitalisation émanent de psychiatres différents. Ainsi, pour qu'un patient hospitalisé selon la procédure d'urgence le demeure, trois médecins différents doivent avoir conclu à la nécessité urgente des soins. Quant à la procédure prévue en cas de péril imminent, créée en 2011, elle n'a pas été conçue pour alléger des procédures mais dans le souci de mettre fin à l'exclusion des soins de personnes en situation de souffrance psychique que le dispositif antérieur ne permettait pas de prendre en charge. Il s'agit de permettre la prise en charge des personnes isolées socialement ou celles dont l'entourage ne souhaitait pas se porter tiers demandeur, par crainte d'une détérioration du lien affectif avec le patient ou de la relation de confiance avec lui. Comme pour la procédure d'urgence, le législateur a exigé que le bien-fondé de l'hospitalisation des patients en situation de péril imminent soit vérifié, dans les soixante-douze premières heures suivant l'hospitalisation, par deux psychiatres différents. Selon les données brutes disponibles, l'Agence Technique de l'Information sur l'Hospitalisation (ATIH) a estimé pour 2013 la part des patients en soins psychiatriques pour péril imminent à 18,35 % par rapport à l'effectif total des patients en soins psychiatriques sans consentement et à 21,9 % si l'on ne prend en compte que les patients en soins sur décision du directeur de l'établissement. Par ailleurs, s'il est exact que l'article L.3222-4 du code de la santé publique prévoit une visite chaque année des établissements de santé et l'écoute des réclamations des patients, la loi du 5 juillet 2011 a introduit une réforme majeure dans le contrôle des soins sans consentement en confiant au juge des libertés et de la détention la charge d'examiner toute hospitalisation complète de plus de 12 jours. Dans le cadre de ce contrôle, les juges prêtent une attention particulière aux mesures relevant de dispositifs dérogatoires et veillent attentivement à ce que les critères exigés par la loi soient effectivement respectés. Enfin, les missions des commissions départementales des soins psychiatriques ont également été révisées pour y intégrer l'examen systématique de la situation des personnes relevant d'une mesure de péril imminent. Cette commission composée de médecins n'exerçant pas dans l'établissement où le patient est pris en charge, de représentants d'associations et d'un magistrat, peut être saisie par les patients ou par leurs proches. Elle visite les établissements accueillant des patients en soins sans consentement. Elle dispose du pouvoir d'exiger la levée de toute mesure de soins sur décision du directeur d'établissement qu'elle jugerait injustifiée.