14ème législature

Question N° 72594
de M. Michel Terrot (Union pour un Mouvement Populaire - Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Défense
Ministère attributaire > Défense

Rubrique > défense

Tête d'analyse > équipements

Analyse > drones de combat. perspectives.

Question publiée au JO le : 20/01/2015 page : 303
Réponse publiée au JO le : 31/03/2015 page : 2502

Texte de la question

M. Michel Terrot appelle l'attention de M. le ministre de la défense sur la nécessité pour notre pays d'acquérir dans les meilleurs délais une véritable indépendance dans la technologie militaire stratégique des drones de combat de d'intervention qui sont devenus en quelques années des outils tactiques et stratégiques absolument indispensables sur l'ensemble des théâtres d'intervention militaires, qu'il s'agisse de conflits « conventionnels » ou de lutte contre des organisations terroristes. Actuellement, notre armée ne dispose que de quelques drones de combat, tous de fabrication étrangère et notre pays a pris un grave retard dans le déploiement massif de ce nouveau système d'arme qui possède une capacité et une souplesse d'intervention et de frappe incomparable. Quant au futur drone de combat européen « Neuron », il ne devrait pas être opérationnel avant 2030. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer quelles sont les initiatives qu'envisage le Gouvernement pour accélérer le développement d'un drone de combat européen performant et furtif capable de mener à bien des missions d'intervention à long rayon d'action contre des forces militaires ou terroristes qui menaceraient directement notre pays ou s'en prendraient à ses ressortissants ou à ses intérêts dans le monde.

Texte de la réponse

La gamme des drones (aériens) à usage militaire se compose de plusieurs catégories d'appareils. Leur finalité détermine directement leurs caractéristiques. Dans tous les cas, la notion de drone doit s'entendre en tant que système. Le véhicule aérien est complété par un segment de contrôle sol et un segment liaisons/communications (portées variables, LOS(1) ou BLOS(2)). En termes d'endurance et d'élongation, ces drones peuvent être classés en 5 catégories, du plus petit au plus grand (en omettant les micro-drones) : - le mini-drone, pesant quelques kilogrammes et d'une autonomie de l'ordre d'une heure, destiné à fournir au combattant au contact un renseignement à courte distance jusqu'à une dizaine de kilomètres. Ce renseignement est immédiatement utilisable pour la mission tactique qu'il accomplit (par exemple déterminer les menaces à portée ou en limite de portée de ses armes) ; - le drone tactique, d'une masse de l'ordre de 500 à 600 kilogrammes et d'une autonomie de quelques heures, permettant au chef tactique déployé de disposer du renseignement nécessaire à planifier la phase suivante de la manoeuvre en cours (par exemple localiser et identifier le prochain ennemi qui lui fera face) ; - le drone MALE (moyenne altitude - longue endurance), pesant quelques tonnes, d'une endurance de l'ordre de 24 heures, évoluant hors de portée des systèmes sol-air de (très) courte portée, permettant d'aller chercher du renseignement d'intérêt opératif ou stratégique intéressant toutes les forces déployées sur un théâtre ou de surveiller de façon continue une portion de terrain ; - le drone HALE (haute altitude - longue endurance), proche du MALE en termes de masse, d'endurance et de missions, mais évoluant à une altitude supérieure, au-dessus des altitudes atteintes par les avions de ligne longs courriers. Cette altitude les met à l'abri de la plupart des moyens de défense sol-air courte et moyenne portée ; - l'UCAV (Uninhabited Combat Air Vehicle), proche du chasseur-bombardier, qui a une vocation de pénétration dans des espaces aériens non-permissifs, pour des missions de renseignement ou de frappe. Son intérêt doit être mesuré par rapport aux rapports coûts-efficacité des avions pilotés ou des missiles de croisière. Les concepts d'UCAV sont élargis au-delà de la seule « haute furtivité » (combinatoire avec CME(3), vélocité, manoeuvrabilité, etc.). Tous ces drones peuvent être équipés de dispositifs laser leur permettant d'illuminer ou de désigner une cible (principalement au sol), en vue de son traitement par une arme. Outre l'UCAV, les catégories suivantes de drones sont susceptibles d'être armées : - le drone tactique, malgré sa faible masse, peut emporter un armement limité. Par exemple un ou deux missiles air-sol type Spike LR de 30 kilogrammes pour une portée de 8 kilomètres peuvent équiper le SPERWER dans sa version B ; - le drone MALE et le drone HALE possèdent quant à eux une charge offerte beaucoup plus importante (plusieurs centaines de kilogrammes). Elle permet l'emport de plusieurs missiles air-sol ou air-air de courte ou moyenne portée (jusqu'à 15 kilomètres), voire une ou deux bombes guidées (bombes de 125 ou 250 kilogrammes). La France est dotée de mini-drones, de drones tactiques et de drones MALE mais ne possède pas de drones HALE, ni d'UCAV. Elle met en oeuvre le mini-drone DRAC (drone de renseignement au contact) depuis 2008. Il a été déployé notamment en Afghanistan et est actuellement utilisé en République Centrafricaine au sein de l'opération Sangaris. Il est prévu de remplacer ce système à l'horizon 2017. Le SDTI (système de drone tactique intérimaire) est le drone tactique qui équipe l'armée de terre depuis 2005. Son vecteur aérien est le SPERWER de SAGEM. II a également été déployé en Afghanistan. Il sera remplacé en 2017 par le SDT (système de drones tactiques). Concernant le MALE, et conformément aux orientations du dernier Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, la montée en puissance dans le domaine « connaissance et anticipation » s'est traduite dans la loi de programmation militaire 2014-2019 par l'acquisition de 12 vecteurs aériens MQ-9 REAPER répartis en 4 systèmes. Le premier système, comportant 2 vecteurs aériens (la livraison du troisième étant prévue avant l'été 2015), est projeté au Mali depuis 1 an. Cette capacité complète celle jusque-là assurée par le système HARFANG (ex-SIDM, système intérimaire de drone MALE), également projeté au Mali (après l'avoir été en Afghanistan) et dont la fin de vie est prévue en 2017. Un deuxième système pourrait être livré en 2016 ou 2017. La prochaine génération de drones MALE, dont l'entrée en service est envisagée à l'horizon 2025, pourrait être un drone européen. La vocation de ces drones, y compris celle du futur MALE, est de réaliser des missions ISR (intelligence, surveillance and reconnaissance). Les MQ-9 REAPER acquis par la France ne sont pas armés. En revanche, les drones REAPER sont massivement utilisés en version armée par les forces américaines. Aucun drone mis en oeuvre actuellement par la France n'est armé. Ils sont seulement équipés de systèmes laser permettant éventuellement la désignation ou le guidage d'armements délivrés par une plateforme tierce. Des recherches sont en cours dans le domaine très différent des drones de combat, qui réunissent sur la même plateforme le capteur (permettant la localisation et l'identification d'une cible), le désignateur (laser) et l'effecteur (armement - missile ou bombe). En continuité du démonstrateur nEUROn de DASSAUT, le projet FCAS-DP (future combat air system - demonstration program) a été lancé conjointement en 2014 par la France et le Royaume-Uni (Feasability Phase 2014-2016) suite à la signature du traité de Lancaster House en 2010. Ce projet concentre des études porteuses des technologies qui pourraient permettre de lancer un programme de système de drones de combat, en complément des drones à vocation ISR et armables, pour équiper les forces armées françaises. Le choix des composants cohérents constituant le dispositif de combat aérien futur aura lieu à partir de 2020. Les technologies envisageables pour l'UCAV/UCAS sont toutefois étudiées pour être également transférables au maximum (objectif 80 %) vers le successeur du Rafale (et du Typhoon, si la coopération entre la France et le Royaume-Uni était confirmée), afin de ne pas forcer prématurément un choix vers l'UCAV. (1) « Line of sight » (ligne de vue) : liaison avec vue directe entre émetteur et récepteur. (2) « Beyond line of sight » (au-delà de la ligne de vue) : liaison indirecte nécessitant un refais (terrestre, aérien ou satellite). (3) Contre-Mesures Electroniques.