14ème législature

Question N° 72689
de M. Yannick Moreau (Union pour un Mouvement Populaire - Vendée )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > police

Tête d'analyse > personnel

Analyse > suicides. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 20/01/2015 page : 327
Réponse publiée au JO le : 22/09/2015 page : 7232

Texte de la question

M. Yannick Moreau, député de la Vendée littorale, appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le nombre de suicide dramatiquement élevé au sein de nos forces de police. En effet, depuis le début de l'année 2014, 49 policiers se sont donné la mort. Ce taux bien plus important que pour le reste de la population traduit un véritable mal-être dans la police. Ce dernier est le fruit de plusieurs facteurs parmi lesquels se détachent les conditions de travail de plus en plus difficiles mais également la hausse des violences contre les forces de l'ordre. Ainsi, l'an passé, près de 45 000 faits de violence ont visé les 200 000 policiers et gendarmes de France. Aussi, il lui demande quelles mesures il compte mettre en place pour lutter contre ces agressions inacceptables et pour faire diminuer le nombre de suicides au sein de l'institution policière.

Texte de la réponse

Au sein de la police nationale, une quarantaine de suicides par an a été constatée au cours des dernières années. En 2014 toutefois, 55 suicides ont été déplorés. Ce sujet est une préoccupation majeure du ministère de l'intérieur qui conduit depuis plusieurs années une politique volontariste. S'il est établi que les causes sont majoritairement d'ordre privé, la difficulté du métier de policier ne peut être niée dans les facteurs déclenchant le passage à l'acte. Le ministère de l'intérieur dispose depuis 1996 d'un service de soutien psychologique opérationnel (SSPO) composé, sous l'autorité d'une psychologue, de soixante psychologues cliniciens répartis sur l'ensemble du territoire. Ces professionnels sont chargés de répondre aux demandes d'assistance psychologique des fonctionnaires de police et interviennent en urgence à la suite d'événements traumatiques. Ils assurent un soutien et un accompagnement des policiers en difficulté, organisent des permanences et des séances d'information, des actions de prévention (groupes de parole...). Plusieurs dispositifs ont été mis en oeuvre au cours des dernières années pour mieux détecter et prendre en charge les situations de vulnérabilité ainsi que pour améliorer la connaissance du phénomène. Un rapport d'étude épidémiologique sur le suicide au sein des services de police, remis en juin 2010 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), a notamment conduit à une coordination renforcée de l'ensemble des professionnels de soutien (médecins de prévention, assistants de service social, psychologues...). Une instruction du 13 novembre 2012 du directeur général de la police nationale, complétée par une note du 20 mars 2013, a permis d'instituer progressivement 90 « pôles de vigilance » dans les services territoriaux de police. Ces « pôles de vigilance » constituent des espaces de partage d'informations sur des situations individuelles à risque, entre professionnels de soutien et dans le respect des règles déontologiques propres à chaque profession. Les recommandations du rapport d'audit sur la prévention du suicide chez les personnels des forces de sécurité intérieure, réalisé par les inspections générales de l'administration, de la police nationale et de la gendarmerie nationale et remis début 2013, ont été pour la plupart mises en oeuvre : réforme de la procédure de recrutement avec un temps de parole suffisant pour les psychologues lors des jurys de sélection, de manière à déceler, dès la phase du concours, les profils psychologiques fragiles ; intensification de l'offre de formation sur la prise en compte des risques psycho-sociaux et la prévention du suicide ; proposition systématique d'organisation par le SSPO de séances, dans les services, de « defusing » (premier récit à chaud et spontané) ou de « débriefing » (second récit au-delà des premières 48 heures post-évènementielles) suite à un événement marquant ou traumatisant. Afin d'améliorer encore le fonctionnement du SSPO, les recommandations du rapport d'audit sur ce service, réalisé conjointement par les inspections générales de l'administration, des affaires sociales et de la police nationale et rendu au printemps 2014, sont en cours d'application. L'optimisation du fonctionnement du SSPO nécessite notamment des recrutements complémentaires et ciblés, destinés à améliorer le maillage territorial par les psychologues en calibrant leur présence en fonction de la répartition des effectifs de police. Une supervision médicale des conditions de prise en charge pluridisciplinaire des personnels de police en situation de fragilité est en cours d'organisation. En outre, des « enquêtes environnementales » sont désormais réalisées afin d'améliorer la compréhension du passage à l'acte. D'autres actions ont été menées en 2014 : réalisation d'un « guide pour la santé et la sécurité au travail dans la police nationale » au bénéfice de tous les personnels de police ; expérimentation d'un dispositif de réduction du risque suicidaire par le déploiement de casiers individuels dans certains départements, afin d'encourager le dépôt volontaire de l'arme individuelle à la fin d'une vacation, etc. Pour aller plus loin, notamment face à la hausse du nombre de suicides recensés en 2014, le ministre de l'intérieur a réuni le 28 janvier les représentants des syndicats de policiers afin de leur présenter des mesures destinées à renforcer la prévention du suicide. Le ministre a notamment décidé : le recrutement, à compter de février 2015, de sept psychologues supplémentaires au sein du SSPO ; la création de six postes supplémentaires de psychologues cliniciens pour accompagner les élèves policiers de tous grades durant leur scolarité ; la diffusion d'une instruction sur le caractère obligatoire des visites médicales, le rappel des fréquences de ces consultations et l'obligation pour les chefs de service de s'assurer que les personnels répondent aux convocations des médecins de prévention ; l'identification, au sein des services, de « référents » spécifiquement chargés de l'accompagnement des personnels ; la poursuite des travaux relatifs aux cycles de travail afin de mieux concilier vie professionnelle et vie privée. L'ensemble de ces mesures fera l'objet d'un suivi et d'une évaluation tous les quatre mois, en présence des syndicats de policiers.