14ème législature

Question N° 72852
de Mme Virginie Duby-Muller (Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Savoie )
Question écrite
Ministère interrogé > Finances et comptes publics
Ministère attributaire > Finances et comptes publics

Rubrique > TVA

Tête d'analyse > recouvrement

Analyse > fraudes. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 20/01/2015 page : 323
Réponse publiée au JO le : 19/01/2016 page : 594

Texte de la question

Mme Virginie Duby-Muller attire l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur le sujet de la fraude à la TVA. À l'échelle de la France, l'ampleur de la fraude est, en effet, sujet à controverse. La Commission européenne chiffre le manque à gagner pour l'hexagone à 25 milliards d'euros soit 15 % de ses recettes totales de TVA alors que le ministre des finances l'estime depuis plusieurs années à une dizaine de milliards. Selon les données du fisc, environ un quart de cette somme fait l'objet de redressements mais les montants effectivement encaissés restent inconnus. Cependant, selon les députés Alain Bocquet et Nicolas Dupont-Aignan, « moins de 1 % des sommes redressées est recouvré ». Les pouvoirs publics dans notre pays semblant - selon eux - avoir du mal à détecter et à poursuivre efficacement la fraude à la TVA comme à en recouvrer le produit, elle lui demande quelles mesures il entend prendre afin de lutter plus efficacement contre cette incompréhensible perte de recettes pour l'État français qui devrait trouver là un moyen d'assainir la dette publique.

Texte de la réponse

Lutter contre la fraude fiscale est une priorité absolue quels que soient les types de fraudes et l'impôt concerné. S'agissant de l'évaluation de la fraude la plus grande prudence s'impose. Ainsi la Commission européenne fait-elle état d'un montant pour la France de 25 milliards d'euros pour l'année 2012 ; mais il s'agit en fait d'une estimation économétrique d'un manque à gagner. En effet, la Commission européenne a évalué en 2009 l'écart de TVA, à l'échelle communautaire, entre 90 et 113 milliards d'euros par an, soit une perte de recettes théoriques de 12 % sur la période 2000-2006. Elle a évalué cet écart de TVA pour la France, entre 6 et 8 %, soit un manque à gagner théorique allant de 5,2 milliards d'euros en 2000 à 9,8 milliards d'euros en 2006. La méthode retenue, dite « top down », consiste à comparer une TVA théorique issue de calculs macroéconomiques aux recettes constatées. Cet écart théorique dépasse très largement les seuls cas de fraude pour prendre en compte par exemple les simples erreurs ou tout événement se traduisant par le non-versement d'une TVA théoriquement due (faillite de l'entreprise, restes à recouvrer, etc.), la Cour des comptes a estimé quant à elle à 10 milliards le coût de la fraude à la TVA en France en 2006. Mais il s'agit également d'une approche économique. Cela étant et quelles que soient les difficultés d'approche chiffrée du montant de la fraude, des mesures considérables ont été prises. Elles portent sur les moyens d'investigation de l'administration : une police fiscale a été créée et son champ d'action renforcé, le droit de contrôle de l'administration fiscale est désormais accompagné de la communication de la comptabilité sous forme dématérialisée, le droit des perquisitions fiscales a été modernisé, le droit de communication pourra être exercé sans être obligé de désigner le nom du contribuable. Par ailleurs, des progrès sensibles ont été réalisés dans l'échange d'informations avec les administrations fiscales étrangères. Ainsi un fichier dit « eurofisc » recense toutes les entreprises identifiées par les États membres de l'Union européenne (UE) comme ayant participé à un carrousel TVA. Diverses dispositions prises en matière d'assistance administrative internationale ont permis également un développement considérable des demandes en matière de TVA transmises par les autorités françaises à ses homologues de l'UE. Elles sont ainsi passées de 3 576 en 2012 à 4 406 en 2014, soit une hausse de 23 %. Au surplus, plusieurs mesures législatives destinées à lutter contre des fraudes à la TVA ont été adoptées telles que : la remise en cause de la TVA déduite, lorsque l'entreprise qui acquiert un bien « savait ou ne pouvait ignorer » que par son acquisition, elle participait à une fraude consistant pour le vendeur de ce bien à ne pas reverser la taxe due à raison de cette livraison (art. 272-3 du code général des impôts) ; dans le secteur du bâtiment, l'obligation pour l'entrepreneur principal d'auto-liquider la TVA de ses sous-traitants afin d'éviter de générer, le cas échéant, des déductions indues et a fortiori des remboursements indus de crédits de TVA ; la réforme du dispositif du quitus fiscal pour mettre fin aux fraudes à la TVA sur les véhicules d'occasion : le vendeur d'un véhicule d'occasion acquis préalablement à l'étranger devra désormais justifier le régime TVA appliqué par le vendeur étranger initial, titulaire du certificat d'immatriculation ; l'obligation pour les entreprises du bâtiment de déposer pendant les deux années de leur existence des déclarations de TVA mensuelles ou trimestrielles plutôt qu'une déclaration annuelle comme c'est le cas actuellement. Par ailleurs, l'administration fiscale a renforcé son dispositif de repérage de la fraude en créant en 2013 un service spécialisé dans l'analyse prédictive de données numériques (« data mining »). Ses travaux sont ciblés sur la TVA. Enfin, a été mise en place en mars 2014 une « task-force », qui réunit tous les services de l'État qui sont concernés par les fraudes à la TVA (douanes, Tracfin, direction générale la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, douane judiciaire, autorités judiciaires et services d'enquêtes, direction nationale des enquêtes fiscales, etc.). Les réunions mensuelles de ces services permettent aux membres d'échanger sur leurs pratiques, l'émergence de nouveaux procédés de fraude et d'identifier des affaires nécessitant une coordination nationale entre eux. Au total, tous les moyens sont mis en œuvre pour lutter efficacement contre les fraudes à la TVA.