14ème législature

Question N° 72924
de M. Hervé Féron (Socialiste, républicain et citoyen - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Commerce, artisanat, consommation et économie sociale

Rubrique > commerce et artisanat

Tête d'analyse > débits de tabac

Analyse > revendications.

Question publiée au JO le : 27/01/2015 page : 475
Réponse publiée au JO le : 09/06/2015 page : 4308
Date de changement d'attribution: 03/02/2015
Date de renouvellement: 12/05/2015

Texte de la question

M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur l'instauration du paquet neutre de cigarettes. Cette mesure, inscrite dans le projet de loi de santé avec l'objectif d'une mise en circulation de ces nouveaux paquets début 2016, vise à rendre le tabac moins attractif, notamment auprès des plus jeunes. Il s'agit de standardiser la présentation extérieure des paquets et de limiter l'indication de la marque à une inscription plus discrète qu'actuellement. S'il ne conteste pas le bien-fondé de cette disposition en termes de santé publique, il s'interroge sur son efficacité alors que le tabac est vendu en France derrière le comptoir des buralistes contrairement à certains pays anglo-saxons où il peut être acheté librement dans des commerces ou des distributeurs automatiques avec un effet marketing plus important auprès des fumeurs. Il tient également à souligner les risques financiers qui pourraient en résulter pour l'État. En effet, les fabricants dénoncent une atteinte manifeste à leur droit de propriété intellectuelle qui pourrait conduire à l'octroi d'indemnités évaluées par les cigarettiers à près de 20 milliards d'euros pour la France. Il note que l'Australie, seul pays à avoir mis en place le paquet neutre en décembre 2012, fait actuellement l'objet de poursuites devant l'Organisation mondiale du commerce par plusieurs pays producteurs de tabac. Par ailleurs, si les autorités australiennes mettent en avant une baisse du nombre de fumeurs de 15,1 % à 12,8 % de la population entre 2010 et 2013, cette diminution semble davantage liée à l'explosion du prix des cigarettes. Une hausse de 12,5 % de leur coût en décembre 2013 a en effet porté le prix du paquet à 13 euros. Un cabinet d'audit international a par ailleurs relevé que les ventes de cigarettes au marché noir avaient explosé. Les douanes australiennes ont enregistré 76 fraudes en 2013 avec 200 millions de cigarettes saisies contre seulement 55 fraudes détectées en 2012 et 82 millions de cigarettes saisies. Il s'interroge également sur l'opportunité de cette mesure alors que le secrétaire d'État, auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget chargé des finances s'attache à lutter contre le marché parallèle de tabac à travers l'interdiction des achats sur Internet ou encore la baisse du nombre de cartouches importables. L'instauration du paquet neutre risque en effet de renforcer ces ventes extra-légales, la contrefaçon étant rendue plus aisée par cette harmonisation et la simplification de la présentation des paquets. Le marché parallèle représente désormais, suivant une étude du cabinet KPMG, 25,2 % de la consommation française de cigarettes, soit une hausse de 11 % en un an. En 2013, les ventes légales ont baissé de 7,5 % en volume, occasionnant une perte fiscale pour l'État de l'ordre de 3 milliards d'euros et la fermeture de 722 bureaux de tabac sur l'ensemble du territoire. Par ailleurs, les ventes transfrontalières ont progressé de 36 % entre 2012 et 2013. Dans ce contexte difficile pour les buralistes français qui subissent la concurrence des pays limitrophes, il lui semble préférable que le paquet neutre s'applique dans l'ensemble des États membres de l'Union européenne afin d'en limiter l'impact pour les distributeurs nationaux et de coordonner les efforts en matière de lutte contre la contrefaçon. Il lui demande ainsi les mesures envisagées par le Gouvernement afin que la mise en circulation des paquets neutres ne nuise pas au réseau français de buralistes, qui proposent de nombreux services annexes dans un souci de proximité.

Texte de la réponse

Les augmentations des prix des tabacs manufacturés, conjuguées à l'évolution de la fiscalité sur ces produits, participent à la réduction de la prévalence tabagique, notamment auprès des plus jeunes consommateurs. Ces hausses ont eu pour effet de provoquer une diminution progressive du volume des ventes de tabac depuis 2002, avec un effet direct sur la consommation de tabac en France. Dans le cadre du plan national de réduction du tabagisme présenté le 25 septembre 2014, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a souligné la nécessité d'instaurer le paquet de cigarettes neutre pour le rendre moins attractif auprès des jeunes. L'amendement gouvernemental relatif à l'introduction du paquet neutre pour les produits du tabac a été notifié à la Commission européenne le 5 mars 2015. La publication de l'arrêté du 24 février 2015 prévoyant l'élargissement des avertissements sanitaires sur les unités de conditionnement et insérant un pictogramme destiné aux femmes enceintes, constitue une mesure forte pour réduire la prévalence tabagique. En ce qui concerne la lutte contre la contrebande de tabac et les achats transfrontaliers illégaux, elle demeure une priorité d'action pour la direction générale des douanes et droits indirects. En 2014, les services douaniers ont ainsi saisi 423 tonnes de tabac de contrebande. Pour lutter contre le marché parallèle, le Gouvernement, avec la circulaire du 3 septembre 2014, a abaissé de 10 à 4 cartouches de cigarettes les quantités indicatives que peut détenir un particulier pour sa consommation personnelle. La législation nationale prévoit que les tabacs acquis par un particulier dans un autre Etat de l'Union européenne et qui ne sont pas destinés à sa consommation personnelle sont soumis au paiement des minima de perception du droit de consommation prévus à l'article 575 A du code général des impôts (CGI), soit 210 € pour 1 000 unités de cigarettes au 1er janvier 2015, sans préjudice des sanctions prévues aux articles 1791, 1791 ter et 1810 du même code. Ces dernières peuvent consister en une pénalité, représentant 1 à 5 fois le montant des droits fraudés, une amende pouvant atteindre 750 €, ainsi que la confiscation des tabacs et d'une peine d'1 an d'emprisonnement dans les cas les plus graves. Le Gouvernement a également annoncé un renforcement de la lutte contre les achats et ventes de tabacs par internet par la mise en oeuvre d'un plan d'action spécifique. Le premier axe de ce plan a nécessité une évolution législative de l'article 568 ter du CGI, adoptée au Parlement dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2014, afin d'interdire non seulement la vente de tabac à distance, mais également son acquisition lorsque la vente est transfrontalière. Le second axe repose sur un dispositif de contrôles plus efficace grâce à un partenariat renforcé avec les opérateurs de fret express et postal. Parallèlement, l'Etat reste particulièrement attentif à la situation des buralistes. Les contrats d'avenir signés depuis 2003 avec la confédération nationale des buralistes ont pleinement joué leur rôle de soutien à l'activité des débitants de tabac. Le contrat d'avenir en cours prévoit une augmentation annuelle de la rémunération nette liée à la vente de tabac sur la période 2012-2016. Cette rémunération est portée de 6,5 % à 6,9 % du chiffre d'affaires sur la durée du contrat pour les produits du tabac autres que les cigares et cigarillos, pour lesquels le taux net de la rémunération est de 7 %. En outre, les diverses aides à l'activité ou à la reconversion ont été reconduites, en privilégiant notamment les débitants les plus en difficultés ou frontaliers. Avec la mise en place d'une prime de service public de proximité d'un montant maximal de 1 500 € par an, ce contrat consacre également le rôle important des buralistes, comme le premier réseau de commerces de proximité, notamment en zone rurale, et favorise leur diversification. Cette diversification se traduit par l'exercice d'activités telles que la réception de colis, l'offre de presse et le commerce alimentaire de proximité. Ainsi, de 2012 à 2014, au titre des 3 premières années de la mise en oeuvre du 3e contrat d'avenir, les diverses aides de l'Etat représentent un montant total de près de 250 M€ pour l'ensemble des débitants de tabac.