14ème législature

Question N° 73564
de M. Jean-Pierre Barbier (Union pour un Mouvement Populaire - Isère )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > déchets, pollution et nuisances

Tête d'analyse > eau

Analyse > pollutions agricoles. nitrates. politiques communautaires.

Question publiée au JO le : 10/02/2015 page : 829
Réponse publiée au JO le : 09/06/2015 page : 4291
Date de renouvellement: 19/05/2015

Texte de la question

M. Jean-Pierre Barbier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les nombreuses sources d'inquiétudes du monde agricole concernant l'application de la nouvelle « Directive Nitrates ». Le 13 juin 2013, la France a été condamnée par la cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sur l'insuffisance de délimitation de ses zones vulnérables. La révision du classement des zones vulnérables de 2012 répondait en partie aux insuffisances constatées dans l'arrêt de la CJUE. Afin d'éviter toute nouvelle condamnation qui conduirait à de lourdes sanctions financières pour la France, le Gouvernement s'est engagé à réviser les zones vulnérables adoptées en 2012 en appliquant tous les critères fixés par la directive 9/676/CEE d'ici le début 2015. Il semblerait que la formule de calcul de la dose d'azote à apporter aux cultures pour 2015, relative à la nouvelle « Directive Nitrates », oblige certains exploitants agricoles à moins produire par rapport aux années précédents. Les exploitants agricoles souhaitent appliquer de bonne foi la réglementation en vigueur, sans que celle-ci devienne un véritable préjudice économique pour la filière agricole. Les agriculteurs ont besoin de retrouver confiance dans l'avenir et d'être soutenus pour relever les défis alimentaires, environnementaux, énergétiques et sociaux de demain. En conséquence, il lui demande quelles mesures le Gouvernement compte mettre en œuvre pour soutenir les exploitants agricoles dans leur activité et il l'interroge également sur la possible existence de dispositifs pour accompagner les agriculteurs en zone vulnérable, afin de mettre leurs installations aux normes et d'adapter leurs pratiques de manière à améliorer la qualité des eaux superficielles et souterraines.

Texte de la réponse

La France a été condamnée par la cour de justice de l'Union européenne (CJUE), le 13 juin 2013, sur l'insuffisance de délimitation de ses zones vulnérables. La révision du classement des zones vulnérables de 2012 répondait en partie aux insuffisances constatées dans l'arrêt de la CJUE du 13 juin 2013. Toutefois, certaines règles utilisées pour cette délimitation sont toujours contestées par la Commission européenne et pourraient mener très rapidement à une condamnation en manquement sur manquement avec sanctions financières, si l'affaire devait à nouveau être portée devant la CJUE. L'arrêté du 5 mars 2015 est pris en application du décret du 5 février 2015 relatif à la désignation et à la délimitation des zones vulnérables en vue de la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole. Ces textes ont été élaborés pour consolider la réglementation française et préciser les critères de désignation des zones vulnérables. Ces textes traduisent les critères utilisés pour la révision engagée à l'automne 2014, rendue nécessaire par l'arrêt de la CJUE de juin 2013. L'arrêté précise les critères et méthodes d'évaluation de la teneur en nitrates des eaux permettant d'identifier celles qui doivent être classées en zone vulnérable : - les teneurs en nitrates sont calculées sur la base du percentile 90 : les 10 % de valeurs les plus élevées ne sont pas prises en compte (article 1) ; - si les teneurs sont supérieures à 40 mg/l et en l'absence de tendance à la baisse, l'eau est considérée comme susceptible d'être polluée (article 2) ; - le seuil définissant une eau superficielle susceptible d'être eutrophisée : 18 mg/l (article 3). Ce dernier critère de classement est exigé par la Commission européenne, alors qu'il n'était jusqu'alors pas retenu par la France. La valeur du seuil caractérisant ce risque d'eutrophisation continentale a été fixée en cohérence avec les valeurs utilisées par les bassins pour la prise en compte de l'eutrophisation littorale et marine pour le classement de 2012. En outre, une expertise scientifique est engagée par le centre national de la recherche scientifique, l'institut national de la recherche agronomique, l'institut de la recherche en sciences et technologie et l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer pour mieux caractériser les facteurs entraînant l'eutrophisation des eaux. L'arrêté précise aussi les modalités de désignation et de délimitation des zones vulnérables : - pour les eaux souterraines, le classement se fait en respectant les limites communales, sauf lorsque le fonctionnement hydrogéologique de la masse d'eau permet de ne classer que la partie polluée (article 4) ; - pour les eaux superficielles, une délimitation infracommunale est possible, elle s'appuie sur les limites des bassins versants des masses d'eau (article 5). Via ce dernier point, l'arrêté permet ainsi l'application d'une des adaptations du zonage à la réalité des situations qui consiste à prendre en compte les limites des bassins versants alimentant les masses d'eau superficielles, ce qui évite de classer tout le territoire communal. Les arrêtés des préfets de bassin définissant les zones vulnérables ont été basés sur ces textes et intègrent les retours de la consultation, notamment sur l'exclusion des « erreurs ponctuelles ». Le programme d'action national et les programmes d'action régionaux, qui le renforcent sur certains points, prennent en compte les principes agronomiques dans la définition des exigences imposées par la directive « nitrates ». Ainsi, l'équilibre de la fertilisation azotée est un point central des programmes d'action. Afin de le respecter, le calcul des doses à apporter s'appuie sur une méthode nationale adaptée par des paramètres locaux et sur les rendements moyens constatés chez les agriculteurs. La baisse des rendements ou le plafonnement des doses d'azote ne sont pas des mesures retenues dans les programmes d'actions. Les échanges se poursuivent avec la Commission européenne pour ajuster les programmes d'actions applicables à l'intérieur des zones vulnérables, notamment sur la question de la fertilisation sur les sols en forte pente et les possibilités de stocker au champ les fumiers compacts pailleux. Dans les nouvelles zones vulnérables établies en 2015, des diagnostics d'exploitation seront financés afin de déterminer les capacités nécessaires tout en recherchant des solutions pour limiter les investissements y compris en termes de changement de pratiques d'élevage ou agronomiques. Cette démarche s'appuiera sur les principes de l'agro-écologie. Là où ils seront néanmoins nécessaires, les investissements de mise aux normes des capacités de stockage des effluents d'élevage seront aidés afin d'accompagner les éleveurs dans le respect de cette nouvelle norme. Les délais et les modalités de ces mises aux normes font actuellement l'objet de discussions avec la Commission européenne dans l'objectif de concilier au mieux l'efficacité des mesures pour la préservation de la qualité de l'eau et la conduite de leur exploitation par les agriculteurs. Dans les zones vulnérables établies en 2012, les travaux de mise aux normes seront financés selon le même principe mais devront être terminés en octobre 2016. Dans les zones vulnérables établies en 2007, l'application des nouvelles normes peut conduire à la réalisation de capacités de stockage supplémentaires. Une aide de minimis sera mise en oeuvre en 2015 pour les exploitations les plus fragilisées afin d'accompagner les éleveurs. Ce dispositif est le seul permettant de répondre aux délais très contraints.