14ème législature

Question N° 73566
de Mme Brigitte Allain (Écologiste - Dordogne )
Question écrite
Ministère interrogé > Défense
Ministère attributaire > Défense

Rubrique > défense

Tête d'analyse > armée

Analyse > militaires et civils. pathologies liées aux essais nucléaires. reconnaissance. perspectives.

Question publiée au JO le : 10/02/2015 page : 837
Réponse publiée au JO le : 31/03/2015 page : 2500

Texte de la question

Mme Brigitte Allain attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la reconnaissance et l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Si la loi Morin a constitué un premier pas important dans la reconnaissance des victimes des essais nucléaires, elle n'a pas encore atteint ses objectifs comme a pu le souligner le Rapport présenté par les sénateurs Mme Corinne Bouchoux et M. Jean-Claude Lenoir : simplifier, reconnaître et indemniser. Cinq ans après la promulgation de la loi Morin, les juridictions mettent en avant l'insuffisance de la méthode statistique du CIVEN qui ne permet pas d'apporter la preuve matérielle que le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être qualifié de négligeable. La stricte application du principe de présomption pour toutes les victimes ayant une maladie radio-induite est pourtant inscrite dans le texte. La loi de programmation militaire de 2013 a introduit des modifications mais n'a pas supprimé la méthodologie préconisée par l'AIEA qualifiée de « nid à contentieux » par le rapport des sénateurs Bouchoux et Lenoir. Les familles mènent un combat incessant pour obtenir ce que la justice leur doit : vérité et justice. Elles ont encore trop souvent à faire face à des procédures judiciaires interminables qu'il faut aménager urgemment. Elle souhaite donc connaître les solutions qu'il entend mettre en œuvre pour modifier les conditions requises à l'obtention d'une véritable reconnaissance de la France et mettre un terme à une situation inacceptable depuis trop longtemps.

Texte de la réponse

Le Gouvernement suit avec la plus grande attention le dossier relatif aux conséquences sanitaires des essais nucléaires français et a, notamment, décidé l'indemnisation des personnes atteintes de maladies radio-induites provoquées par les essais nucléaires réalisés par la France, entre 1960 et 1996, au Sahara et en Polynésie française. La loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 modifiée relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français a ainsi créé un régime de réparation intégrale des préjudices subis par les victimes des essais nucléaires français, quel que soit leur statut (civils ou militaires, travailleurs sur les sites d'expérimentations et populations civiles, ressortissants français ou étrangers). Ce cadre juridique permet à toute personne atteinte d'une pathologie radio-induite figurant parmi les vingt-et-une maladies listées en annexe du décret n° 2014-1049 du 15 septembre 2014 relatif à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, ayant séjourné ou résidé, au cours de périodes déterminées, dans l'une des zones géographiques énumérées par la loi et le décret précités, de constituer un dossier de demande d'indemnisation. Les demandes individuelles d'indemnisation sont soumises à un comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) qui, conformément à l'article 13 du décret susmentionné, définit la méthode qu'il retient pour formuler ses décisions en matière d'indemnisation. Cette méthode s'appuie sur celle recommandée par l'agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), ainsi que sur l'ensemble de la documentation scientifique disponible relative aux effets de l'exposition aux rayonnements ionisants. Le comité examine les demandes d'indemnisation se rapportant aux seules maladies listées en annexe du décret du 15 septembre 2014. Le CIVEN instruit au cas par cas les dossiers de demande d'indemnisation. En effet, il ne saurait y avoir une automaticité de la réparation, contraire au droit de la responsabilité. Si les conditions de l'indemnisation sont réunies, l'intéressé bénéficie d'une présomption de causalité, à moins qu'au regard de la nature de la maladie et des conditions de son exposition, le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable. La loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale a élevé le CIVEN au rang d'autorité administrative indépendante, dotée d'un rôle décisionnel en matière d'indemnisation, et inséré dans la loi du 5 janvier 2010 des dispositions relatives à la composition de cet organisme, aux modalités de désignation de ses membres et d'exercice de leur mandat, propres à garantir son indépendance. Par conséquent, il n'appartient plus au ministre de la défense de décider d'attribuer ou non des indemnisations aux demandeurs sur le fondement des recommandations du comité. Dorénavant, le CIVEN, qui n'a à recevoir d'instruction de la part d'aucune autorité dans l'exercice de ses attributions, statuera lui-même sur les demandes. A cet égard, il convient de préciser que depuis la publication du décret du 24 février 2015 portant nomination des nouveaux membres, le président du CIVEN est désormais seul compétent pour signer les décisions d'octroi ou de refus d'indemnisation. Enfin, il est précisé que la commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires, prévue par l'article 7 de la loi du 5 janvier 2010, dont les réunions se dérouleront dorénavant sous la présidence de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, continuera d'assurer un suivi de l'application de la loi et pourra faire des recommandations au Gouvernement s'agissant en particulier d'éventuelles modifications de la liste des maladies radio-induites.