14ème législature

Question N° 74932
de M. Hervé Pellois (Socialiste, républicain et citoyen - Morbihan )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > déchéances et incapacités

Tête d'analyse > curatelle

Analyse > prise en charge. perspectives.

Question publiée au JO le : 03/03/2015 page : 1444
Réponse publiée au JO le : 15/12/2015 page : 256
Date de signalement: 06/10/2015
Date de renouvellement: 29/09/2015

Texte de la question

M. Hervé Pellois attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les zones de flou qui subsistent autour du mandat d'administrateur légal d'un majeur protégé. Choisi en fonction des garanties d'aptitude qu'il présente pour assurer la gestion des biens du majeur protégé, l'administrateur légal est désigné par le juge parmi ses parents et alliés. Une fois désigné, il adresse chaque année au juge des tutelles le bilan de gestion des comptes du majeur concerné. Or il arrive que le juge des tutelles néglige ce contrôle et ne fournisse aucune indication de bonne gestion à l'administrateur légal. Par ailleurs, quand le mandat d'administrateur prend fin suite au décès du majeur protégé, l'administrateur dispose de trois mois pour rendre le bilan de gestion alors même que le juge des tutelles est immédiatement dessaisi du dossier. Le mandataire ignore donc vers qui se tourner pour les requêtes susceptibles d'exister, comme par exemple pour réclamer un dédommagement des frais engendrés. En effet, bien que l'article 419 du Code civil dispose que l'exerce de cette charge est effectué à titre gratuit, il précise néanmoins que le juge peut autoriser le versement d'une indemnité. Enfin, au terme de sa mission, le mandataire peut demander à un notaire d'assurer la succession de la personne décédée, lequel choisit parfois de faire appel à un généalogiste successoral professionnel pour retrouver les héritiers. Or les commissions touchées par ces professionnels sur les parts d'héritage peuvent être démesurées (allant parfois jusqu'à 30 %), car il n'existe pas de barème officiel en la matière. Plutôt que les héritiers, il serait préférable que le notaire lui-même prenne en charge les honoraires du généalogiste, pour avoir fait le choix de recourir à ses onéreux services. Après avoir attiré son attention sur les difficultés auxquelles sont confrontés les administrateurs légaux de majeurs protégés, il souhaiterait connaître les pistes de réforme qui pourraient être envisagées dans la droite ligne de la réforme des professions réglementées à l'examen au Parlement.

Texte de la réponse

La loi du 5 mars 2007, portant réforme de la protection juridique des majeurs, définit la mission de la personne chargée de l’exercice de la mesure de protection, qui peut être un proche de la personne protégée ou, à défaut, un professionnel désormais dénommé, mandataire judiciaire à la protection des majeurs. Les articles 510 et 511 du code civil prévoient notamment que le tuteur établit chaque année un compte de sa gestion auquel sont annexées toutes les pièces justificatives utiles. Ce compte est en principe soumis chaque année au greffier chef, sauf si le juge décide de confier cette mission de contrôle au subrogé tuteur ou au conseil de famille ou à un technicien. Le juge des tutelles peut également décider, lorsque la mesure est exercée par un proche de la personne protégée et en considération de la modicité des revenus et du patrimoine de cette dernière, de dispenser le tuteur d’établir le compte de gestion et de le soumettre à l’approbation du greffier en chef. Les dispositions du code civil, complétées par le décret no 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle et pris en application des articles 452, 496 et 502 du code civil, précisent en outre les actes de gestion que le tuteur peut accomplir seul et ceux qui nécessitent une autorisation du juge ou du conseil de famille. Afin d’accompagner les proches dans l’exercice des mesures de protection, la loi du 5 mars 2007, précitée, a prévu qu’ils pouvaient solliciter une formation, dispensée par des personnes et des structures dont la liste est établie et mise à jour par le procureur de la République après avis des juges des tutelles de son ressort. En outre, les associations tutélaires ont élaboré en concertation avec les services de la chancellerie un guide pratique à destination des tuteurs familiaux, disponible sur les sites internet de ces associations. Ces dispositions ne préjudicient pas à la possibilité de saisir le juge en charge de la mesure de toute difficulté rencontrée dans l’exercice de sa mission. Le décès de la personne protégée mettant fin à la personnalité juridique, la mesure de protection juridique n’a plus lieu d’être. Dès lors il résulte des dispositions des articles 418 et 443 du code civil que la mesure de protection ainsi que, sans préjudice de l’application des règles de la gestion d’affaires, la mission de la personne chargée de la protection, prennent fin. La gestion du patrimoine du défunt relève alors des dispositions relatives au droit des successions. Il n’appartient donc plus au juge des tutelles ou au conseil de famille de se prononcer sur un éventuel dédommagement des frais engendrés pour le proche qui exerçait la mesure, par le décès du majeur protégé, sur le fondement de l’article 419, qui pose le principe de la gratuité de l’exercice d’une mesure de protection judiciaire par les proches mais leur permet de solliciter le versement d’une indemnité en considération de l’importance des biens gérés ou de la difficulté d’exercer la mesure. Le proche précédemment chargé de la protection pourra se tourner vers le notaire chargé de la succession. Le dispositif de protection juridique des majeurs comporte néanmoins des dispositions spécifiques afin de faciliter le règlement de la succession du défunt. Ainsi, il résulte des dispositions de l’article 514 du code civil que le tuteur doit remettre dans les trois mois de la fin de sa mission, aux héritiers de la personne protégée, une copie du compte de gestion des opérations intervenues depuis l’établissement du dernier compte annuel, ainsi que des cinq derniers comptes de gestion. Il leur remet également les pièces nécessaires pour continuer la gestion ou assurer la liquidation de la succession ainsi que l’inventaire initial des biens de la personne protégée et les actualisations auxquelles il a donné lieu. De même, sont encadrées strictement les conditions de désignation du notaire ainsi que l’intervention des généalogistes lorsque la mesure n’est pas exercée par un proche. Ainsi, l’article 420 du code civil donne au mandataire judiciaire à la protection des majeurs la possibilité de délivrer un mandat de recherche des héritiers de la personne protégée avec l’autorisation préalable du juge des tutelles. L’article 1215 du code de procédure civile en réglemente les modalités. Lors du décès de la personne protégée, si celle-ci n’a pas d’héritier connu, le mandataire saisit d’abord le notaire du défunt, en vue du règlement de la succession, ou le président de la chambre départementale des notaires afin que celui-ci désigne un notaire. Si le notaire chargé du règlement de la succession ne parvient pas, en dépit de ses recherches, à identifier les héritiers du défunt, un mandat de recherche des héritiers peut alors être délivré, soit par le notaire lui-même, soit par le mandataire judiciaire à la protection des majeurs autorisé par le juge des tutelles. Cette disposition vise à contrôler les relations entre généalogistes et les mandataires à la protection juridique des majeurs, notamment afin d’éviter des conventions pré-successorales contraires aux dispositions prévues à l’article 36 de la loi no 2006-728 du 23 juin 2006, portant réforme des successions et des libéralités. En effet, il résulte de cet article que si le généalogiste veut pouvoir obtenir une rémunération de son travail ou le remboursement de ses frais, il doit en principe avoir reçu un mandat de recherche d’héritiers de la part de toute personne qui a un intérêt direct et légitime à l’identification des héritiers ou au règlement de la succession. Le mode de rémunération du généalogiste successoral mandaté par un notaire aux fins de recherche d’héritiers est contractuel, le renseignement communiqué au notaire par le généalogiste étant susceptible d’aboutir à la signature d’un ou de plusieurs contrats de révélation de succession, dont les seules parties sont le généalogiste et chacun des héritiers potentiels. La détermination du montant de la rémunération ne relève que de l’accord de volonté des contractants. Or ceux-ci, en particulier les héritiers, ne sont pas sans protection. Les termes de la convention doivent en effet être conformes à la recommandation no 96-03 en date du 20 septembre 1996, émise par la commission des clauses abusives, concernant les contrats de révélation de succession proposés par les généalogistes. Cette recommandation invite notamment à éliminer les clauses ou stipulations qui ont pour effet de laisser penser au consommateur que les bases de calcul de la rémunération sont impérativement fixées par la loi ou par une autorité et ne sauraient faire l’objet d’une libre négociation. En outre, s’agissant du coût de la prestation, la Cour de cassation considère que le juge peut réduire les honoraires du généalogiste successoral lorsque ceux-ci apparaissent exagérés au regard des services rendus. De même, la Cour de cassation a rappelé que le contrat peut être annulé lorsque l’existence de la succession devait normalement parvenir à la connaissance de l’héritier sans l’intervention du généalogiste. De son côté, la profession de généalogiste successoral est structurée autour de plusieurs organismes qui ont mené des actions d’auto-réglementation aboutissant à l’établissement de chartes professionnelles qui définissent le code de bonne conduite de la profession. Ainsi, l’activité des généalogistes obéit à des règles strictes, garantissant à la fois un juste équilibre entre les parties au contrat et la protection des héritiers.