14ème législature

Question N° 75059
de Mme Catherine Coutelle (Socialiste, républicain et citoyen - Vienne )
Question écrite
Ministère interrogé > Budget
Ministère attributaire > Budget et comptes publics

Rubrique > impôt sur le revenu

Tête d'analyse > paiement

Analyse > prélèvement à la source. perspectives.

Question publiée au JO le : 03/03/2015 page : 1416
Réponse publiée au JO le : 04/04/2017 page : 2651
Date de changement d'attribution: 07/12/2016

Texte de la question

Mme Catherine Coutelle attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget sur les difficultés croissantes auxquelles sont confrontés de nombreux foyers pour le paiement de leur impôt. Depuis 2013 et selon le rapport annuel de la Direction générale des finances publiques, on observe une recrudescence des demandes de délais ou de rééchelonnement du paiement de l'impôt. Les demandes de non-paiement de tout ou partie de l'impôt ont concerné plus d'un million de foyers en 2013. Cette situation s'explique par une situation de crise qui frappe durement mais est accentuée également par nos modalités de paiement de l'impôt elles-mêmes. En effet, le décalage entre le calcul de l'impôt et son paiement entraîne des difficultés majeures pour de nombreux contribuables. Une perte d'emploi, une situation de demandeur d'emploi qui perdure, une séparation, une perte de revenus imprévue ont des conséquences familiales et socio-économiques graves, et sont aggravées par notre système fiscal : le paiement de l'impôt, calculé sur l'année N - 2, ne tient pas compte systématiquement de ces aléa. Dans ce contexte, la mise en place d'un système de retenue à la source présenterait l'avantage de payer un montant de l'impôt fondé sur la réalité des revenus. En conséquence, elle l'interroge sur la position et les projets du Gouvernement quant au passage à un système de prélèvement à la source.

Texte de la réponse

En application de l'article 60 de la loi de finances pour 2017, le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu sera mis en œuvre à compter du 1er janvier 2018. Il s'agit d'une réforme du paiement de l'impôt, qui ne modifiera pas son barème. L'impôt restera calculé au niveau de chaque foyer fiscal de manière progressive en fonction de l'ensemble des revenus, en tenant compte de la composition du foyer, sans remettre en cause son calcul commun pour les couples soumis à imposition commune et en conservant intégralement le quotient familial. Opérationnel dans la plupart des grands pays développés, le prélèvement à la source permet de supprimer le décalage d'un an entre la perception d'un revenu et le paiement de l'impôt correspondant. Il constitue le meilleur système pour adapter en temps réel l'impôt aux changements de situation des contribuables. Il évitera ainsi d'exiger des contribuables qui subissent d'importants changements de situation professionnelle ou familiale, parfois imprévisibles, des efforts de trésorerie d'autant plus difficiles à supporter que leurs revenus sont peu élevés. A cet égard, la réforme s'inscrit dans la droite ligne des baisses d'impôt sur le revenu adoptées à l'initiative du Gouvernement, qui ont permis d'alléger de 5 milliards d'euros l'impôt sur le revenu de 12 millions de ménages aux revenus modestes et moyens depuis 2014. Pour que chacun puisse bénéficier de cette modernisation du système fiscal, la réforme a un champ d'application très large : elle couvre non seulement les salaires et les revenus de remplacement tels que les pensions de retraite et les allocations de chômage, mais aussi les revenus des professions indépendantes (commerçants, professions libérales, agriculteurs), ainsi que les revenus fonciers. Ces revenus constituent la majorité des revenus pour plus de 98 % des foyers fiscaux ; cette réforme bénéficiera ainsi à leur immense majorité. S'agissant des mécanismes retenus, il faut distinguer deux grands types de revenus. D'une part, pour les revenus salariaux et de remplacement (pensions de retraite, allocations chômage, etc.), l'impôt sera collecté par l'entreprise ou l'organisme versant les revenus, en pratique l'employeur ou les organismes sociaux, qui collectent déjà de nombreux prélèvements obligatoires, notamment les cotisations sociales et la contribution sociale généralisée (CSG). Le taux de prélèvement du contribuable sera calculé et communiqué par l'administration fiscale, qui restera le seul interlocuteur des contribuables et l'unique destinataire des informations fiscales de la déclaration de revenus. Le rôle du collecteur sera facilité par la généralisation à l'ensemble des entreprises privées au 1er janvier 2018 de la déclaration sociale nominative (DSN), qui agrège l'ensemble des déclarations sociales. La DSN permettra aux employeurs privés de recevoir automatiquement le taux de prélèvement de la part de l'administration, de calculer très simplement le montant du prélèvement à la source (par application de ce taux communiqué par l'administration fiscale au revenu net imposable déjà calculé par les logiciels et applications de paye), de déclarer la retenue opérée et de la reverser à l'administration fiscale. Pour les autres employeurs, qui bénéficieront plus tardivement de la DSN, une procédure dématérialisée spécifique simplifiée sera mise en place s'inspirant des principes de la DSN, notamment en termes de confidentialité et de simplicité. Le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu sera adapté aux situations particulières des salariés. Ainsi, pour ceux entrant dans la vie active et inconnus de l'administration fiscale, ou encore les jeunes salariés rattachés au foyer fiscal de leurs parents, un taux « neutre » dépendant du seul montant du revenu qui leur est versé sera utilisé. Le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu préservera de manière complète la confidentialité des informations personnelles des contribuables vis-à-vis des collecteurs de l'impôt à la source. Un même taux d'imposition peut refléter beaucoup de situations différentes - en termes de composition des revenus, de charges ou de situation de famille. En outre, les contribuables en couple pourront opter pour l'application d'un taux de prélèvement différent pour chacun des conjoints en fonction des revenus de chacun. Par ailleurs, les salariés qui disposent de plusieurs sources de revenus pourront aussi demander à se voir appliquer, sur leurs salaires, le taux « neutre » dépendant du seul montant de ceux-ci, à charge pour eux de verser parallèlement au prélèvement à la source un complément d'impôt à l'administration. D'autre part, pour les bénéfices des travailleurs indépendants et les revenus fonciers, l'impôt sera versé sous forme d'acomptes sur la base du dernier bénéfice connu, selon des modalités proches de celles existant aujourd'hui. Mais, comme pour les travailleurs salariés et les retraités, le décalage d'un an est supprimé. Dans tous les cas, que l'impôt soit prélevé par un collecteur ou bien versé sous forme d'acompte, en cas de changement de situation conduisant à une diminution significative de leur impôt, les contribuables pourront demander, en s'adressant aux services de la direction générale des finances publiques, une diminution de l'impôt prélevé. Par exemple, l'avantage issu d'une augmentation du quotient familial du fait d'une naissance pourra être perçu plus tôt : loin de supprimer le quotient familial, la réforme le renforcera en le rendant plus réactif. Pour les travailleurs indépendants, cette demande permettra également d'ajuster l'impôt en temps réel : ainsi, en cas d'une chute des prix agricoles provoquant une perte de revenu, les exploitants agricoles pourront ajuster leur impôt en cours d'année. Enfin, la transition vers le prélèvement à la source sera assurée de manière simple, en ne soumettant pas à l'impôt les revenus de l'année 2017 entrant dans le champ de la réforme, dès lors qu'il ne s'agit pas de revenus exceptionnels. La définition des revenus non exceptionnels figure dans la loi. Ainsi, les contribuables paieront en 2017 l'impôt sur leurs revenus perçus en 2016 et paieront en 2018 l'impôt sur leurs revenus de 2018, sans interruption de la perception des recettes par le budget de l'Etat. L'article 60 précité prévoit des dispositions particulières de lutte contre l'optimisation, évitant que des contribuables majorent artificiellement leurs revenus de l'année 2017. Les réductions et crédits d'impôt attachés à des dépenses effectuées en 2017 seront conservés : ainsi, un don accordé en 2017 à une association ouvrira droit à un avantage fiscal en 2018, sans changement par rapport à la situation actuelle. Pour de plus amples informations sur cette réforme importante, l'auteur de la question est invité à consulter son évaluation préalable sur le site performance-publique.budget.gouv.fr