14ème législature

Question N° 77030
de Mme Véronique Louwagie (Union pour un Mouvement Populaire - Orne )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, industrie et numérique
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > impôts et taxes

Tête d'analyse > politique fiscale

Analyse > fiscalité du numérique. perspectives.

Question publiée au JO le : 31/03/2015 page : 2427
Réponse publiée au JO le : 20/09/2016 page : 8469
Date de changement d'attribution: 31/08/2016

Texte de la question

Mme Véronique Louwagie attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la fiscalité du numérique. Des économistes ont réalisé pour le compte de France stratégie, une étude intitulée « La fiscalité du numérique : quels enseignements tirer des modèles théoriques ? ». L'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a identifié des catégories de défis pour la fiscalité du numérique, et propose de « redéfinir le lien entre une entreprise et un territoire (adapter le concept de « nexus »), par la définition d'un établissement permanent virtuel ». Elle souhaiterait connaître son avis sur cette proposition.

Texte de la réponse

L'importance croissante des technologies numériques conduit des entreprises à développer de nouveaux modèles économiques, qui leur permettent d'agir sur un marché sans avoir besoin d'y être présentes physiquement. Cette situation conduit à des pratiques d'optimisation, porte un fort préjudice aux finances des Etats et occasionne, de surcroît, des distorsions de concurrence entre entreprises. Forte de ce constat, et faisant de l'objectif de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales une priorité, la France s'est fortement impliquée pour que le plan d'action contre l'optimisation fiscale des entreprises (Base Erosion and Profit Shifting - BEPS) du G20 et de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) traite des défis spécifiques posés par le développement de l'économie numérique. Dans cette perspective, la task force sur l'économie numérique (TFDE), co-présidée par les Etats-Unis et la France, s'est attachée à proposer des pistes à même de relever ces derniers. Les travaux de la TFDE ont d'abord conduit à ce que le plan d'action issu du projet BEPS, dont les résultats ont été approuvés par les leaders du G20 au sommet d'Antalya des 15 et 16 novembre 2015, tienne compte de cette dimension. A cet égard, avec plusieurs partenaires européens, la France a défendu une modification de la notion actuelle d'« établissement stable », définie par le modèle de convention fiscale de l'OCDE concernant le revenu et la fortune, afin de tenir compte de la substance économique de l'activité plus que de la structure formelle adoptée par les entreprises pour la réaliser. Dans le même temps, la TFDE a convenu que certaines caractéristiques des modèles économiques reposant sur les technologies numériques sont susceptibles de conduire à des situations d'optimisation inédites qui nécessitent que les règles de territorialité et de répartition des bénéfices imposables entre juridictions fiscales soient rénovées. Elle poursuit maintenant sa réflexion à travers des discussions sur les évolutions des standards internationaux qui pourraient éventuellement être reconnues comme nécessaires dans l'avenir. Dans cette perspective, la France insiste sur le rôle prédominant joué par les internautes via les données qu'ils transmettent dans la création et la localisation de la valeur tel qu'il a été mis en évidence par le rapport de 2013 de la mission d'expertise sur la fiscalité de l'économie numérique. Au vu des modèles d'affaires en cours, la collecte massive et systématique de ces données constitue manifestement une fonction importante qui doit être prise en compte pour aménager les règles de rattachement territorial des bénéfices d'entreprises. Elle pourrait caractériser ce qu'il convient d'appeler une « présence fiscale numérique » de l'entreprise non-résidente, suffisamment significative pour donner à l'Etat de ces internautes un droit d'imposition. De même, au niveau de l'Union européenne, la France défend la mise en œuvre d'un plan d'action ambitieux permettant, à l'image du projet BEPS, de lutter contre l'optimisation fiscale dans le contexte spécifique du marché intérieur où prévalent les libertés de circulation. L'adaptation du rattachement entre l'activité économique d'une entreprise et la territorialité fiscale correspondante, mentionnée par l'auteur de la question, représente un élément essentiel de l'ensemble de ces discussions. À cet égard, il ne s'agit pas à proprement parler de créer un type d'établissement permanent spécifique, dit « virtuel », mais d'aller plus loin en développant une nouvelle approche de la territorialité adaptée au numérique.