maîtrise d'ouvrage
Question de :
Mme Michèle Bonneton
Isère (9e circonscription) - Écologiste
Mme Michèle Bonneton attire l'attention de Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur le projet d'ordonnance transposant la directive 2014/24/UE sur la passation des marchés publics qui suscite les vives inquiétudes des organisations professionnelles représentant les architectes et l'ensemble de la maîtrise d'œuvre ainsi que celles de nombreux citoyens sensibles à la qualité du cadre de vie. L'objectif affiché du projet d'ordonnance relatif aux marchés publics est de réduire la durée d'instruction des dossiers de construction qui d'une manière générale est longue. Il ne faut toutefois pas oublier que l'obligation de saisir un architecte ou de recourir à un concours ne rallonge pas de manière significative la durée de l'ensemble des procédures. Tel qu'il est rédigé, l'article 28 du projet d'ordonnance généralise les contrats associant dans un même marché, la conception, la réalisation, voire l'exploitation et la maintenance. Il modifie les conditions de recours à ce type de contrats dérogatoires prévues par l'article 18-1 de loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée dite « MOP », remettant ainsi en cause l'indépendance de la maîtrise d'œuvre, principe essentiel de la commande publique française d'architecture. En intervenant sur le champ de la loi « MOP » et de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion dite « MOLE », le projet d'ordonnance me semble aller au-delà du champ d'habilitation fixé par la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives. Par ailleurs, la généralisation des contrats dits « globaux », proposée dans le projet, en limitant la concurrence entre entreprises du BTP ainsi que la concurrence architecturale, réduit singulièrement l'accès à la commande publique pour les PME du bâtiment dans une période de crise aigüe. Elle rend les professionnels de la maîtrise d'œuvre dépendants de l'entreprise du BTP mandataire, face à laquelle elle n'est plus en mesure de défendre les intérêts du maître d'ouvrage public et va ainsi à l'encontre de la volonté de faciliter l'accès à la commande publique des artisans et PME. Le principe d'indépendance de la maîtrise d'œuvre garantie par la loi « MOP » est donc bien remis en cause. Aussi, elle demande si le projet d'ordonnance précitée s'en tiendra aux hypothèses de dérogation actuellement prévues par la loi « MOP » et ses textes d'application et limitera ainsi les risques de difficultés pour les PME que laisse entrevoir le projet d'ordonnance.
Réponse publiée le 12 mai 2015
Les directives européennes en matière de commande publique ne comportent pas de dispositions spécifiques sur les marchés de maîtrise d'oeuvre, au contraire des textes nationaux actuels. L'article 74 du code des marchés publics et les articles 41-2 des décrets d'application de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics sont des spécificités du droit français de la commande publique qui reconnaît ainsi le rôle fondamental joué par les architectes et les professionnels de la maîtrise d'oeuvre dans la conception d'un cadre de vie innovant et de qualité. Conscient de cette importance, le Gouvernement entend maintenir des dispositions spécifiques aux marchés de maîtrise d'oeuvre dans les textes réglementaires de transposition des directives. Les marchés globaux sont des contrats par lesquels une personne publique peut confier à un titulaire unique une mission globale pouvant inclure la conception, la construction, l'entretien et la maintenance des ouvrages, dont l'utilité et l'efficacité sont reconnues dans un certain nombre de cas. Ces marchés restent soumis, à la différence des partenariats public-privé, à l'interdiction du paiement différé et aux règles relatives à la maîtrise d'ouvrage publique. La transposition des directives dans le projet d'ordonnance relatif aux marchés publics constitue l'occasion de moderniser le régime des marchés globaux, afin de permettre aux personnes publiques de disposer d'un outil contractuel mieux adapté à leurs projets. Une révision des conditions de recours à ces contrats, qui sont à l'heure actuelle restrictives, est envisagée, dans le but de créer pour les personnes publiques une véritable alternative aux montages de type partenariats public-privé, réalisée sous maîtrise d'ouvrage publique et avec un financement public pour un coût moindre. Toutefois, soucieux de préserver l'indépendance de la maîtrise d'oeuvre dans le cadre de ces marchés et conscient de son rôle dans la qualité des constructions, le Gouvernement réexamine actuellement le projet d'ordonnance pour tenir compte des nombreuses observations émises dans le cadre de la consultation publique qu'il a organisée en début d'année.
Auteur : Mme Michèle Bonneton
Type de question : Question écrite
Rubrique : Marchés publics
Ministère interrogé : Logement, égalité des territoires et ruralité
Ministère répondant : Économie, industrie et numérique
Dates :
Question publiée le 21 avril 2015
Réponse publiée le 12 mai 2015