14ème législature

Question N° 79692
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > bioéthique

Tête d'analyse > procréation avec donneur

Analyse > réglementation.

Question publiée au JO le : 19/05/2015 page : 3702
Réponse publiée au JO le : 19/04/2016 page : 3440
Date de changement d'attribution: 28/01/2016

Texte de la question

M. Jacques Bompard attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la reconnaissance des enfants nés de GPA comme héritiers. Dans une lettre du 13 avril 2015, adressée au conseil supérieur du notariat, la direction des affaires civiles et du sceau a reconnu comme héritiers les enfants nés de gestation pour autrui. Cette mesure tend à légaliser la GPA. Or la GPA est une mesure ignoble de marchandisation du corps de la femme, une souffrance terrible pour l'enfant qui ne pourra pas voir sa mère naturelle, une mesure scandaleuse de la part des occidentaux qui asservissent les plus faibles. La France ne peut pas cautionner la GPA, elle ne peut non plus accepter que les enfants nés de GPA soient déclarés héritiers, parce qu'une telle mesure encouragerait ce commerce ignoble. Il lui demande une circulaire qui supprimerait ce droit et réaffirmerait l'interdiction de la GPA en France.

Texte de la réponse

Le conseil supérieur du notariat a appelé l'attention du ministère de la justice sur la situation juridique des enfants nés à l'étranger à la suite d'une convention de gestation pour autrui, et plus particulièrement sur les difficultés rencontrées par certains praticiens amenés à se prononcer sur la question de la vocation successorale de ces enfants. Par lettre du 13 avril 2015, il a été rappelé par la Chancellerie les termes des décisions rendues par la Cour européenne des droits de l'homme le 26 juin 2014 selon lesquels doit être garanti le fait que « chacun puisse établir les détails de son identité d'être humain, ce qui inclut sa filiation ». La Cour,  dans ses deux arrêts a, par ailleurs,  souligné les conséquences successorales moins favorables auxquelles sont soumis ces enfants en raison de l'absence de reconnaissance du lien de filiation les unissant à leurs parents d'intention, et considéré qu'ils se voient en conséquence privés d'un « élément lié à [leur] identité filiale ». La Cour européenne des droits de l'homme a ainsi clairement énoncé que le recours à une convention de gestation pour autrui ne peut conduire à écarter les enfants concernés de leur qualité d'héritier de la succession de leurs parents. Tel est le sens du courrier du 13 avril 2015, qui s'inscrit dans la stricte portée des arrêts précités. Les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme condamnant la France ne remettent toutefois aucunement en cause le principe de la prohibition de la gestation pour autrui, actuellement consacré aux articles 16-7 et 16-9 du code civil. Elles marquent la recherche d'un équilibre entre le principe d'ordre public de prohibition de telles conventions, qui demeure, et auquel le Gouvernement français est particulièrement attaché, et la nécessaire protection qu'il convient de garantir à l'enfant au nom de son intérêt supérieur au sens de l'article 3 paragraphe 1, de la Convention de New York du 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, et du droit au respect de sa vie privée au sens de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elles confirment ainsi la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et par là même de leur garantir, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la filiation et la nationalité française constituent des aspects essentiels. Tel est également le sens des dernières décisions rendues par l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation le 3 juillet 2015 par lesquelles celle-ci a estimé que l'existence d'un faisceau de preuves de nature à caractériser l'existence d'un processus frauduleux, comportant une convention de gestation pour le compte d'autrui, ne fait pas obstacle à la transcription de l'acte de naissance des enfants concernés, dès lors qu'il n'a pas été constaté que l'acte était irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Ces évolutions jurisprudentielles n'altèrent pas la volonté du Gouvernement de garantir le maintien du principe de la prohibition d'ordre public de la gestion pour autrui. A cet égard, le Gouvernement veille au respect de la politique pénale mise en place contre toutes les atteintes à l'ordre public, qui visent, à la fois, la lutte contre toute forme de trafic d'enfants s'apparentant à l'exploitation d'autrui et la poursuite des intermédiaires proposant des activités interdites en France.