14ème législature

Question N° 81224
de M. Denis Baupin (Écologiste - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > santé

Tête d'analyse > pollution et nuisances

Analyse > surmortalité. impact.

Question publiée au JO le : 09/06/2015 page : 4226
Réponse publiée au JO le : 29/12/2015 page : 10723

Texte de la question

M. Denis Baupin alerte Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur le bilan définitif de l'Institut de veille sanitaire (INVS) publié récemment qui pointe une épidémie de forte ampleur pendant l'hiver 2014-2015, ayant durement frappé les personnes âgées et ayant entraîné une surmortalité hivernale record de 18 300 décès en France. Il s'agit de l'excès de mortalité le plus élevé depuis la mise en place du système d'évaluation de l'excès de décès hivernal en 2006. Or la période de surmortalité hivernale coïncide parfaitement avec les semaines qui ont suivi le pic de pollution de décembre 2014. La pollution de l'air et tout particulièrement les particules fines constituent on le sait un facteur aggravant pour les personnes souffrant de pathologies, notamment respiratoires. On dénombre 42 000 morts « prématurées » par an au niveau national selon l'OMS, et selon l'étude européenne Aphekom menée dans 12 pays européens et 25 grandes villes, 6 mois de durée de vie de moins pour les parisiens et autres habitants de grandes agglomérations comme Lille et Strasbourg. Au regard de ce bilan catastrophique, lié notamment à la forte diésélisation du parc automobile français, il serait pertinent d'évaluer plus précisément l'impact des pics de pollution lors d'épisodes de surmortalité, comme ce fut le cas pendant cet hiver, avec la grippe hivernale ou la canicule de 2003 (15 000 décès selon l'INSERM dont une part significative a été attribuée à la combinaison de la canicule et de la pollution). Il demande à la ministre quelle évaluation a été faite pour le pic de cet hiver, ou à défaut s'il est dans l'intention du Gouvernement de la mener, notamment en établissant la cartographie précise de ces épisodes de surmortalité, pour voir dans quelle mesure elle correspond ou non aux zones de plus forte densité urbaine affectées par la pollution.

Texte de la réponse

Selon l’Institut de veille sanitaire (InVS), la surmortalité hivernale observée entre le 1er janvier et le 12 avril 2015, a eu lieu en deux phases : une première phase en début d’année avec un pic au cours de la semaine du 5 au 11 janvier suivi d’une légère baisse pendant 2 semaines, et une seconde phase, plus marquée entre la semaine du 26 janvier et la semaine du 4 avril, avec un pic pendant la semaine du 9 février. Cet excès de mortalité a débuté avant l’épidémie de grippe survenue sur la période du 12 janvier au 15 février, et il s’est accentué pendant l’épidémie. L’InVS mène actuellement une étude descriptive de la surmortalité observée durant l’hiver 2015 au niveau national et par région. Une cartographie de la surmortalité en France métropolitaine est envisagée dans le cadre de ces travaux. L’hiver 2014-2015 a également été l’objet de plusieurs épisodes de pollution par les particules. L’augmentation des niveaux de particules entre le 30 décembre 2014 et le 3 janvier 2015 puis entre le 5 et le 24 mars 2015, a entraîné, dans près de la moitié des départements français, le dépassement du seuil d’information et de recommandation relatif aux particules de taille inférieure à 10 micromètres (PM10), et donc le déclenchement de la procédure préfectorale associée. En application de l’instruction de la direction générale de la santé du 6 mars 2015 à l’attention des agences régionales de santé (ARS) et de l’InVS, ce sont les épisodes de pollution de l’air conduisant au dépassement des seuils d’alerte qui conduisent à une surveillance sanitaire renforcée par rapport à celle mise en place quotidiennement par l’InVS. Cependant, si la survenue d’un épisode de pollution peut entraîner l’apparition ou l’aggravation de symptômes notamment chez les personnes les plus fragiles, il est nécessaire de rappeler que l’impact sur la santé de la pollution atmosphérique résulte beaucoup plus de l’exposition à la pollution au long cours que de l’exposition lors d’épisodes ponctuels. En effet, les impacts sanitaires dus à la pollution atmosphérique sont liés pour une faible part aux épisodes de "pics"de pollution. L’InVS a, par exemple, évalué que parmi les décès toutes causes (hors causes accidentelles) et les hospitalisations pour causes cardiaques attribuables à la pollution par les particules PM10 à Paris entre 2007 et 2010, 7% étaient associés aux"pics" de pollution (dépassement du seuil d’alerte), les 93% restants étaient donc attribuables aux niveaux de particules PM10 ne dépassant pas le seuil d’alerte. Par le passé, l’InVS a mis en œuvre des études d’évaluation de la part attribuable à un épisode particulier de pollution atmosphérique dans un excès de mortalité, mais ces études s’inscrivaient dans un contexte très différent de celui de l’hiver 2014-2015 : il s’agissait de la surmortalité au cours de la canicule de 2003 qui s’était accompagnée d’un épisode de pollution à l’ozone de durée et d’intensité exceptionnelles. S’agissant de l’estimation de la part de la mortalité observée au cours de l’hiver 2014-2015 qui serait attribuable à la pollution atmosphérique, celle-ci ne pourrait s’envisager qu’à l’échelle de grandes agglomérations, échelle territoriale pertinente au regard des informations nécessaires aux analyses. La réalisation éventuelle d’une telle étude sera discutée lors de l’élaboration du programme de travail pour 2016 de la future agence nationale de santé publique.