14ème législature

Question N° 81842
de M. Fernand Siré (Les Républicains - Pyrénées-Orientales )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > élevage

Tête d'analyse > PAC

Analyse > aides. sylvo-pastoralisme. diminution. conséquences.

Question publiée au JO le : 23/06/2015 page : 4646
Réponse publiée au JO le : 04/08/2015 page : 5941

Texte de la question

M. Fernand Siré appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les vives inquiétudes des éleveurs concernant les dernières dispositions de la PAC qui prévoit de baisser les aides attribuées au sylvo-pastoralisme, portant ainsi atteinte aux exploitations de chênes et de châtaigniers qui dominent chez les éleveurs des Albères, des Aspres et du Vallespir. Dans ces bois, les troupeaux qui y paissent, entretiennent naturellement la végétation et préviennent ainsi des incendies. Ces restrictions budgétaires entraîneraient la disparition de nombreuses exploitations qui promeuvent une activité artisanale et écologique, qui font la fierté du territoire, ce à quoi il ne peut se résoudre. Aussi, il aimerait savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour soutenir les éleveurs.

Texte de la réponse

Les surfaces peu productives, notamment les châtaigneraies et chênaies, où se pratique un élevage extensif important à la fois en termes économique, environnemental et de préservation des paysages, sont désormais clairement reconnues dans la PAC. Cette reconnaissance est le fruit de la négociation conduite par le ministre chargé de l'agriculture en 2013 au niveau européen, au cours de laquelle la France a obtenu que soient reconnues comme potentiellement admissibles des surfaces adaptées au pâturage et relevant de pratiques locales établies, dans lesquelles l'herbe et les autres plantes fourragères herbacées ne prédominent traditionnellement pas. Ces surfaces font désormais partie de la catégorie des prairies permanentes. Jusqu'en 2014, ces surfaces bénéficiaient d'aides sur la totalité de la surface, mais cela s'appuyait sur des arrêtés préfectoraux pris en département concernant l'admissibilité des surfaces, dont la Commission européenne a remis en cause le contenu. En effet, la France s'est vu infliger 1,1 milliards d'euros de correction financière sur les campagnes PAC 2008 à 2012 et les reproches de la Commission sur la définition des surfaces admissibles, notamment pour les surfaces peu productives, représentent une bonne moitié de cette somme. C'est un sujet suivi de très près par la Commission européenne qui est attentive à ce qu'il soit traité correctement à partir de 2015. Ainsi, fort du principe de reconnaissance des surfaces peu productives acté dans les textes européens pour la PAC à partir de 2015, le Gouvernement est tout à la fois dans l'obligation de trouver une application pratique de ce principe qui soit bien acceptable, en détail, par la Commission européenne. Il a été possible de convaincre la Commission européenne sur la base de la méthode dite « du prorata » qui consiste à retenir comme surface éligible aux aides un certain taux de la surface réelle des parcelles. Un travail considérable a été conduit, s'appuyant sur de nombreux échanges avec les départements, et se traduit désormais par un guide national avec plus de 200 photos permettant à chaque agriculteur de savoir quel taux appliquer sur ses parcelles. Ce guide comprend notamment plusieurs photos reprenant des cas concrets du département des Pyrénées-Orientales. Ce travail a été conduit le plus finement possible et au plus près du terrain. Dans ce cadre, pour les châtaigneraies et chênaies, des proratas ont pu être déterminés. Ils sont en général de 35 % ou de 60 %. Cette règle d'admissibilité étant désormais arrêtée, son impact sur les aides de la PAC est plus clair. Il y a principalement trois aides concernées. Premièrement, le prorata s'applique aux surfaces qui bénéficieront de l'aide dite « découplée » qui se traduit par les droits à paiement de base (DPB). Pour cette aide, le mécanisme de convergence va permettre à tous les éleveurs qui avaient une aide à l'hectare inférieure à la moyenne de se rapprocher de la moyenne. Pour les éleveurs des Pyrénées-Orientales, l'effet bénéfique est très net. Même s'il y a moins de surfaces aidées au final vu l'application du prorata, l'aide unitaire à l'hectare va très nettement augmenter et le résultat final sera très positif. Deuxièmement, pour l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), dont l'objet est de donner un complément de revenu aux éleveurs situés dans des zones défavorisées par rapport à la plaine, l'effet concret des proratas dépendra des situations individuelles. Dans certains cas, en raison de l'application du prorata, les surfaces éligibles vont en effet diminuer et il y aura une baisse d'aide. Dans d'autres cas, comme l'ICHN était plafonnée à 50 ha jusqu'en 2014, même si les surfaces éligibles baissent, il n'y a pas d'impact. Enfin, pour d'autres cas, comme l'ICHN a par ailleurs été revalorisée dans le cadre de la réforme de la PAC, il y aura une augmentation de l'aide. C'est notamment le cas lorsque l'exploitant concerné ne bénéficiait pas en 2014 de la prime herbagère agro-environnementale (PHAE) ou en bénéficiait seulement sur quelques hectares. En effet, à partir de 2015, grâce à cette revalorisation de l'ICHN, un montant supplémentaire de 70 €/ha jusqu'à 75 hectares bénéficiera à tous les exploitants. Troisièmement, pour les mesures agro-environnementales (MAEC) qui consistent à apporter une aide aux agriculteurs en reconnaissance de pratiques favorables à l'environnement, le ministre chargé de l'agriculture a accepté la demande de la région Languedoc-Roussillon de retenir comme surface aidée la totalité des surfaces sans appliquer de prorata. Il convient de préciser qu'un tel choix était possible uniquement pour les MAEC, contrairement au cas de l'aide découplée et de l'ICHN où la réglementation européenne ne laisse aucune option. En particulier, dans les Pyrénées-Orientales, il existe une mesure importante de lutte contre l'incendie consistant à aider les éleveurs qui contribuent à l'ouverture ou au maintien d'ouverture dans les milieux boisés pâturés. La valeur unitaire à l'hectare de cette aide a été un peu augmentée en 2015 par rapport à 2014 et les surfaces éligibles seront les mêmes. Pour cette aide, le bilan est donc clairement positif. Pour apprécier le résultat global sur l'aide découplée et l'ICHN, une étude concrète sur des cas réels a été réalisée avec la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM). Elle a permis de déterminer l'effet précis de l'évolution des aides sur quelques exploitations typiques des Pyrénées-Orientales. Il ressort de ces calculs que, sur le total des aides, dans cinq cas sur sept, les exploitants seront très nettement gagnants en 2019, et, pour quatre de ces cas, le gain est net dès 2015. Deux cas sont toutefois perdants. Il s'agit d'exploitations avec de petites surfaces (autour de 50 ha) qui sont donc directement affectées par la baisse de l'ICHN (car elles atteignaient tout juste le plafond de 50 ha en 2014, maximisant ainsi leur ICHN par rapport à leur surface totale) et pas assez gagnantes dans la convergence pour que cela compense. Ces deux perdants correspondent à certaines formes particulières d'exploitations agricoles qui sont une vingtaine sur le département selon la DDTM. Un accompagnement au cas par cas va être mis en place pour cette vingtaine d'exploitations afin de trouver d'autres pistes leur permettant d'avoir un bilan plus positif. En particulier, la piste des MAEC est à l'étude, en lien avec la région.