14ème législature

Question N° 84447
de Mme Catherine Vautrin (Les Républicains - Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Finances et comptes publics
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > prestations familiales

Tête d'analyse > allocations familiales

Analyse > fraudes. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 07/07/2015 page : 5125
Réponse publiée au JO le : 22/11/2016 page : 9598
Date de changement d'attribution: 15/11/2016

Texte de la question

Mme Catherine Vautrin attire l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur la situation des fraudes des caisses d'allocations familiales. Dans un article publié dans le journal Les Echos le 2 juin dernier, on apprenait que les fraudes détectées aux caisses d'allocations familiales ont bondi de 50 % en 2014. La principale raison de cette hausse est l'augmentation des contrôles et de la lutte antifraude. Unique point de consolation, le montant total des fraudes estimées est resté stable à 1 milliard d'euros. Détecter les fraudeurs est une première étape importante mais il est maintenant temps de trouver une solution plus large qui permettra de réduire le nombre de fraudes commises aux caisses d'allocations familiales. Il s'agit également d'être certains que ces aides vont à ceux qui en ont besoin, sans empêcher le retour à l'emploi via un effet d'aubaine trop largement utilisé. Ainsi, elle lui demande quels grands axes le Gouvernement compte mettre en place afin de lutter contre la fraude touchant les services de solidarité.

Texte de la réponse

La lutte contre les fraudes à la sécurité sociale constitue un impératif au regard des objectifs d'équilibre financier de la sécurité sociale, de préservation des conditions de concurrence entre entreprises et de garantie des droits sociaux des salariés. Les actions menées en termes de lutte contre la fraude à la sécurité sociale tiennent en premier lieu à une meilleure détection de la fraude en 2015 : plus d'1 milliard d'euros de fraude ont été détectés par les organismes de sécurité sociale du régime général, de la caisse nationale du régime social des indépendants, de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole et des régimes spéciaux, soit une augmentation de plus de 17,35 % par rapport à 2014. Pour la branche famille, en 2015, le montant des fraudes détectées et sanctionnées s'élève à 247,8 millions d'euros, soit 18,22 % de plus qu'en 2014. Ce montant correspond à un volume de 39 934 fraudes, alors que 32 828 fraudes avaient été détectées en 2014, soit une augmentation de 21,66 %. Cette hausse s'explique par une intensification de la politique de contrôle et des contrôles plus efficaces, avec 4,6 millions de contrôles recensés en 2015. Elle est également liée au renforcement des collaborations partenariales, à une politique volontariste de sanction de la fraude (les caisses d'allocations familiales (CAF) ayant prononcé 35 005 sanctions en 2015 pour 39 934 fraudes constatées, soit un ratio de 87,6 %) et à une utilisation accrue des méthodes de ciblage par data mining. Des plans institutionnels de lutte contre la fraude sont mis en œuvre dans les principaux régimes : caisse nationale des allocations familiales (CNAF), caisse nationale de l'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAV), caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), caisse nationale du régime social des indépendants (CNRSI). Ces nouvelles organisations, fondées sur la création de services dédiés à la lutte contre la fraude au niveau national et sur la mise en place de « référents fraudes » dans la plupart des organismes locaux, sont naturellement plus efficaces. Pour accompagner cette nouvelle organisation, le cadre législatif et réglementaire a été modifié de manière à ce que les organismes de protection sociale disposent d'une part de moyens d'investigation plus performants et d'autre part d'une gamme de sanctions plus adaptée. Concernant les moyens d'investigation, les échanges d'informations entre les diverses institutions ont été facilités. Ainsi les organismes de protection sociale peuvent notamment partager des renseignements avec la direction générale des finances publiques pour les fraudes aux ressources et à la résidence ou les services du ministère de l'intérieur pour les fraudes documentaires et à l'identité. De plus, le répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS), créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, est désormais déployé dans l'ensemble des régimes. Les organismes de protection sociale disposent également, depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, d'un droit de communication auprès d'un certain nombre d'organismes ou d'entreprises, en particulier les établissements bancaires, les fournisseurs d'énergie et les opérateurs de téléphonie. Le Gouvernement prévoit de travailler sur plusieurs axes pour poursuivre cette amélioration des résultats. En matière de ciblage des informations, il encourage le développement de nouvelles techniques de détection reposant sur l'exploitation des données dont disposent les organismes (data mining), améliorant ainsi l'efficacité des actions de contrôle. Quant aux dispositions juridiques relatives à la lutte contre la fraude, elles ont été progressivement renforcées par les lois de financement de la sécurité sociale. Dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, le gouvernement a proposé d'harmoniser à l'ensemble des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale les moyens et prérogatives de lutte contre la fraude. Il est également proposé une mesure permettant de faciliter l'exploitation et la mutualisation des enquêtes entre branches, quel que soit le régime considéré (régime général, régime social des indépendants, mutualité sociale agricole). Le renforcement des sanctions financières administratives de la fraude constitue un autre volet des actions mises en œuvre. En 2015, les organismes de protection sociale ont augmenté de près 4 000 le prononcé de pénalités financières avec 21 359 sanctions. Le montant des pénalités financières a augmenté de 27,65 %, passant de 14,8 millions d'euros en 2014 à 18,9 millions d'euros en 2015. Cette amélioration s'inscrit dans la durée grâce aux objectifs fixés dans les conventions d'objectifs et de gestion (COG). Dans la COG conclue avec l'Etat pour la période 2014-2017, la CNAV se voit fixer des objectifs renforcés en matière de lutte contre la fraude en France et à l'étranger. D'une part, elle s'engage à mettre en œuvre une plateforme d'échange d'informations entre les différents régimes de retraite. D'autre part, l'amélioration des contrôles des pensions de retraite versées dans les Etats européens sera permise par la mutualisation des certificats d'existence des assurés. Concernant la CNAMTS, ses objectifs ont été déterminés dans la COG pour 2014-2017 : les coopérations inter-régimes et inter-institutions devront être encouragées. De plus, les contrôles devront être davantage ciblés sur les thématiques à fort enjeu financier, tout en accroissant la politique existante de mise sous accord préalable des professionnels de santé ayant réalisé un volume atypique de prescriptions ou d'actes. La COG 2013-2017 pour la CNAF définit quant à elle quatre objectifs de lutte contre la fraude : identifier les indus frauduleux sur la base de critères de qualification et de règles de comptabilisation harmonisés ; approfondir les travaux d'évaluation de la réalité de la fraude et des risques pesant sur certains dispositifs et processus de gestion ; mieux utiliser les nouvelles technologies et les rapprochements de fichiers pour prévenir et détecter les actes frauduleux ; développer les partenariats avec les autres institutions. L'amplification de la lutte contre la fraude produit des résultats, les chiffres étant en continuelle augmentation. Il convient cependant de rappeler que ces chiffres ne traduisent pas nécessairement une augmentation de la fraude mais une meilleure détection de celle-ci. Par ailleurs, le terme générique de fraude recouvre des situations très différentes et qui ne doivent pas être amalgamées. En effet, si une partie de la fraude aux déclarations sociales des entreprises traduit une volonté délibérée de contourner la législation et doit donc être sévèrement réprimée, l'ensemble des rapports souligne également l'existence de fraudes involontaires par méconnaissance des règles et de leur complexité. Enfin, il existe également ce que la CNAF qualifie de « fraude de survie », qui est en augmentation, et qui est le fait de personnes très modestes, bénéficiaires de prestations sous conditions de ressources et le plus souvent de minima sociaux et qui traduisent les difficultés sociales rencontrées par nos concitoyens. En tout état de cause, l'objectif de lutte contre la fraude demeure un objectif prioritaire assigné par le Gouvernement à l'ensemble des organismes de sécurité sociale car il contribue à l'effectivité de l'égalité d'accès aux droits mais est également de nature à rétablir l'acceptabilité des contributions sociales pour la pérennité de notre système de protection sociale universelle.