14ème législature

Question N° 86601
de M. André Chassaigne (Gauche démocrate et républicaine - Puy-de-Dôme )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > produits dangereux

Tête d'analyse > pesticides

Analyse > utilisation. conséquences. apiculture.

Question publiée au JO le : 04/08/2015 page : 5823
Réponse publiée au JO le : 17/11/2015 page : 8346

Texte de la question

M. André Chassaigne attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur l'état et les moyens consacrés aux recherches relatives à la mortalité des colonies d'abeilles. La mortalité très importante des colonies d'abeilles en France continue de menacer la pérennité de la filière apicole française, et bien au-delà, constitue une véritable menace environnementale et économique. Le plan de développement durable de l'apiculture adopté en 2012 prévoyait un cadre global d'action pour la période 2013-2015, et présentait une série de propositions concrètes d'action pour diminuer l'impact des pesticides sur la santé des colonies d'abeille. Parmi ces propositions figuraient notamment : l'amélioration du système de surveillance et d'enquêtes sur les troubles et les mortalités anormaux de colonies avec la mise en place d'un plan de contrôle ciblé de l'utilisation des produits phytosanitaires ; la mise en place d'une épidémiosurveillance des intoxications des colonies d'abeilles ; la mise en place d'une base de données des résultats de contrôles et de mesures des résidus de pesticides dans l'alimentation des colonies d'abeilles (nectar, guttation, miellat et pollen) ; l'organisation de l'exploitation des données pour estimer les niveaux d'exposition sur les territoires ; la modélisation des modes d'exposition des colonies d'abeille aux pesticides. Un certain nombre d'actions bénéficient depuis 2013 d'un soutien financier. Mais aujourd'hui, de nombreux apiculteurs, lourdement impactés par les pertes de colonies de ce dernier hiver, relèvent de nombreuses insuffisances sur les moyens, les méthodes et les procédés d'évaluation des causes de ces mortalités. Ils regrettent très souvent l'absence d'analyses sur les pollens et miels collectés, des délais de collecte des abeilles mortes trop longs et un nombre d'abeilles prélevées insuffisant, l'absence de prise en compte des pratiques apicoles sur la période précédant les mortalités (écarts de mortalité très important entre abeilles nourries et celle qui ont récolté du pollen en début de saison) ; superficialité des enquêtes de voisinage sur les pratiques agricoles et les éventuels traitements phytosanitaires effectués dans un rayon de 3 km autour des ruchers impactés Ce constat partagé interroge sur la capacité et la volonté de mise en œuvre des actions de ce plan, comme sur le contenu des résultats de la recherche sur les mortalités en lien avec l'impact des pesticides sur les colonies. En conséquence, il souhaiterait connaître sa position sur le besoin d'une évaluation objective de la recherche conduite dans ce domaine, sur la qualité des résultats déjà obtenus et sur les moyens supplémentaires indispensables à l'amélioration de la recherche publique.

Texte de la réponse

Le taux de mortalité annuel des colonies d'abeilles domestiques en France a été estimé à 23 % par le réseau de surveillance européen Epilobee. La France se situe parmi les pays européens les plus touchés par ce phénomène de surmortalité. Afin d'améliorer la protection des abeilles et de développer la filière apicole française, le plan de développement durable de l'apiculture (PDDA, 2013-2015) est porté par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. Le bilan d'étape du PDDA (juin 2015) rappelle les avancées obtenues, tant au niveau européen qu'au niveau national, pour mesurer objectivement l'activité et la santé des abeilles, diminuer l'impact des produits phytosanitaires sur leur santé, lutter contre les maladies et les prédateurs, recréer des conditions environnementales et sanitaires favorables à l'abeille. La surveillance des troubles des abeilles sur le territoire est un enjeu pour lequel plusieurs actions ont été mises en place. En premier lieu, le dispositif de surveillance des mortalités massives et brutales des abeilles destiné à objectiver l'impact et les causes des intoxications a été rénové (circulaire du 14 novembre 2014) : intervention plus rapide des services, meilleure prise en compte des mortalités hivernales, recherche d'autres causes d'intoxication que les produits phytopharmaceutiques, collecte d'éléments sur les effets non intentionnels des pratiques agricoles, prélèvements sur plusieurs matrices (abeilles mortes, miel, pain d'abeille), des enquêtes phytosanitaires dans un rayon de 3 km (distance fondée sur des données scientifiques concernant l'aire de butinage des abeilles). Une surveillance active, nommée plan « Ecotox », a également été mise en place à l'automne 2013, pour compléter le programme européen de surveillance des maladies et mortalités d'abeilles (2012-2014). Elle consiste à prélever et analyser des échantillons de miel et de pain d'abeille sur l'ensemble des ruchers impliqués dans le programme, afin d'apprécier l'exposition des colonies à plus de 100 substances actives ciblées. Une étude complémentaire en cours d'analyse avec l'appui de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), vise à établir un lien entre les taux élevés de mortalité constatés et l'exposition aux substances recherchées. Suite aux surmortalités hivernales de colonies constatées durant l'hiver 2013/2014 dans le massif pyrénéen, une étude épidémiologique nommée BAPESA, financée par l'État et confiée à l'institut de l'abeille a été lancée sur la période 2015-2017, afin d'évaluer l'exposition des colonies d'abeilles aux substances antiparasitaires et biocides utilisées en élevage et d'étudier les éventuels effets sur la santé associés. Par ailleurs, le dispositif de phytopharmacovigilance géré par l'Anses suivra les effets non intentionnels des produits phytopharmaceutiques sur la santé des abeilles et intégrera les données collectées par l'observatoire des résidus de pesticides géré par l'institut de l'abeille et financé par le programme du compte d'affectation spéciale développement agricole et rural. Avec 70 % des actions mises en oeuvre en trois ans, le PDDA est prolongé pour deux ans et réorienté sur les actions nécessitant la mobilisation des acteurs de la filière et les outils de formation. Les réflexions se poursuivent pour optimiser les aides du programme apicole européen (PAE), afin d'améliorer les conditions de production de miel, et de consolider les entreprises du secteur. Le PAE finance des actions de lutte contre le Varroa, des aides directes pour les apiculteurs, de la recherche sur la mortalité apicole et de la recherche génétique, de l'assistance technique, du conseil aux apiculteurs et la majeure partie des actions de l'institut technique de l'abeille (ITSAP).