14ème législature

Question N° 87781
de M. Jean-Pierre Decool (Les Républicains - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > santé

Tête d'analyse > vaccinations

Analyse > rupture de stocks. conséquences.

Question publiée au JO le : 01/09/2015 page : 6566
Réponse publiée au JO le : 19/01/2016 page : 485
Date de renouvellement: 05/01/2016

Texte de la question

M. Jean-Pierre Decool alerte Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la pénurie de vaccins obligatoires qui touche actuellement l'ensemble du territoire français. Le ministère a annoncé vouloir ouvrir, dès la rentrée 2015, un grand débat visant à convaincre les familles de vacciner leurs enfants. Qualifiant la vaccination de « fondamentale », il a, par ailleurs, judicieusement rappelé qu'elle avait permis de faire disparaître certaines maladies comme la poliomyélite. La vaccination est en effet un enjeu important de santé publique. Si le choix de se faire vacciner est individuel, ses répercussions sont collectives et c'est en cela que les pouvoirs publics se doivent d'intervenir. Le ministère semble néanmoins faire fi de la pénurie de médicaments qui frappe actuellement notre pays. Une « campagne de vaccination sans vaccins » : la situation serait cocasse si elle n'était pas dramatique. Depuis quelques temps déjà, les vaccins les plus recommandés sont constamment en rupture de stocks. N'ayant pas anticipé cette forte demande ou préférant vendre leurs produits à l'étranger, les laboratoires les distribuent au compte-gouttes pénalisant ainsi les patients. La situation de pénurie ne semble, par ailleurs, pas prête de s'améliorer selon l'Agence nationale de sécurité du médicament qui ne prévoit pas de « retour à la normale » avant le début de l'année 2016. D'ici là, les délais de réapprovisionnement risquent encore d'être repoussés. Face à ce risque de diminution de la couverture vaccinale des Français, les professionnels de santé tentent de développer des alternatives. Pour pallier la pénurie de certains vaccins pentavalents, l'Infanrix Hexa a, par exemple, été proposé. Solution peu judicieuse toutefois, car les familles s'en méfient depuis qu'il a été accusé de favoriser le développement de la sclérose en plaques. La santé des Français est dans l'impasse tandis que le ministère semble s'égarer sur le sujet. Ce ne sont point les familles qu'il convient de cibler mais bien les laboratoires qui peinent à approvisionner nos officines. Avant donc de lancer une « campagne de vaccination sans vaccins », il lui demande si elle entend intervenir auprès des laboratoires afin que cessent ces dangereuses pénuries.

Texte de la réponse

Construit sur la base des recommandations de Sandrine HUREL, ancienne députée, chargée par le Premier ministre d'une mission sur la politique vaccinale, le plan d'action pour la rénovation de la politique vaccinale a été présenté par la ministre chargée de la santé le 12 janvier 2016. Ce plan poursuit un objectif clair : agir auprès des particuliers, des professionnels de santé et des industriels, pour renforcer la confiance dans la vaccination. Pour y parvenir, il propose 4 axes d'intervention : informer, coordonner, sécuriser l'approvisionnement et débattre. L'information, indispensable pour le grand public et les professionnels de santé, doit être renforcée notamment par : - la publication d'un bulletin trimestriel à destination des professionnels de santé ; - la création d'un « Comité des parties prenantes », sous l'égide de la direction générale de la santé (DGS) composé de professionnels de santé, d'associations d'usagers et d'institutionnels, pour mieux comprendre les réticences éventuelles et anticiper les situations de crise ; - l'accélération de la mise en œuvre du carnet de vaccination électronique, entièrement personnalisé, pour améliorer le suivi du statut vaccinal des patients ; - la mise en place d'un site Internet dédié par la future « Agence nationale de santé publique » (ANSP) qui sera créée au cours du premier semestre. Le second axe a trait à la coordination des différents acteurs pour assurer une meilleure gouvernance de la politique vaccinale. Cet aspect est essentiel pour restaurer la visibilité de la politique vaccinale et la confiance de nos concitoyens. Cette meilleure gouvernance nécessite : - la formalisation, sous l'égide de la DGS, des échanges entre le ministère, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) pour améliorer les connaissances sur les effets indésirables ; - le rattachement du Comité technique des vaccinations (CTV) à la Haute autorité de santé (HAS) pour unifier les instances d'expertise et renforcer son indépendance ; - le soutien à la recherche sur les vaccins et le développement de solutions facilitant et fiabilisant leur production, en lien avec le ministère chargé de la recherche. Il convient par ailleurs de sécuriser l'approvisionnement en luttant contre les tensions d'approvisionnement et les pénuries de vaccins. Dans le cadre de ce troisième axe du plan d'action, il convient : - d'obliger les industriels produisant des vaccins inscrits au calendrier vaccinal de mettre en place des plans de gestion des pénuries (constitution de stocks réservés au territoire national, mise en place de chaînes alternatives de fabrication des vaccins et identification de différentes sources d'approvisionnement en matières premières). Ces obligations sont assorties de sanctions en cas de non-respect (mesure votée dans le cadre du projet de loi de modernisation de notre système de santé) ; - de simplifier les autorisations d'importation, notamment via l'harmonisation des conditionnements, afin de pallier un éventuel manque de vaccins en France. La Ministre chargée de la santé qui a déjà eu des contacts particuliers avec les différents industriels a annoncé son intention de réunir rapidement les industriels ainsi que le comité vaccination du LEEM, pour qu'ils lui remettent des propositions pour empêcher toute rupture d'approvisionnement des vaccins inscrits dans le calendrier vaccinal et assumer ainsi leurs responsabilités. Enfin le quatrième axe doit permettre à la population de se réapproprier les enjeux de santé publique liés à la vaccination et de faire évoluer si besoin la politique vaccinale. C'est pourquoi une grande concertation citoyenne sur le sujet de la vaccination sera menée sur toute l'année 2016. Cette concertation citoyenne sera organisée en trois temps par un comité d'orientation qui sera présidé par une personnalité qualifiée, Alain FISCHER, Professeur en immunologie pédiatrique et Professeur au Collège de France. Les trois temps rythmeront l'année 2016 : - dès le mois de mars, ce sera le temps de l'expression des opinions par le biais d'une plateforme web qui recueillera les contributions citoyennes, professionnelles, associatives, institutionnelles ; à partir du mois de mai, un jury de citoyens, un jury de professionnels de santé et un jury d'experts scientifiques analyseront ces contributions en n'écartant aucune des questions de fond que se posent les Français : faut-il maintenir une différence entre les vaccins obligatoires, d'une part, et les vaccins recommandés, d'autre part ? quelle perception du bénéfice/risque individuel ? quelle acceptation du risque lié à la vaccination ou à la non-vaccination… - au mois d'octobre, un débat public national permettra d'échanger sur les avis des jurys et le contenu des contributions citoyennes, - sur la base de l'ensemble des contributions recueillies, le comité d'orientation formulera dès décembre 2016, des conclusions sur l'évolution de la politique vaccinale. La ministre chargée de la santé, au terme de ce processus, tirera tous les enseignements de ces échanges et proposera les adaptations utiles à la politique vaccinale.