14ème législature

Question N° 92865
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Droits des femmes
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > pharmacie et médicaments

Tête d'analyse > médicaments

Analyse > vente libre. automédication. perspectives.

Question publiée au JO le : 02/02/2016 page : 909
Réponse publiée au JO le : 20/09/2016 page : 8364
Date de changement d'attribution: 12/02/2016

Texte de la question

M. Jacques Bompard interroge Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes sur la vente abusive de médicaments sans ordonnance, sur leur efficacité et sur les prix croissants de ceux-ci. Des enquêtes récentes démontrent que la moitié des médicaments les plus vendus en pharmacie sans ordonnance sont dangereux pour les consommateurs et certaines constatent une augmentation des prix. En effet, en cas de rhume, de maux de ventre, des troubles intestinaux, il est inutile d'aller courir à la pharmacie acheter un quelconque sirop ou comprimés contre la toux puisque « la plupart sont inefficaces, quand ils ne sont pas carrément à proscrire en raison d'un rapport bénéfice-risque défavorable en automédication ! » Une étude du magazine 60 millions de consommateurs, a évalué que c'est le cas de vingt-sept médicaments sur soixante et un des médicaments les plus vendus en pharmacie. Ces médicaments « comportent trop de contre-indications et des effets indésirables disproportionnés pour soigner des maux passagers » déclare le journal. Certains médicaments « devraient être retirés du marché » du fait de leurs formulations aberrantes, de l'association de substances qui décuplent les risques d'accidents cardio-vasculaires et neurologiques. Seuls 13 d'entre eux ont un rapport bénéfice-risque favorable et sont « à privilégier ». De plus, selon cette même enquête, vingt autres médicaments sont classés « faute de mieux » en raison d'une efficacité « faible ou non prouvée ». Leur prise peut s'accompagner de manifestations indésirables diverses (somnolence, etc.). Par ailleurs, dans les listes d'ingrédients, on peut relever la présence de substances indésirables comme de l'alcool ou des allergènes potentiels. Comment expliquer que seule une minorité de médicaments en vente libre, parmi les plus demandés, soit efficace et inoffensive ? Par conséquent, ces études montrent que ces médicaments, bien que vendus sans ordonnance, ne sont pas « des produits de consommation comme les autres ». Ils sont à l'origine d'au moins 18 000 décès et environ 150 000 patients sont hospitalisés à cause d'effets indésirables provoqués par leur traitement ou d'erreurs médicamenteuses. Ceux-ci sont déclenchés par le mauvais usage des médicaments, des effets secondaires inattendus, l'automédication ou la mauvaise prescription. Ce sont les personnes âgées qui paient le plus lourd tribut, selon la Haute autorité de santé, les accidents sont deux fois plus fréquents après 65 ans. Un problème de santé publique « d'autant plus préoccupant que ces incidents pourraient pour la plupart, être évités ». Ensuite, le prix des médicaments vendus sans ordonnance est en général moins élevé que lorsqu'il est vendu derrière le comptoir, affirme l'association Familles rurales (Observatoire des prix des médicaments, janvier 2016). L'accès libre signifie que le médicament peut être pris directement par le patient, qui peut ainsi comparer lui-même son prix à d'autres produits similaires. « En comparant les prix, le consommateur peut économiser en moyenne 4 euros et jusqu'à plus de 5 euros sur une boîte (...) s'il existe plusieurs présentations pour un même produit », souligne l'association. L'accès libre est opposé à une vente « derrière le comptoir », où le pharmacien vend un produit visible mais non accessible directement, et à une vente où le médicament n'est pas visible. L'accès libre serait ainsi en général plus favorable au porte-monnaie du patient. La tendance est bien à un élargissement de cet accès dans les pharmacies, souligne Familles rurales. L'article R. 4235-64 du code de la santé publique qui demande au pharmacien de ne pas « inciter ses patients à une consommation abusive de médicaments » ne semble pas respecté. Enfin, on peut déplorer une augmentation de 4 % des tarifs de ces produits depuis 2010, malgré la volonté du Gouvernement en 2008 d'une baisse des prix par un meilleur accès des médicaments. « L'objectif du décret de 2008, autorisant le libre accès de certains médicaments afin d'amorcer une baisse des prix n'est donc toujours pas atteint ». De plus, les écarts de prix entre pharmacies restent très importants pour ces produits, dans un rapport qui se situe en général entre 1,6 et 2,7. Il y a donc un véritable enjeu à relever afin de « mieux protéger les consommateurs » en révisant la législation. Il est demandé au ministre quelles mesures il entend prendre afin d'assurer la sécurité des consommateurs.

Texte de la réponse

L'automédication constitue un enjeu important de santé publique. Les mesures d'encadrement et de formation qui l'accompagnent permettent de renforcer l'autonomie du patient dans sa prise en charge de pathologies bénignes. Les médicaments d'automédication, comme l'ensemble des médicaments, ont fait l'objet d'une évaluation par les agences sanitaires nationales ou européenne et ont été autorisés en raison de leur rapport bénéfices/risques, favorable. Une des conditions de réussite de l'automédication est sans conteste une bonne information du patient, tant sanitaire qu'économique. Le patient doit en effet être conseillé, accompagné, éduqué et suivi. C'est le rôle des professionnels de santé et particulièrement du pharmacien d'officine s'agissant du conseil relatif à la médication officinale et d'un juste recours aux soins. Par ailleurs, le développement de l'automédication doit se faire dans le respect des exigences de sécurité et ne doit pas conduire certains patients à renoncer à des soins plus appropriés. Ces enjeux font partie des engagements stratégiques du Comité stratégique de filière Industries et technologies de santé (CSF), dont une mesure concerne l'automédication sécurisée. Des travaux sont ainsi actuellement en cours, en collaboration avec l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, la Haute autorité de santé, les industriels, les associations de patients, les pharmaciens d'officine et les autres ministères concernés (chargés de l'industrie et de la consommation) afin de développer une automédication responsable et de mettre en place un observatoire des prix.