14ème législature

Question N° 93175
de M. André Schneider (Les Républicains - Bas-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Environnement, énergie et mer
Ministère attributaire > Environnement, énergie et mer

Rubrique > cours d'eau, étangs et lacs

Tête d'analyse > aménagement et protection

Analyse > rivières. continuité écologique. directive européenne.

Question publiée au JO le : 16/02/2016 page : 1409
Réponse publiée au JO le : 23/08/2016 page : 7519

Texte de la question

M. André Schneider attire l'attention de Mme la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat sur l'exécution du classement des rivières au titre de la continuité écologique (article L. 214-17 du code de l'environnement). En application de la directive-cadre européenne 2000 sur l'eau, les États membres sont obligés de tout mettre en œuvre pour obtenir un bon état écologique et chimique des rivières et masses d'eau. Pour ce faire, la France a classé une grande partie de ses cours d'eau en liste 2 de l'article L. 214-17 du code de l'environnement, au titre de la continuité écologique. Selon ce classement, 10 à 20 000 seuils et barrages devront être équipés de dispositifs de franchissement (passes à poissons ou rivière de contournement) dont le coût substantiel pour leurs propriétaires privés ou publics risque d'entraîner la destruction de ces ouvrages. Chaque pays de l'Union européenne signataire de cette directive dresse régulièrement un bilan de sa mise en œuvre et le soumet à l'évaluation de la Commission européenne. Or celle-ci a, en mars 2015, publié sa dernière évaluation à partir de données transmises fin 2012. Ce rapport suit une étude, également publiée en mars 2015 par l'Agence européenne de l'environnement, qui révèle que seulement 53 % des masses d'eau européennes seront en bon état écologique en mars 2016. Cette étude démontre également que la France ne figure pas parmi les bons élèves de l'Europe dans ce domaine. Pour donner au pays les moyens d'atteindre les objectifs de cette directive européenne, la nomination d'une commission de travail ouverte à l'ensemble des parties prenantes serait une solution intéressante pour parvenir à définir les conditions d'une mise en œuvre plus équilibrée de la continuité écologique. Elle exigerait cependant qu'un moratoire soit immédiatement décrété avant que cette commission ne remette ses conclusions, que les « parties prenantes » soient réellement identifiées s'agissant de la spécificité de notre politique publique de l'eau, et enfin que le suivi accordé aux conclusions des travaux de cette commission soit clairement défini au préalable. Il lui demande quelles sont ses intentions à ce sujet.

Texte de la réponse

La continuité écologique des cours d'eau constitue l'un des objectifs fixés par la directive Cadre sur l'eau. Elle est indispensable à la circulation des espèces mais également des sédiments. La conciliation entre ce principe et l'existence de moulins, dont l'aspect patrimonial de certains est indéniable, est cependant un autre objectif à atteindre. Ainsi, afin de pouvoir appréhender au mieux la situation actuelle, l'office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) a établi un inventaire des obstacles à l'écoulement de toutes sortes (barrages, buses, radiers de pont, etc.). Celui-ci recense plus de 80 000 obstacles. Parmi ceux-ci, un premier ordre de grandeur de 18 000 obstacles dont le nom contient le mot « moulin » peut être tiré. Moins de 6 000 d'entre eux se situent sur des cours d'eau où s'impose une obligation de restauration de la continuité écologique. Enfin, une partie d'entre eux sont de fait partiellement ou totalement détruits et d'autres sont déjà aménagés d'une passe-à-poissons ou correctement gérés et ne nécessitent pas d'aménagement supplémentaire. Ainsi, il apparait important d'indiquer que la politique de restauration de la continuité écologique ne vise pas la destruction de moulins. En effet, cette politique se fonde systématiquement sur une étude au cas par cas de toutes les solutions envisageables sur la base d'une analyse des différents enjeux concernés incluant l'usage qui est fait des ouvrages voire leur éventuelle dimension patrimoniale. Cette approche correspond à l'esprit des textes règlementaires sur le sujet, aucun n'ayant jamais prôné la destruction des seuils de moulins. Pour atteindre le bon état écologique et respecter les engagements de la France en matière de restauration des populations de poissons amphihalins vivant alternativement en eau douce et en eau salée, tels que le saumon, l'anguille ou l'alose, il est indispensable de mettre en œuvre des solutions de réduction des effets du cumul des ouvrages sur un même linéaire. C'est pourquoi, la politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau se fonde également sur la nécessité de supprimer certains ouvrages, particulièrement ceux qui sont inutiles et/ou abandonnés. Ce point ne concerne ni ne vise spécifiquement les seuils de moulins. Les moulins entretenus, utilisés ou ayant une dimension patrimoniale d'intérêt, ne sont en aucun cas mis en danger par la politique de restauration de la continuité écologique. Compte tenu des nombreuses réactions, notamment des fédérations de propriétaires de moulins et d'élus, dues surtout à des incompréhensions de cette politique, une instruction a été donnée le 9 décembre 2015 aux préfets afin qu'ils ne concentrent pas leurs efforts sur ces ouvrages chargés de cette dimension patrimoniale. Cette instruction les invite également à prendre des initiatives pédagogiques à partir des multiples situations de rétablissement de la continuité réalisées à la satisfaction de tous, y compris sur les moulins. Le groupe de travail organisé par le ministère de la culture et de la communication, dont le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer fait partie, ainsi que la mission du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), devrait permettre d'affiner la connaissance sur le nombre de seuils de moulins véritablement concernés. Il devrait proposer également des pistes pour renforcer la concertation locale et la prise en compte adaptée de la dimension patrimoniale des moulins dans le cadre d'une diversité de solutions de conciliation avec l'enjeu de restauration de la continuité écologique des cours d'eau.