14ème législature

Question N° 94158
de Mme Laurence Abeille (Écologiste - Val-de-Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > agriculture

Tête d'analyse > élevage

Analyse > transport. réglementation.

Question publiée au JO le : 22/03/2016 page : 2254
Réponse publiée au JO le : 14/06/2016 page : 5349

Texte de la question

Mme Laurence Abeille attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur le problème des exportations d'animaux vivants vers la Turquie. La France est le premier exportateur européen d'animaux vivants vers la Turquie. En 2015, plus de 80 000 bovins français y ont été exportés et ce chiffre est en augmentation constante. Ce commerce engendre d'importantes souffrances animales, liées aux transports longues distances ainsi qu'aux conditions d'engraissement et d'abattage dans les pays de destination. Une enquête réalisée pendant cinq ans par les associations Animal welfare foundation - Tierschutzbund Zürich et Eyes on animals en collaboration avec CIWF (Compassion in world farming) à la frontière turque sur les camions transportant des animaux français et européens fait état de pratiques inadmissibles, en violation du règlement n° 1-2005 sur le bien-être des animaux pendant leur transport. Lorsque les animaux sont transportés par la route vers la Turquie, ils sont retenus à la frontière, dans les camions, plusieurs jours d'affilée. Les camions sont stationnés sur des parkings sans aucune ombre, dans des conditions souvent caniculaires et les animaux ont des accès limités à l'eau. Les excréments s'accumulent dans les camions et il n'y a pas d'infrastructure pour permettre de décharger les animaux pour qu'ils puissent se reposer ou être soignés s'ils tombent malades, ou pour nettoyer les véhicules. Il s'agit de graves infractions au règlement n° 1-2005. De plus, la jurisprudence récente de la Cour de justice de l'UE a statué que ce règlement est applicable jusqu'à la fin du transport, même en dehors de l'UE. Le règlement requiert que les autorités s'assurent que le transport pourra être conforme avant de l'approuver pour l'exportation. Or l'exportation d'animaux vivants à destination de la Turquie ne peut pas, réalistement, respecter la législation européenne en vigueur. Le règlement (CE) n° 1-2005 sur le bien-être des animaux pendant leur transport précise clairement l'obligation de décharger les animaux à intervalles réguliers pour une période de repos. Cependant, les délais à la frontière sont imprévisibles et les installations sont sommaires, sans lieu de déchargement pour les animaux. Cette enquête montre que dans 70 % des situations inspectées, et pour 89 % des camions transportant des animaux français, des infractions à la loi ont été constatées. En continuant d'approuver les exportations d'animaux de la France vers la Turquie, la France enfreint la législation européenne et cautionne une souffrance animale immense et inacceptable. Dans ces conditions, elle lui demande si la France envisage de cesser d'approuver les exportations vers la Turquie en raison des graves infractions à législation de protection des animaux durant leur transport.

Texte de la réponse

Les exportations vers la Turquie de jeunes bovins destinés à l'engraissement représentent pour l'élevage français un débouché économique majeur. Il est donc primordial d'agir dans un objectif de maintien de ces exportations. L'une des conditions y concourant est bien le respect des règles de protection animale en cours de transport. Une instruction est en cours pour que les services d'inspection du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt mènent des contrôles renforcés, au titre de la protection animale, des exportations d'animaux vers la Turquie. La planification des voyages y est mentionnée comme devant faire l'objet d'une vigilance particulière. Ce dispositif devrait permettre de mieux anticiper les situations à risque pouvant se présenter en dehors de l'Union européenne. Par ailleurs, le ministère chargé de l'agriculture travaille à la reprise des exportations par voie maritime, depuis le port de Sète. Ce mode de transport apporte une garantie supérieure en matière de bien-être animal. Sur ce sujet, le ministère reste mobilisé pour que des discussions soient engagées entre les autorités européennes et turques. Enfin, la France sera impliquée avant l'été 2016 dans un groupe de travail travaillant à l'élaboration, au niveau européen, d'un guide de contrôles harmonisé portant sur les transports de très longues durées. Le ministère chargé de l'agriculture s'engage ainsi, tant au travers de ces actions que par le biais de la stratégie nationale en faveur du bien-être animal dont les nouvelles orientations ont été présentées par le ministre chargé de l'agriculture le 5 avril 2016, dans une démarche de progrès correspondant à la demande sociétale d'une plus grande exigence de protection des animaux.