14ème législature

Question N° 97445
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Défense
Ministère attributaire > Défense

Rubrique > sécurité publique

Tête d'analyse > renseignement

Analyse > moyens.

Question publiée au JO le : 05/07/2016 page : 6114
Réponse publiée au JO le : 18/10/2016 page : 8591

Texte de la question

M. Jacques Bompard attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la nécessité d'augmenter le budget alloué aux services de renseignements et à la nécessité d'accélérer et renforcer la coopération entre ces services, les industriels et start-up du secteur. Les attentats de janvier et novembre 2015, puis ceux de Bruxelles en 2016 ont rappelé aux Français que tous les pays pouvaient être touchés par des attaques terroristes à l'impact plus large que les seuls pays du Moyen-Orient et de l'Afrique. En France, confrontés à la menace, les services de renseignements usent de tous les moyens financiers, techniques et humains dont ils disposent pour lutter. Source de renseignement inestimable, les outils de communications constituent un défi pour les agents. En effet, face à un monde de plus en plus numérisé, la gestion de l'information est devenue stratégique. Ainsi, il est nécessaire que les services de renseignements soient dotés d'équipements à la pointe de la technologie afin de pouvoir traiter la masse d'informations qu'ils reçoivent. Sur le plan industriel, il est primordial d'encourager les innovations permettant d'être plus efficients dans la gestion de l'information. Le géo-référencement constitue l'une des nouveautés qui permettrait aux services de renseignements de superposer sur une carte différents types de renseignements, qu'ils soient disposés sous forme d'images, de ressources électromagnétiques ou humaines. Pour permettre une meilleure gestion de l'information, la nouvelle loi de programmation militaire a permis d'augmenter les effectifs de services tels que la direction du renseignement militaire (DRM). Néanmoins, cette hausse limite le problème mais ne le résout pas car la diffusion de l'information croît à un rythme exponentiel. Le général Christophe Gomart expliquait le 19 juin 2016, que le nombre d'images reçues par jour par la DRM serait multiplié de six à dix fois en 2020 (Journal du Dimanche, « La géoréférence nous permet de tracer l'ennemi », François Clemenceau, 19 juin 2016). Ce chiffre met en lumière le besoin d'équiper les services de renseignements en logiciels très performants. De plus, le budget alloué aux renseignements doit être accru pour que la France puisse jouir d'une plus grande autonomie dans ses missions de renseignement. Son manque de matériels d'observation, comme les drones, l'oblige à acheter de l'information auprès de ses alliés, la gratuité étant rarement de mise. Afin de mieux assurer la sécurité des Français, il lui demande si le Gouvernement compte encourager la mise en place de partenariats entre les services de renseignements et les industriels et start-up pour mieux collecter et trier le flux d'informations reçus. Il lui demande si ces services bénéficieront d'un fonds exceptionnel, au regard du contexte sécuritaire actuel, afin qu'ils puissent remplir pleinement leurs missions.

Texte de la réponse

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 a identifié cinq grandes fonctions stratégiques dont la fonction « connaissance et anticipation » sur laquelle repose notre capacité de décision souveraine et d'appréciation autonome des situations. Le renseignement joue un rôle crucial dans cette fonction, qui conditionne aussi l'efficacité des forces. Au sein du ministère de la défense, les services concourant au renseignement sont au nombre de trois : la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) et la direction du renseignement militaire (DRM). S'agissant des moyens humains et matériels alloués au renseignement, la loi no 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire (LPM) pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense a prévu de consolider la communauté française du renseignement sous l'égide du coordonnateur national du renseignement, grâce notamment à la mutualisation des moyens et à une plus grande interopérabilité entre les services. Elle précise également que le renseignement bénéficiera d'un effort financier substantiel au cours de la période 2014-2019 et que les effectifs dédiés à cette activité seront mis en cohérence avec les besoins nouveaux associés à la mise en œuvre des équipements techniques et à l'analyse de flux d'informations accrus. Dans ce contexte, il peut être observé que les effectifs de la DGSE, de la DPSD et de la DRM n'ont cessé d'augmenter depuis 2014. A la suite des attentats de janvier 2015, le Premier ministre a ainsi immédiatement décidé la création de 250 postes au profit de ces trois services sur la période 2015-2017. Cette orientation a été traduite dans les dispositions de la loi no 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019. Conformément aux décisions prises lors du conseil de défense et de sécurité nationale du 6 avril 2016, la montée en puissance de l'activité de renseignement se poursuivra avec la création de plus de 600 postes supplémentaires entre 2017 et 2019. Au total, entre 2014 et 2019, les services de renseignement auront en conséquence vu leurs effectifs augmenter de plus de 1 700 postes. Par ailleurs, l'effort financier en faveur du renseignement a été programmé à près de 300 millions d'euros en moyenne au cours des trois dernières années, hors masse salariale. Ces crédits ont été consacrés essentiellement au renforcement des capacités des services concernés. Pour faire face à la menace terroriste, un nouvel effort financier a été consenti lors du conseil de défense du 6 avril 2016, à hauteur de 40 millions d'euros supplémentaires affectés au renseignement et à la cyberdéfense. La loi précitée du 28 juillet 2015 dispose en outre que le développement de nos capacités de recueil, de traitement et de diffusion du renseignement sera prioritaire sur toute la durée de la planification d'ici à 2025-2030. Les efforts porteront notamment sur les composantes spatiales et aériennes (pour l'imagerie comme pour l'interception électromagnétique), ainsi que sur les ressources humaines. De même, les capacités de veille stratégique et les nouveaux moyens de surveillance et d'interception nécessiteront d'accroître encore les capacités de traitement des données pour garantir l'efficacité de cette fonction primordiale. La France dispose d'une véritable expertise et d'outils de très haut niveau dans le domaine du renseignement et de l'imagerie, qui reposent sur une filière industrielle nationale d'excellence. A titre d'exemples, la composante satellitaire MUSIS, dans le domaine optique, a été renforcée avec l'acquisition d'un troisième satellite en 2015. De façon similaire, les trois satellites du programme CERES permettront de développer le renseignement spatial optique, accessible seulement à un club fermé de pays. S'agissant des drones également, l'acquisition du Patroller constitue un jalon majeur pour la filière nationale dans ce domaine. En outre, il est souligné que la DRM a animé, les 21 et 22 juin dernier, la première convention nationale « GEOINT » (geospatial intelligence) dédiée à l'imagerie et au renseignement géospatial, manifestation à laquelle a participé le ministre de la défense. L'objectif principal de cet événement, qui a vocation à être organisé tous les deux ans, est de rapprocher les différents acteurs du domaine : armées, communauté française du renseignement, partenaires étatiques et privés, industriels, acteurs académiques, partenaires étrangers, afin de partager les besoins de la défense, de stimuler l'innovation et de favoriser la coopération. Lors de la convention qui s'est déroulée en juin 2016, un salon a ainsi réuni dix-huit exposants parmi lesquels Thales, Airbus DS et de nombreuses PME et start-up. Enfin, il peut être précisé que conformément à la loi no 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement et à son décret d'application no 2015-1185 du 28 septembre 2015, la DGSE, la DPSD et la DRM ont été désignées comme services spécialisés de renseignement pouvant être autorisés, sous certaines conditions, à recourir à diverses techniques de recueil de renseignement et notamment à celles mentionnées aux articles L. 853-1 et L. 853-2 du code de la sécurité intérieure.